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Histoire du sport et géopolitique.
Thierry Terret Lharmattan, Paris, 2011, 315 p.
Ce recueil d’articles dirigé par T. Terret, professeur en sciences et techniques des activités physiques et sportives, propose de cheminer à travers l’histoire et la géopolitique du sport. L’objectif de l’ouvrage est d’aborder par des exemples précis un certain nombre de problématiques qui renvoient alternativement le sport de sa dimension régionale à sa dimension internationale.
Dans la première partie, plusieurs articles s’intéressent à la manière dont les terrains de sport peuvent aussi être des terrains de lutte, pour des valeurs ou une idéologie. L’exemple le plus frappant est ici l’opposition entre deux modèles institutionnels : la Fédération internationale de football association (FIFA) et le Comité international olympique (CIO), observés entre 1924 et 1938. Au modèle culturel des puissances occidentales dominantes véhiculé par l’olympisme réplique alors celui du football, alternative mondialiste qui souhaite s’émanciper de la vision étatique du monde chère aux épigones de Coubertin. Pourtant, aujourd’hui, concluent P. Charroin et J. Saint-Martin, le football n’est pas étanche aux interventions des États.
Changeant complètement d’échelle, un autre article discute des enjeux liés à l’accessibilité des sites de sport de plein air. Le cas français est intéressant compte tenu de l’interventionnisme de l’État dans le champ sportif et de l’importante fréquentation touristique du territoire. L’analyse porte sur le degré de liberté du sportif en fonction d’enjeux contradictoires liés à la sécurité des personnes ou à la préservation de l’environnement. Dans un contexte où le développement économique prime, les positions entre les différents acteurs des sports de plein air sont divergentes. L’auteur propose de chercher un terrain d’entente au sein des collectivités territoriales, plus proches du terrain, que les services de l’État.
La deuxième partie s’intéresse à la défense identitaire d’une cause au moyen du sport. Les articles sur l’équipe de football d’Algérie entre 1958 et 1962 ou sur les échanges sportifs des Antilles françaises dévoilent une utilisation consciente du sport à des fins identitaires. Chaque combat trouve ses images sportives pour l’illustrer et le médiatiser.
Enfin, la troisième partie de l’ouvrage s’articule autour de l’organisation, du déroulement et de la perception d’événements sportifs internationaux au regard des relations diplomatiques entre États. G. Galstyan analyse d’abord comment le football a été instrumentalisé dans les relations entre Arménie et Turquie, faisant la lumière sur le lien clairement établi entre sport et politique. G. Bernasconi s’intéresse ensuite aux jeux régionaux (Jeux féminins, Jeux gay, Jeux de la francophonie) et à leur développement en parallèle des JO. Loin de desservir ces derniers, les différents jeux régionaux, que l’on pourrait penser concurrentiels, offrent des dynamiques sur lesquelles le mouvement olympique peut s’appuyer. À l’intérieur du mouvement sportif, les relations de pouvoir sont donc également multiples.
Pour conclure cet ouvrage, un article propose d’observer les JO de Londres de 1948 au travers du prisme du nouvel échiquier politique et sportif international d’après-guerre. Ces premiers jeux de la Guerre froide relancent la question de la politisation du sport et de son utilisation comme moyen de propagande, 12 ans après les Jeux de Berlin.
Expliquer l’histoire à partir de la géopolitique est peut être trop ambitieux : en voulant englober enjeux culturels, identitaires et diplomatiques du sport, ce recueil peut parfois perdre le lecteur. Par ailleurs, lorsque T. Terret s’étonne que le géographe Colin Flint ne dise pas un mot du sport dans son Introduction to Geopolitics, peut-être aurait-il fallu s’intéresser en préambule de cet ouvrage à la mesure de l’influence du sport sur la géopolitique.