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L’Europe d’après. En finir avec le pessimisme.
Thierry Chopin, Jean-François Jamet, Christian Lequesne Paris, Lignes de repères, 2012, 132 p.
Lors du Sommet européen des 27 et 28 juillet 2011, José Manuel Barroso déclarait qu’il fallait définir une « vision pour l’avenir de l’Europe ».Thierry Chopin, Jean-François Jamet, politologues et chercheurs au Centre d’études et de recherches internationales de Sciences Po (CERI), et Christian Lequesne, spécialiste d’économie européenne, nous proposent justement dans leur ouvrage des perspectives d’avenir pour l’Europe. Par une analyse précise de la situation actuelle, ils apportent ensemble des éléments de réponse à la crise européenne.
La première partie de l’ouvrage analyse la crise de sens de la construction européenne, crise unique en son genre depuis la naissance de l’Union européenne (UE), qui nécessite de penser la politique au-delà du national. Cette crise est amplifiée par le difficile positionnement de l’UE dans la mondialisation. Alors qu’elle reste le principal acteur de celle-ci, elle semble avoir des difficultés à trouver sa place dans le nouveau contexte économique et géopolitique mondial.
Les auteurs se penchent dans un deuxième temps sur la nécessité de reconstituer un discours adapté à l’Europe. Les États membres ont du mal à renoncer au statu quo, cet entre-deux qui leur permet de garder une grande part de souveraineté, et l’intégration s’opère donc par nécessité et non par volonté. Cette intégration « subie » aggrave le déficit démocratique et l’incompréhension des jeunes générations face au projet européen. Un nouveau récit commun aux membres de l’UE s’avère ainsi nécessaire. Ce récit pourrait émerger via la mise en place d’une nouvelle Convention qui permettrait de débattre publiquement du projet européen, en dessinant les contours précis d’un gouvernement économique de la zone euro.
La nécessité de réhabiliter la notion de liberté, noyau de la construction européenne, est soulignée dans la troisième partie. Les auteurs rappellent ainsi que le libéralisme politique est au cœur de l’identité contemporaine des Européens. Suite à la révolution néolibérale, le libéralisme européen a été associé au désastre de la crise financière et est aujourd’hui en crise de sens. Celui-ci doit donc être repensé en prenant en compte le fait qu’il faut repolitiser l’Europe, créer un sentiment d’appartenance et accepter une intervention mesurée de l’État dans le domaine économique.
Dans la dernière partie de l’ouvrage, les auteurs affirment qu’il faut « faire l’Europe en fonction de la planète », c’est-à-dire adapter la construction européenne au contexte changeant de la mondialisation. Selon ce mode de construction, l’UE pourrait alors parvenir à se projeter dans le monde et devenir une puissance économique affirmée à condition d’adopter un discours politique fort pour plus de plausibilité et de légitimité. Les auteurs relèvent quatre éléments essentiels pour la relance du projet économique européen : l’Europe doit continuer ses efforts visant à restaurer et stabiliser sa situation financière, sécuriser les dépenses d’avenir, reprendre l’effort de convergence entre ses gouvernements et définir une stratégie économique extérieure. En adoptant une représentation commune et en suscitant une véritable adhésion de la part de ses citoyens, l’UE pourrait émerger comme un acteur stratégique et économique de la mondialisation.
Dans cet ouvrage bien conçu, les auteurs ne font pas seulement le diagnostic d’un modèle européen en crise mais soumettent des mesures concrètes pour renouer avec l’intégration européenne. En réponse à un euroscepticisme grandissant, les auteurs proposent de véritables perspectives pour l’UE, dans une veine certes fédéraliste mais prudente et pédagogique. Une place importante est accordée aux populations, rappelant sans cesse la nécessité de légitimité pour mener à bien le projet européen. L’ouvrage permet ainsi d’envisager un futur pour l’Europe, une « Europe d’après ».