Rwanda. Je demande justice pour la France et ses soldats
Général Didier Tauzin Jacob-Duvernet, Paris, 2011, 224 p.
Dix-sept ans après le déclenchement de la tragédie, la vérité s’impose quant aux génocides du Rwanda et de la République démocratique du Congo. Pierre Péan [1] et Bernard Lugan [2] ont eu le courage depuis une demi-douzaine d’années de défendre un point de vue allant à l'encontre la vérité officielle : les victimes Tutsis d’une part, les tortionnaires Hutus et leurs complices français de l’autre. C’est aujourd’hui le général Tauzin qui s’exprime. Méconnu du grand public, Didier Tauzin a mené dans l’ombre une brillante carrière militaire. Après avoir défendu ardemment les intérêts de la France et de l’Occident contre le communisme pendant la Guerre froide, en tant qu’officier du 1er RPIMA [3], le fer de lance des opérations spéciales françaises, il se voit confier son commandement en 1992.
À la tête de celui-ci, il va être en charge de deux missions à haut risque : stabiliser le Rwanda et tenter de sauver ce qui peut l’être après le début des massacres de 1994. La première mission survient en 1993. Le Front patriotique rwandais (FPR) de Paul Kagamé, depuis trois ans en guerre contre le gouvernement rwandais de Juvénal Habyarimana, est en passe de l’emporter. Paris demande à Didier Tauzin de contenir l’offensive tutsie avec quelques dizaines de ses paras dans le cadre de l’opération Noroit. Encadrant les FAR (Forces Armées Rwandaises) en déroute, les hommes du 1er RPIMA parviennent à stopper la débâcle, rallier les troupes et infliger des pertes sévères au FPR. Alors qu’une contre-offensive, montée par Tauzin, se prépare à renvoyer la guérilla tutsie dans sa base arrière ougandaise, l’Élysée décide de ne pas pousser l’avantage et d’en rester là. Tauzin et le gros de ses hommes rentrent en France, frustrés d’une victoire qui leur tendait les bras. Un an plus tard ils sont de retour au Rwanda.
Entre temps Juvénal Habyarimana a été assassiné, le génocide des Tutsis a commencé, le FPR victorieux, marche sur Kigali. De part et d’autre les massacres se multiplient. Conformément à la résolution 929 du Conseil de sécurité des Nations unies, la France lance l’opération Turquoise. Il s’agit de sauver le plus possible de civils, toutes ethnies confondues. Didier Tauzin et le 1er RPIMA font partie du dispositif. Cette fois ils ont l’ordre d’éviter tout affrontement avec le FPR et de n’apporter aucun soutien aux FAR. Impuissants face à la barbarie, ils font ce qu’ils peuvent, mettent à l’abri le plus grand nombre de réfugiés dans les camps du Zaïre, puis rentrent en France. Ce sont les faits. Des soldats français, exécutant les ordres du chef des armées, François Mitterrand, ont tenté de sauver le régime Habyarimana en 1993, un an avant le début du génocide des Tutsis. Sous mandat des Nations unies, ces mêmes soldats sont ensuite revenus un an plus tard pour mener une opération humanitaire. Rien de répréhensible donc.
Pourtant ces hommes doivent depuis dix-sept ans se battre pour défendre leur honneur. Sbires du néo-colonialisme français, ils auraient prolongé la longue chaîne d’exactions à laquelle se résume l’histoire de la présence française en Afrique. Complices du génocide voire génocidaires tout courts, les soldats français des opérations Noroit et Turquoise ont été traités de tous les noms.
Désormais, pour la plupart, en retraite, donc déliés de leurs obligations de réserve, les officiers français impliqués dans cette tragédie passent à la contre-attaque. Avec, en première ligne, Didier Tauzin.
Didier Tauzin espère enfin que justice sera rendue. Que ceux qui ont cloué au pilori les militaires français – journalistes, ONG, militants divers – vont, à leur tour devoir rendre des comptes, justifier leur soutien au FPR, à un régime dictatorial et criminel. Après les enquêtes des juges Bruguière et Trévidic, le rapport de l’ONU dénonçant les abominations de Kagamé, il souhaite qu’enfin le vent tourne et que les donneurs de leçon assument leurs erreurs et leur aveuglement.