See English version below « Ça s’est passé comme ça ». Ceci...
L’expérience démocratique en Algérie (1988-1992)
Par Myriam Aït-Aoudia - Paris, Presses de Sciences Po, 2015, 346p.
Avec cet ouvrage, Myriam Aït-Aoudia, maître de conférences en science politique à Sciences Po Bordeaux et chercheure au Centre Émile Durkheim (CNRS, Université de Bordeaux), revient sur la parenthèse démocratique qu’a vécue l’Algérie entre 1989, date de la promulgation d’une constitution particulièrement ouverte, et 1992, qui marque le début de la confrontation entre l’armée et les islamistes. Vingt ans avant les « printemps arabes », l’Algérie vit des bouleversements politiques et sociaux inédits dans le monde arabe. Par leur ampleur, les mouvements alors en cours dans la société algérienne apparaissent comme les signes avant-coureurs de ce qui adviendra dans l’ensemble de cet espace culturel.
En octobre 1988, des émeutes commencent par provoquer une rupture entre la société et les élites politiques incarnées par le Front de libération nationale (FLN), parti unique sur lequel se concentrent toutes les crispations. L’émergence des islamistes, qui s’organisent au sein Front islamique du salut (FIS), bouleverse alors la donne politique. L’ampleur de cette lame de fond provoque de telles tensions que le pays bascule dans une guerre fratricide qui fera plus de 150 000 morts.
Sur la base d’entretiens avec les principaux acteurs politiques (FLN, Front des forces socialistes [FFS], Rassemblement pour la culture et la démocratie [RCD], FIS), avec d’anciens ministres et généraux à la retraite ainsi que des militants des droits de l’homme, Myriam Aït-Aoudia reconstitue ce processus de délitement de l’État et d’implosion de la société. L’ouvrage relate également les difficultés de la société à accepter et à partager la culture démocratique pour construire un État de droit. Ce difficile apprentissage est l’une des principales raisons de l’échec de cette expérience. En ce sens, la force de l’ouvrage est de mettre en lumière les principaux écueils sur lesquels l’Algérie s’est échouée, avant de basculer dans une tragédie collective dont elle peine, aujourd’hui encore, à évoquer les raisons profondes. Avec plus de 80 entretiens menés, l’auteur présente un panorama complet des différentes sensibilités du paysage politique et de la société du pays. Cette diversité permet d’appréhender avec précision les convulsions qu’a vécues l’Algérie au cours de cette expérience unique de la fin des années 1980. Myriam Aït-Aoudia rappelle avec justesse que dans le sillage des émeutes d’octobre 1988, les nouveaux dirigeants politiques restent tous issus du sérail et que c’est finalement une crise interne au régime qui fera basculer le pays dans la guerre en 1993. Cette mise en perspective souligne le caractère chronique de l’instabilité d’un processus démocratique jamais réellement accepté par les décideurs, les véritables détenteurs du pouvoir ne faisant que gagner du temps avant de s’en réapproprier tous les leviers.
Cette expérience garde aujourd’hui encore un goût amer, et le livre souligne ainsi la nécessité de former des élites éclairées capables de proposer à leurs compatriotes un nouveau pacte de valeurs, substrat sur lequel pourrait se construire une démocratie réelle, et non formelle.
En octobre 1988, des émeutes commencent par provoquer une rupture entre la société et les élites politiques incarnées par le Front de libération nationale (FLN), parti unique sur lequel se concentrent toutes les crispations. L’émergence des islamistes, qui s’organisent au sein Front islamique du salut (FIS), bouleverse alors la donne politique. L’ampleur de cette lame de fond provoque de telles tensions que le pays bascule dans une guerre fratricide qui fera plus de 150 000 morts.
Sur la base d’entretiens avec les principaux acteurs politiques (FLN, Front des forces socialistes [FFS], Rassemblement pour la culture et la démocratie [RCD], FIS), avec d’anciens ministres et généraux à la retraite ainsi que des militants des droits de l’homme, Myriam Aït-Aoudia reconstitue ce processus de délitement de l’État et d’implosion de la société. L’ouvrage relate également les difficultés de la société à accepter et à partager la culture démocratique pour construire un État de droit. Ce difficile apprentissage est l’une des principales raisons de l’échec de cette expérience. En ce sens, la force de l’ouvrage est de mettre en lumière les principaux écueils sur lesquels l’Algérie s’est échouée, avant de basculer dans une tragédie collective dont elle peine, aujourd’hui encore, à évoquer les raisons profondes. Avec plus de 80 entretiens menés, l’auteur présente un panorama complet des différentes sensibilités du paysage politique et de la société du pays. Cette diversité permet d’appréhender avec précision les convulsions qu’a vécues l’Algérie au cours de cette expérience unique de la fin des années 1980. Myriam Aït-Aoudia rappelle avec justesse que dans le sillage des émeutes d’octobre 1988, les nouveaux dirigeants politiques restent tous issus du sérail et que c’est finalement une crise interne au régime qui fera basculer le pays dans la guerre en 1993. Cette mise en perspective souligne le caractère chronique de l’instabilité d’un processus démocratique jamais réellement accepté par les décideurs, les véritables détenteurs du pouvoir ne faisant que gagner du temps avant de s’en réapproprier tous les leviers.
Cette expérience garde aujourd’hui encore un goût amer, et le livre souligne ainsi la nécessité de former des élites éclairées capables de proposer à leurs compatriotes un nouveau pacte de valeurs, substrat sur lequel pourrait se construire une démocratie réelle, et non formelle.