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L’Allemagne. Vingt ans après
Boris Grésillon Paris, La Documentation française, 2009, 63 p.
Vingt ans après la chute du mur de Berlin (9 novembre 1989) et la réunification allemande (3 octobre 1990), Boris Grésillon, géographe, présente le visage actuel de l’Allemagne.
Les immenses espoirs et les attentes des populations des deux Allemagne de 1989 sont assez vite déçus face aux difficultés de la réunification.
Pendant une dizaine d’années, les Ossis (Allemands de l’Est) assistent à la conversion de leur économie aux impératifs du capitalisme marchand. Le secteur productif est-allemand est quasiment démantelé tandis que l’Allemagne de l’Ouest finance à très haute dose la relance. Le Pacte de solidarité (Solidarpakt), véritable plan Marshall qui court jusqu’en 2019, organise l’effort budgétaire dans le cadre de la péréquation fédérale (la constitution allemande prévoit un principe d’aide et de transferts financiers des régions allemandes riches vers les plus pauvres).
Pour les Wessis (Allemands de l’Ouest), le prix à payer de la réunification est élevé, d’autant plus que les Ossis ne paraissent guère reconnaissants,désemparés par l’ampleur des transformations.
Boris Grésillon met alors en balance la réussite économique de l’Allemagne réunifiée avec son coût social.
À l’automne 1998, le social-démocrate Gerhard Schröder, successeur de Helmut Kohl, lance une série de mesures très impopulaires mais qui permettent un redressement spectaculaire de l’économie. Hausse des cotisations et baisse des prestations de l’assurance-maladie, réduction de la période d’indemnisation de l’assurance-chômage, diminution des montants des aides sociales, élévation de l’âge légal de départ à la retraite jusqu’à 67 ans (par le gouvernement d’Angela Merkel)… Le prix à payer pour ces réformes est important : officiellement, trois millions de personnes vivent désormais en-dessous du seuil de pauvreté. L’État providence n’existe plus et les inégalités s’accroissent toujours davantage.
Le bilan de la réunification a tout de même son versant positif, qu’il faut peut-être attribuer à une stabilité politique hors du commun : en vingt ans, l’Allemagne n’a connu que trois chanceliers et aucun remaniement ministériel majeur.
Pays le plus peuplé d’Europe avec 82 millions d’habitants, l’Allemagne est aujourd’hui la quatrième puissance économique mondiale. Forte des excellents résultats de ses entreprises à l’export, sa balance commerciale est largement excédentaire : l’Allemagne est première exportatrice mondiale. Même certaines villes de l’Est comme Leipzig, Dresde ou Potsdam ont réhabilité leur centre-ville et attiré les investisseurs.
Si de nombreux problèmes demeurent (inégalités Est-Ouest, faible taux de natalité, chômage), après vingt ans de réunification, la nouvelle Allemagne s’affirme comme une puissance commerciale, scientifique, innovante et écologique. Confrontée au problème de natalité, l’Allemagne cultive une tradition d’accueil et d’intégration des migrants tout en veillant à contrôler les flux. Les étrangers représentent 9 % de la population qui vit Outre-Rhin (dont un tiers est d’origine turque).
Face à la crise économique, l’Allemagne souffre, notamment en raison de la faiblesse de son secteur bancaire et du fort endettement des ménages allemands. La baisse continue des exportations depuis 2008 a entraîné une panne de croissance et dans son sillage une diminution de la production industrielle. Mais, l’État allemand a investi massivement pour secourir son économie. L’avenir dira si sa politique économique est la bonne.
L’absence de parti-pris de Boris Grésillon sur le futur de l’Allemagne face à la crise laisse le lecteur dans l’expectative. Mais la qualité remarquable de la documentation présentée dans ce dossier permet à chacun de se forger une idée, brisant au passage quelques clichés, sur un pays finalement assez méconnu.