Les nouveaux défis de l’énergie. Climat, économie, géopolitique
Jean-Marie Chevalier (sous la dir.) Paris, Economica, 2009, 299 p.
La crise énergétique et climatique, synthétisée par le dilemme « comment produire plus d’énergie tout en stabilisant, voire réduisant, les émissions de gaz à effet de serre (GES) ? », amplifiée de problématiques géopolitiques, trouve dans le livre de J.-M. Chevalier une explication relativement approfondie, malgré quelques passages usuels. Centrés sur une problématique ou une région précises, et rédigés par différents contributeurs, les neuf chapitres font une synthèse correcte des défis futurs du secteur de l’énergie et des moyens d’y répondre.
Le chapitre 1 permet de dresser le contexte global actuel du secteur, entre obligation de réduire les émissions de GES, raréfaction des ressources indispensables et nationalisme des Etats. Le chapitre 2 se focalise sur la structure énergétique des pays asiatiques et les enjeux en découlant. Avec 60 % de la population mondiale, les économies sont fortement émettrice de CO2 et dépendantes des énergies fossiles. Or, ce clivage grandissant est synonyme de ruptures écologiques, économiques et géopolitiques importantes.
Concernant la Russie et la région caspienne (chapitre 3), la problématique énergétique s’inscrit avant tout dans une finalité géopolitique, l’ambition russe étant de devenir une superpuissance énergétique afin de retrouver son rang politique au niveau mondial. L’approvisionnement de l’Europe et de l’Asie du Sud-Est passe donc par le contrôle des républiques d’Asie centrale. Le chapitre 5 a pour cadre le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, la question, un peu décevante étant de savoir si leurs immenses ressources ne sont pas un frein au développement. Depuis cinquante ans, les faits semblent pourtant avoir déjà donné la réponse.
Sur les États-Unis (chapitre 6), premiers consommateurs et pollueurs, la question sera celle de la viabilité et de la compatibilité de leur modèle de croissance avec le nouveau contexte énergétique. Bien qu’ayant une grande capacité d’adaptation et d’innovation, ainsi que la puissance financière nécessaire, nul ne sait s’ils pourront évoluer vers plus de frugalité énergétique.
Concernant l’Europe (chapitre 7), son fonctionnement politique schizophrène l’amène à connaître les pires difficultés pour bâtir une stratégie énergétique commune aux pays membres alors que le consensus s’opère relativement bien sur les problématiques climatiques. À terme, l’enjeu pour l’Europe est d’arriver à concilier les deux et à promouvoir cette vision à l’international.
La financiarisation croissante du secteur (chapitre 8) est également abordée, sous l’angle des impacts sur le marché physique. Toutefois, la prise en compte de la stratégie des acteurs aurait mérité d’être plus étudiée. Par ailleurs, les aléas de l’édition (l’article a été fini en juin 2008) n’a pas permis de prendre en compte l’intéressant débat sur l’impact de ces acteurs sur les marchés des dérivés énergétiques, sujet récurrent aux États-Unis et au Royaume-Uni depuis mi-2008.
La question de la pauvreté énergétique (chapitre 4) est soulevée, notamment sur la relation entre énergie et développement. Ainsi, même pourvu de ressources, les pays à bas revenu sont confrontés à la pauvreté et sont également extrêmement sensibles aux fluctuations des prix des matières premières et au réchauffement climatique (sécheresse, inondation). Or, ces phénomènes vont s’accentuer à l’avenir tandis que la croissance démographique, notamment africaine, va exploser. Par conséquent, il y a la nécessité de permettre l’accès à l’énergie comme préalable au développement, ce qui est source de défis.