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Le Maghreb dans les relations internationales
Khadidja Mohsen-Finan (dir.) Paris, CNRS éditions, 2011, 336 p.
La période a été féconde en ouvrages sur le monde arabe, mais nous pouvons souvent déplorer la hâte ou la mauvaise actualisation de certains. L’IFRI devait apporter une analyse plus profonde, et nous saluons l’initiative. Toutefois, comme bien des ouvrages collectifs, son plan apparaît trop dépendant des centres d’intérêt des contributeurs et aurait gagné à une réflexion éditoriale appropriée. Ainsi, l’ouvrage souffre d’un déséquilibre entre l’approche des phénomènes les plus proches de la problématique – comme l’intégration ou la relation avec l’Europe (50 pages) et l’étude de l’immigration (120 pages) – ou encore entre le rôle des États extérieurs à la région : rien sur la relation France-Maghreb ! Certains chapitres restent au niveau descriptif, et la question sociale, pierre angulaire de la révolution arabe, n’est pas abordée. Les longs développements sur l’immigration peuvent se justifier par l’importance et la spécificité de ce dossier pour les relations du Maghreb avec ses puissants voisins du Nord. Si l’analyse dérive parfois vers le militantisme et manque une approche globale de la question, elle demeure intéressante par les réflexions sur le rapport controversé entre migration et développement, le rôle mitigé des transferts sur la pauvreté, et sur les liens transnationaux complexes et passionnants que ces mouvements créent entre les États.
La troisième partie analyse les rapports de la sous-région avec différents États importants et avec les autres régions du monde. Il ressort de ces chapitres que les pays du Maghreb sont parvenus à maintenir un équilibre entre les différentes influences des grandes puissances, et notamment que les États émergents comme la Chine et l’Inde sont encore des partenaires de second ordre, même si la percée de la Chine en Algérie peut apparaître spectaculaire. Les États du Maghreb, à leur tour, tentent de développer leur influence sur d’autres espaces : en position favorable pour investir en Afrique subsaharienne, ils deviennent des partenaires commerciaux importants et des pôles d’attraction pour les étudiants et les migrants africains. Toutefois, ils sont encore gênés par ce raccordement des deux morceaux de l’Afrique, par cette inquiétante bande sahélo-saharienne qui voit se développer trafics, insurrections et terrorisme. Pour autant, l’intéressante contribution d’Alain Antil souligne l’incapacité de ces États à dépasser leurs différends et leurs méfiances réciproques. Au fond, le Maghreb demeure désespérément divisé, cloisonné, enfermé dans des logiques vieilles de cinquante ans entretenues soit par le national populisme, soit par l’incapacité à régler le conflit sahraoui. À ce titre, les politiques étrangères des différents pays auraient pu être davantage analysées.
Le livre aurait nécessité un approfondissement des logiques spatiales, notamment par la contribution d’un géographe. Le lecteur aurait apprécié quelques développements sur le coût d’une non-intégration régionale, et sur les solutions actuellement préconisées. Il demeure que l’ouvrage actualise utilement les données des problématiques régionales et est bienvenu dans le contexte présent.