L’Afrique humiliée
Aminata Traoré Paris, Fayard, 2008
L’on connaît les cris de colère d’Aminata Traoré, ancienne ministre de la Culture au Mali, femme militante et altermondialiste qui actualise le Kia, expression samo du Burkina Faso invitant au courage et au combat. Elle est une animatrice des Forums sociaux mondiaux. Les révoltes portent dans ce nouvel ouvrage sur le discours humiliant de Nicolas Sarkozy à l’université Cheikhy Anta Diop, sur la politique française d’immigration traduisant les peurs de la différence et de l’étranger, sur la privatisation de la CMDT, sur l’absence de mémoires face au rôle qu’ont joué les immigrés les soldats africains dans la croissance française ou dans la guerre. Au-delà de la révolte contre l’humiliation, Aminata Traoré réclame avec raison le droit à la dignité. Il reste évidemment à voir, au-delà des mots et des symboles quelles seraient les solutions alternatives sur le plan pratique et politique (critiques que faisait Erik Orsenna à l’auteur dans son ouvrage Voyage au pays du coton). Qui écoute et lit ce plaidoyer altermondialiste. Dans le film de Abderrahmane Sissako Bamako deux cours cohabitaient, celle de la justice où les acteurs du haut dont Aminata Traoré dénonçaient le FMI et la Banque mondiale dans un discours altermondialiste Nord/Sud qui avaient pour seuls interlocuteurs les militants, et celle de l’habitation où, au-delà de ces discours les Africains, acteurs du bas, vivaient les souffrances et les joies du quotidien. Les deux cours ne se rencontraient pas. On peut craindre que cet ouvrage ne s’adresse qu’au seul cercle Nord/Sud et qu’il n’enclenche que faiblement une action politique et une pratique sociale nouvelles.