Les États-nations face à l’intégration régionale en Afrique de l’Ouest. Le cas de la République de Guinée
Alpha Mamadou Diallo (sous la dir.) Paris, Karthala, 2009, 176 p.
Cet ouvrage a été publié dans le cadre du programme Most, programme de l’UNESCO, qui promeut la recherche en sciences sociales. Il est composé de différents articles dont l’ambition principale est d’articuler une vraie intégration régionale en Afrique de l’Ouest, comme le titre de l’ouvrage l’indique. Ces articles abordent les différents aspects que peut prendre une intégration : l’intégration géographique par la mise en commun de la gestion des ressources naturelles de chaque pays ; l’intégration économique et la mise en place d’un vaste marché commun ; l’intégration monétaire qui faciliterait les échange dans la zone ; ou encore l’intégration par l’harmonisation des règles de droit des entreprises.
Les différents auteurs évoquent des éléments clés qui permettraient aux différents pays d’Afrique de l’Ouest de se lier, tel que l’ont faits les pays de l’Union européenne. Cette dernière est d’ailleurs évoquée tout au long du livre et est élevée au rang de modèle pour permettre l’accession à la paix et à la richesse dans cette autre zone du monde. La conception d’un modèle d’intégration et d’unité pour l’Afrique de l’Ouest lui permettrait de parler d’une seule voie aux Nations unies et dans les différentes instances internationales.
Les différents aspects de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), ses avancées et ses limites sont présentés. Le lecteur se rend compte des nombreux progrès déjà réalisés dans ce continent dont l’image est toujours réduite à la pauvreté, la dépendance et le manque de ressources. Cette perception n’a pas lieu d’être et les spécialistes qui développent les différents aspects de la CEDEAO comme l’union monétaire, l’union douanière ou encore l’union économique analysent également la volonté des États de mettre en place des actions conjointes.
L’absence d’analyse pointue et approfondie sur le cas de la Guinée, présenté a priori comme l’objet d’étude de l’ouvrage, est décevante. La Guinée est abordée sous ses aspects géographiques et à partir de ses ressources naturelles. Il est dommage que les auteurs ne développent pas la contribution du pays à la mise en place de la CEDEAO, ses engagements, et aussi la pratique quotidienne de cet accord au niveau étatique. On n’apprend pas en quoi les structures économiques guinéennes ont changé pour atteindre les objectifs régionaux, en quoi elle est un élément essentiel pour la réussite d’un tel accord alors que paradoxalement l’introduction nous fait penser que c’est justement ce pays qui par ses ressources et son affirmation historique contre l’Union française peut être le porteur d’un tel projet d’intégration régionale.
Le rôle prépondérant de la Guinée est mis en avant dans les deux premiers chapitres, mais n’est hélas pas approfondi par la suite, dans les chapitres concernant la mise en place concrète de la CEDEAO. La Guinée a un statut particulier en Afrique depuis le jour où elle refusa d’entrer dans l’Union africaine de de Gaulle, mais ce passé ne la sert pas aujourd’hui dans son engagement pour une intégration régionale. Cela n’est pas sans lien avec les difficultés rencontrées par la CEDEAO. La CEDEAO comprend, notamment, dans ses objectifs une politique agricole commune visant à l’intégration régionale des marchés. Cette intégration aurait pour effet positif de permettre à l’Afrique de l’Ouest de davantage peser dans l’agriculture internationale, en particulier au sein de l’OMC. Mais les politiques mises en place au niveau régional nécessitent une application nationale qui fait défaut. Les États n’ont pas les moyens de leurs ambitions, dans des pays où la malnutrition n’est pas éradiquée.
À la lecture de ce livre, on reste sur notre faim finalement. Il a néanmoins le mérite d’inciter à entreprendre une réflexion sur les facteurs empêchant l’émergence de l’Afrique de l’Ouest comme acteur international fort, capable de défendre ses intérêts sur la scène mondiale. Il nous permet de comprendre les manques et les dysfonctionnements des mécanismes d’intégration régionale qui sont mis en place collectivement. L’instabilité politique des pays membres de la CEDEAO et les relations difficiles entre anciennes colonies et anciennes puissances impériales mettent en suspens la réalisation de ces projets bien intentionnés.