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The Geopolitics of Energy
Jean-Pierre Favennec Paris, Éditions Technip, 2011, 321 p.
Cet ouvrage de Jean-Pierre Favennec sera très utile pour tous ceux qui cherchent à en savoir plus sur les questions énergétiques et leurs implications stratégiques. Il est divisé en deux parties : dans la première, l’environnement énergétique, toutes les questions générales sur ce secteur sont abordées, dans la seconde, l'auteur passe en revue les questions énergétiques par région géographique.
La première partie donne des informations claires sur l’ensemble des énergies consommées dans le monde et des opérations qui relient le producteur au consommateur final. De nombreuses questions sont abordées, que ce soit le faible poids des énergies renouvelables dans l’offre totale (2 %), les implications alimentaires d’une utilisation excessive du bioéthanol en tant qu’énergie, le réchauffement climatique ou les avantages et inconvénients de l’énergie nucléaire. Les mécaniques de la formation des prix sur les différents marchés sont clairement exposées : les éléments sur le prix du gaz naturel, dont l’importance du coût de transport, sont très bien décrits. La partie la plus intéressante est peut-être celle concernant la sécurité des approvisionnements. La question de la sécurité des infrastructures de transport apparaît ici essentielle dans quasiment toutes les zones du monde. Les différences entre la politique étatsunienne – qui a un objectif explicite de sécuriser ses approvisionnements énergétiques et les moyens militaires d’appliquer cette politique – et le caractère timoré de la politique de l’Union européenne (UE) sont bien mis en évidence. La complexité des relations énergétiques entre les États-Unis et le Venezuela (du fait du décalage entre l’opposition idéologique entre les deux pays et l’importance du marché américain pour l’essence vénézuélienne), la difficulté de l’UE à diminuer sa dépendance vis-à-vis des importations de gaz russe et l’importance croissante des ressources énergétiques africaines pour les États-Unis sont des exemples des questions abordées dans cette partie. La dépendance énergétique de l’Asie, en particulier de l’Inde et de la Chine, et l’importance du Moyen-Orient en tant que source la plus proche d’approvisionnement pour ces deux pays, ainsi que les risques de conflit entre les principales économies de la région (Chine, Inde, Japon) du fait de leur dépendance énergétique et des tensions politiques préexistantes sont également clairement exposés.
On peut regretter que cet ouvrage ne cite aucune référence bibliographique. En outre, certaines affirmations auraient pu être nuancées. Ainsi si l’auteur a raison de mettre en avant le fait que les États-Unis sont le seul pays au monde capable de sécuriser militairement l’ensemble de leurs approvisionnements énergétiques, il aurait toutefois aussi pu insister sur le coût budgétaire d’une telle politique, surtout dans une période où l’économie étatsunienne peine à sortir de la crise de 2007-2008. D’autre part, on ne comprend pas vraiment pourquoi, selon l’auteur, les sanctions étatsuniennes contre l’Iran empêchent l’UE d’intégrer l’Iran dans le projet Nabucco. Cette question est avant tout une question de volonté politique et les sanctions étatsuniennes, du fait de leur caractère extraterritorial, n’ont pas empêché Total d’investir en Iran à la fin des années 1990. Par ailleurs, malgré l’exhaustivité de l’ouvrage, plusieurs éléments essentiels ne sont pas traités. Ainsi, l’important programme de réduction des subventions sur l’énergie en Iran initié fin 2010 n’est pas évoqué. C’est pourtant un des rares cas d’économie pétrolière engageant ce type d’action. Par ailleurs, la question des fonds souverains – si importante pour la gestion des surplus des économies pétrolières et gazières, ainsi que pour la sécurisation des approvisionnements en énergie pour la Chine – est très peu abordée. Enfin, à part la théorie du Dutch disease, peu d’explications économiques sont fournies pour mettre en lumière les difficultés des économies pétrolières ou gazières. À part l’exemple de quelques pays africains, aucun élément n’est donné sur l’économie politique induite par la redistribution de la rente chez les principaux producteurs. Or, on sait que ce type d’économie est intimement lié à la stabilité politique de ces pays et est donc une question essentielle de géopolitique.