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La chute de l’empire soviétique. Leçons pour la Russie d’aujourd’hui
Egor Gaïdar Paris, Éditions dOrganisation (Eyrolles), 2010
Egor Timourovitch Gaïdar, ancien Premier ministre de Russie dans les années 1990, décédé en 2009, propose une réflexion comparative sur l’éclatement de l’URSS et la désintégration des empires à travers l’histoire. Acteur direct d’événements devenus aujourd’hui historiques, son témoignage est inestimable. Mais son engagement et ses responsabilités dans la crise russe des années 1980-1990 rendent inévitable un certain manque d’objectivité.
Egor Gaïdar, qui fut l’un des principaux artisans du virage économique vers le capitalisme, avance de nombreuses raisons à l’éclatement de l’URSS. Ses démonstrations s’appuient sur une grande quantité de statistiques économiques dont on aurait cependant aimé connaître un peu mieux les sources.
À la fin des années 1970, l’URSS rencontre de très grosses difficultés économiques. Théoriquement fermé dans ses relations au monde, le pays est en réalité profondément intégré dans le système du commerce international et très dépendant de la conjoncture des marchés mondiaux.
Les institutions de l’URSS sont rigides, l’industrie non compétitive, les dépenses militaires excessives et l’agriculture en crise. Dans ces conditions, la chute considérable du prix du pétrole en 1985-1986 déstabilise l’URSS, qui reste sans réaction pour équilibrer son budget. Considérée jusqu’ici comme un « emprunteur fiable », l’URSS commence à susciter la méfiance des créanciers à partir de 1988.
En 1990, le déficit de l’URSS s’élève à plus de 17 milliards de dollars. La crise céréalière et les problèmes d’approvisionnement s’ajoutent aux difficultés économiques du pays. Les files d’attentes s’allongent devant les commerces aux rayons clairsemés.
Dans un contexte de libéralisation du pouvoir (entamée dès 1985 par Gorbatchev sous le nom de Glasnost), les élections démocratiques de 1990 dans les parlements des républiques de l’URSS sont marquées par le nationalisme, « trop efficace politiquement pour qu’on l’ignore lorsqu’on cherche à tout prix la faveur des électeurs ». Conflits ethniques et velléités d’indépendance renaissent. Les dirigeants soviétiques qui ont besoin de l’Occident pour combler les déficits savent qu’ils ne peuvent utiliser la force et les chars face aux sécessionnistes.
Les partis de l’indépendance dans les pays baltes remportent un vif succès aux élections des Soviets suprêmes de février 1990. Lituanie, Estonie et Lettonie proclament leur souveraineté, première étape vers le statut d’États indépendants, suivis par la Moldavie, l’Ukraine, la Biélorussie et la Russie.
Dès le printemps 1991, Gorbatchev sait qu’il ne pourra sauver l’intégrité de l’URSS. Quelques hauts dirigeants soviétiques tentent alors un coup d’État pour reprendre les commandes du pouvoir central. Mais, en ce mois d’août 1991, l’armée refuse de tirer sur le peuple. Le putsch avorte, ajoutant encore un peu plus au chaos socio-économique et politique.
Le 8 décembre 1991, les Républiques de Russie, de Biélorussie et d'Ukraine signent à Minsk le traité qui donne naissance à la Communauté des États Indépendants (CEI) et met fin à l’URSS. Le 25 décembre 1991, Mikhaïl Gorbatchev, devenu de fait dirigeant d’un État qui n’existe plus, démissionne de son poste de président de l’URSS.
Dressant un tableau assez noir des dernières heures de l’URSS, Egor Gaïdar se réjouit tout de même d’avoir permis une transition sans violence grâce à une thérapie économique de choc lorsqu’il était ministre des finances, Premier ministre ou ministre de l’Économie entre novembre 1991 et janvier 1994.
Vingt ans après la désintégration de l’URSS en 1991, du conflit tchétchène non réglé à la flambée de violence opposant Kirghizes et Ouzbeks en juin 2010, les conséquences de cette période ne sont pas encore toutes connues, ni maîtrisées.