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Le Japon, de la conquête à l’effacement du monde ?
Nathalie Cavasin Paris, Ellipses, 2009, 231 p.
La trajectoire du Japon est pour le moins singulière. Alternant périodes d’ouverture sur le monde et de repli sur soi, ce pays a su à la fois s’inspirer d’apports de l’extérieur, et construire ses propres caractéristiques. On remarque ainsi que la culture de l’archipel est en grande partie issue du continent, mais a su se transformer sous l’impulsion de la population japonaise. On remarque aussi que les modernisations de l’ère Meiji, si elles sont directement calquées sur les exemples des puissances occidentales (en particulier le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France), ont su s’adapter aux réalités nationales, en intégrant notamment les anciens samouraïs défenseurs de la souveraineté nationale en des capitaines d’industrie performants. On remarque enfin que le système politique de ce pays, fortement influencé par la défaite en 1945 et l’occupation américaine, n’en demeure pas moins unique. Le Japon est ainsi à la fois capable de s’inspirer de l’extérieur et de développer son propre modèle.
En s’appuyant sur une multitude de cartes et de tableaux, mais aussi de fiches synthétiques (propres à cette collection), Nathalie Cavasin s’efforce de répondre à la question de savoir si le Japon est encore aujourd’hui capable d’innover et d’imposer un modèle, ou si les difficultés chroniques auxquelles il fait face depuis deux décennies vont progressivement l’effacer du monde. Avec une économie en berne, une démographie en chute libre, une compétition de plus en plus difficile avec la Chine et une capacité d’innovation qui semble moins performante, les prévisions sont inquiétantes, et font même dire à certains observateurs que le déclin n’est pas qu’une crainte, mais une réalité déjà consommée. Mais dans le même temps, les aptitudes du Japon à se relever, à se faire une place dans un environnement hostile et dans des circonstances qui semblent insurmontables plaident en faveur du maintien de cet archipel à un niveau élevé. Le Japon, débarrassé de ses ambitions impériales qui l’ont conduit à la déroute, a su prouver au cours des soixante dernières années que son modèle se situe ailleurs. Dès lors, et malgré l’ampleur des défis, tous les espoirs sont permis. D’autant que si le déclin est sur toutes les lèvres au Japon, il revêt dans ce pays une signification différente. État-nation par excellence, à l’identité forte, le Japon ne disparaîtra pas, et son effacement, si effacement il y a, serait ainsi plus une période de mise en sommeil que de véritable déclin. Une période que l’archipel a déjà connue à plusieurs reprises, et qui ne l’a pas empêché de rebondir par la suite.
On pourrait parfois reprocher à cet ouvrage de ne pas aller suffisamment au bout de sa réflexion, notamment en ce qui concerne l’existence d’un modèle japonais, ou les ambitions politico-stratégiques d’un pays qui se cherche encore une place. On déplore également l’absence de réflexions sur l’option d’un plus grand partenariat régional, notamment sur les questions économiques et commerciales. Mais les multiples informations contenues dans l’étude de Nathalie Cavasin seront plus qu’utiles à ceux qui s’interrogent sur l’avenir de l’empire du Soleil levant.