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Qu’est-ce qu’une bonne représentation ? L’Organisation internationale du travail de 1919 à nos jours
Par Marieke Louis - Paris, Dalloz, 2016, 476p.
La thèse pour le doctorat en science politique que Marieke Louis a brillamment soutenue en novembre 2014 à Sciences Po Paris et qui est publiée à la « Nouvelle bibliothèque de thèses » de Dalloz présente un double intérêt.
Le premier est de s’intéresser aux organisations internationales, alors que la recherche en relations internationales tend à les dédaigner, leur reprochant leurs bureaucraties, leur préférant l’étude d’acteurs moins classiques du système international. Pourtant, l’Organisation internationale du travail (OIT), qui fêtera bientôt son centenaire, joue un rôle essentiel dans la société internationale en élaborant des politiques, des programmes et des normes visant à améliorer les conditions de travail.
Le second est de le faire non pas en déroulant l’histoire de cette organisation et en exposant son action, mais en s’interrogeant sur sa représentativité. Qu’est-ce qu’une bonne représentation ? La question intéresse autant les juristes que les politistes. Constituée autour du principe original du tripartisme, l’OIT constitue un cas d’étude privilégié : à la différence des organisations intergouvernementales traditionnelles où seuls les gouvernements sont représentés, l’OIT compte également des représentants des travailleurs et des employeurs.
Marieke Louis examine tour à tour les deux modalités principales de la représentation. À l’aune de la « représentation descriptive » ou « représentation-miroir », la bonne représentation sera celle où les représentants présentent le plus grand degré de similitude avec les représentés. À l’aune de la « représentation substantielle », elle sera celle qui défend le mieux les intérêts de ses membres. Ces deux modalités font écho à l’opposition traditionnelle entre représentativité et efficacité.
Marieke Louis refuse cette dichotomie simpliste et, à travers l’étude des divers organes de l’OIT, montre que « l’enjeu d’une bonne représentation est indissociable de la réalisation des objectifs de l’organisation » (p. 41). C’est tout l’objet de la première partie de sa thèse où elle soutient que la représentativité au sein de l’OIT a toujours été avant tout mobilisée comme un « impératif fonctionnel », à tous les niveaux de l’organisation : dans sa forme tripartite, dans le choix de ses membres et dans la composition de ses organes – en particulier au niveau de son conseil d’administration.
Toutefois, cette conception doit faire bon ménage avec celle d’une « exigence démocratique », qui s’exprime principalement sur un mode contestataire. C’est l’objet de la deuxième partie de la thèse de Marieke Louis. Elle y examine les contestations externes – émanant de certains acteurs, tels que les coopératives ou les organisations non gouvernementales (ONG), s’étant vu refuser l’accès à l’OIT – et internes – émanant de certains membres de l’organisation, tels que les pays en développement, qui revendiquent une meilleure représentation – qui, aux marges de l’organisation, en remettent en cause les principes fondateurs.
Ces deux principes contradictoires sont accommodés au jour le jour par l’organisation, soucieuse à la fois de répondre aux contestations démocratiques dont elle est saisie et de ne pas remettre en cause son fonctionnement harmonieux. C’est l’objet de la dernière partie de la thèse. Marieke Louis y montre, par exemple, comment une place a été faite aux ONG qui, à défaut de siège en qualité de membres, ont été reconnues comme experts techniques. Elle étudie également les élargissements progressifs du conseil d’administration. Elle montre, enfin, comment la régionalisation – c’est-à-dire la responsabilité donnée aux régions de désigner leurs membres – a permis de répondre aux revendications des moins nantis.
Outre qu’elle apporte un éclairage inédit sur une organisation méconnue, l’OIT, la thèse de Marieke Louis est riche d’enseignements pour l’ensemble des organisations internationales et au premier chef pour l’Organisation des Nations unies (ONU), dont la réforme de son Conseil de sécurité, prise en tenaille entre légitimité, représentativité et efficacité, constitue un serpent de mer.
Le premier est de s’intéresser aux organisations internationales, alors que la recherche en relations internationales tend à les dédaigner, leur reprochant leurs bureaucraties, leur préférant l’étude d’acteurs moins classiques du système international. Pourtant, l’Organisation internationale du travail (OIT), qui fêtera bientôt son centenaire, joue un rôle essentiel dans la société internationale en élaborant des politiques, des programmes et des normes visant à améliorer les conditions de travail.
Le second est de le faire non pas en déroulant l’histoire de cette organisation et en exposant son action, mais en s’interrogeant sur sa représentativité. Qu’est-ce qu’une bonne représentation ? La question intéresse autant les juristes que les politistes. Constituée autour du principe original du tripartisme, l’OIT constitue un cas d’étude privilégié : à la différence des organisations intergouvernementales traditionnelles où seuls les gouvernements sont représentés, l’OIT compte également des représentants des travailleurs et des employeurs.
Marieke Louis examine tour à tour les deux modalités principales de la représentation. À l’aune de la « représentation descriptive » ou « représentation-miroir », la bonne représentation sera celle où les représentants présentent le plus grand degré de similitude avec les représentés. À l’aune de la « représentation substantielle », elle sera celle qui défend le mieux les intérêts de ses membres. Ces deux modalités font écho à l’opposition traditionnelle entre représentativité et efficacité.
Marieke Louis refuse cette dichotomie simpliste et, à travers l’étude des divers organes de l’OIT, montre que « l’enjeu d’une bonne représentation est indissociable de la réalisation des objectifs de l’organisation » (p. 41). C’est tout l’objet de la première partie de sa thèse où elle soutient que la représentativité au sein de l’OIT a toujours été avant tout mobilisée comme un « impératif fonctionnel », à tous les niveaux de l’organisation : dans sa forme tripartite, dans le choix de ses membres et dans la composition de ses organes – en particulier au niveau de son conseil d’administration.
Toutefois, cette conception doit faire bon ménage avec celle d’une « exigence démocratique », qui s’exprime principalement sur un mode contestataire. C’est l’objet de la deuxième partie de la thèse de Marieke Louis. Elle y examine les contestations externes – émanant de certains acteurs, tels que les coopératives ou les organisations non gouvernementales (ONG), s’étant vu refuser l’accès à l’OIT – et internes – émanant de certains membres de l’organisation, tels que les pays en développement, qui revendiquent une meilleure représentation – qui, aux marges de l’organisation, en remettent en cause les principes fondateurs.
Ces deux principes contradictoires sont accommodés au jour le jour par l’organisation, soucieuse à la fois de répondre aux contestations démocratiques dont elle est saisie et de ne pas remettre en cause son fonctionnement harmonieux. C’est l’objet de la dernière partie de la thèse. Marieke Louis y montre, par exemple, comment une place a été faite aux ONG qui, à défaut de siège en qualité de membres, ont été reconnues comme experts techniques. Elle étudie également les élargissements progressifs du conseil d’administration. Elle montre, enfin, comment la régionalisation – c’est-à-dire la responsabilité donnée aux régions de désigner leurs membres – a permis de répondre aux revendications des moins nantis.
Outre qu’elle apporte un éclairage inédit sur une organisation méconnue, l’OIT, la thèse de Marieke Louis est riche d’enseignements pour l’ensemble des organisations internationales et au premier chef pour l’Organisation des Nations unies (ONU), dont la réforme de son Conseil de sécurité, prise en tenaille entre légitimité, représentativité et efficacité, constitue un serpent de mer.