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La nouvelle dictature d’Haïti. Coup d’État, séisme et occupation onusienne
Par Justin Podur (trad. Geneviève Boulanger) - Montréal, Écosociété, 2016 (2012), 244p.
Bien que la version originale de cet ouvrage ait été éditée à la fin de l’année 2012, soit moins de trois ans après le séisme du 12 janvier 2010, le constat de Justin Podur, dans la préface à cette édition de 2016, reste le même : Haïti vit depuis 2004 sous le joug d’une dictature d’un nouveau genre, constituée de trois puissances étrangères – les États-Unis, la France et le Canada – et soutenue par les Nations unies. Cette thèse se fonde sur une définition de la dictature qui renvoie à quatre dimensions principales : le recours à la violence, la centralisation du pouvoir, l’impunité et la concentration des richesses. Toutefois, la « nouvelle » dictature se caractérise, pour l’auteur, par le fait que « les Haïtiens ne sont pas maîtres actuellement de la gestion économique et politique de leur pays », que les droits de réunion ou de former une organisation politique sont extrêmement limités et que les violations des droits de la personne « y sont monnaie courante et demeurent impunies » (p. 17).
Justin Podur fait remonter l’origine de cette « nouvelle dictature » au coup d’État de 2004, à l’issue duquel le président Aristide a été déposé et exilé en République centrafricaine. Il rappelle à cette occasion les deux versions qui entourent le récit de ce départ. La première, « officielle », considère que Jean-Bertrand Aristide s’est mué en dictateur et a été poussé hors du pays sous la pression populaire. La seconde, énoncée dans l’ouvrage, fait état d’une déstabilisation et d’un renversement du président, puis d’une répression brutale de son mouvement populaire. Tout au long de ce minutieux travail de restitution des faits, l’auteur défend ainsi l’idée que le coup d’État n’a pas mis à bas la dictature mais, bien au contraire, qu’il a « ouvert la voie à la tyrannie » : celle des puissances étrangères et des Nations unies.
L’ouvrage déroule le raisonnement en quatre temps : des éléments de contextualisation historique et politique ; le récit du coup d’État de 2004 puis l’analyse du régime intérimaire de Gérard Latortue et de la Mission des Nations unies pour la stabilisation d’Haïti (Minustah) qui l’a suivi (2004-2006) ; la présidence de René Préval jusqu’au séisme de janvier 2010 ; et les deux années après le séisme. Justin Podur entend ainsi présenter sa lecture des événements en contestant la version officielle, tout en fondant ses écrits sur de nombreuses sources.
La nouvelle dictature d’Haïti a le mérite de recueillir efficacement et de manière convaincante les éléments qui appuient la thèse d’un coup d’État des puissances étrangères contre la volonté populaire en 2004, phénomène qui se perpétuerait après le séisme. La terminologie utilisée apparaît toutefois souvent poussive et menace de verser dans un certain simplisme qui peut, à terme, desservir l’objectif initial de l’ouvrage : en appeler à davantage de souveraineté pour le peuple haïtien. En effet, le caractère non démocratique du mode de gouvernement d’Haïti ne semble pouvoir se résumer au simple qualificatif de « dictature », qui donne l’impression d’un contrôle du pays par un groupe d’acteurs. La gouvernance d’Haïti n’apparaît-elle pas, au contraire, échapper aujourd’hui à tous, Haïtiens comme étrangers ?
Bien que ce qualificatif de « dictature » puisse paraître à certains égards abusif, le constat reste pertinent sur le fond et la démarche globale bienvenue. De fait, c’est la mauvaise gestion de l’aide, l’absence de mécanismes de reddition des comptes des autorités étrangères non élues en Haïti et de manière générale l’aspect fortement non démocratique d’un système de gouvernance basé sur des puissances étrangères qui font ici le cœur de l’ouvrage.
Justin Podur fait remonter l’origine de cette « nouvelle dictature » au coup d’État de 2004, à l’issue duquel le président Aristide a été déposé et exilé en République centrafricaine. Il rappelle à cette occasion les deux versions qui entourent le récit de ce départ. La première, « officielle », considère que Jean-Bertrand Aristide s’est mué en dictateur et a été poussé hors du pays sous la pression populaire. La seconde, énoncée dans l’ouvrage, fait état d’une déstabilisation et d’un renversement du président, puis d’une répression brutale de son mouvement populaire. Tout au long de ce minutieux travail de restitution des faits, l’auteur défend ainsi l’idée que le coup d’État n’a pas mis à bas la dictature mais, bien au contraire, qu’il a « ouvert la voie à la tyrannie » : celle des puissances étrangères et des Nations unies.
L’ouvrage déroule le raisonnement en quatre temps : des éléments de contextualisation historique et politique ; le récit du coup d’État de 2004 puis l’analyse du régime intérimaire de Gérard Latortue et de la Mission des Nations unies pour la stabilisation d’Haïti (Minustah) qui l’a suivi (2004-2006) ; la présidence de René Préval jusqu’au séisme de janvier 2010 ; et les deux années après le séisme. Justin Podur entend ainsi présenter sa lecture des événements en contestant la version officielle, tout en fondant ses écrits sur de nombreuses sources.
La nouvelle dictature d’Haïti a le mérite de recueillir efficacement et de manière convaincante les éléments qui appuient la thèse d’un coup d’État des puissances étrangères contre la volonté populaire en 2004, phénomène qui se perpétuerait après le séisme. La terminologie utilisée apparaît toutefois souvent poussive et menace de verser dans un certain simplisme qui peut, à terme, desservir l’objectif initial de l’ouvrage : en appeler à davantage de souveraineté pour le peuple haïtien. En effet, le caractère non démocratique du mode de gouvernement d’Haïti ne semble pouvoir se résumer au simple qualificatif de « dictature », qui donne l’impression d’un contrôle du pays par un groupe d’acteurs. La gouvernance d’Haïti n’apparaît-elle pas, au contraire, échapper aujourd’hui à tous, Haïtiens comme étrangers ?
Bien que ce qualificatif de « dictature » puisse paraître à certains égards abusif, le constat reste pertinent sur le fond et la démarche globale bienvenue. De fait, c’est la mauvaise gestion de l’aide, l’absence de mécanismes de reddition des comptes des autorités étrangères non élues en Haïti et de manière générale l’aspect fortement non démocratique d’un système de gouvernance basé sur des puissances étrangères qui font ici le cœur de l’ouvrage.