Guerre juste, guerre injuste. Histoire, théories et critiques
Christian Nadeau et Julie Saada Paris, PUF, 2009, 153 p.
Les ouvrages sur les théories de la guerre juste sont nombreux. L’originalité de l’œuvre présentée ici tient à la façon dont elle est écrite. Elle autorise, en effet, une lecture simple qui permet aux néophytes de pouvoir aborder très rapidement les principaux aspects de la guerre juste.
Dans cet ouvrage, Christian Nadeau, professeur de philosophie politique à l’Université de Montréal, et Julie Saada, spécialiste de philosophie politique et de philosophie du droit et enseignante aux Universités de Paris IV et Paris IX, entendent présenter les principales doctrines et théories de la guerre juste, en exposant leurs arguments et en les critiquant.
Le parti pris des auteurs est de regrouper les approches de différentes théories (réaliste et pacifiste essentiellement) en fonction de la situation conflictuelle qui prévaut (l’avant-guerre, la guerre proprement dite et l’après-guerre). Une distinction est également faite selon que les auteurs évoquent l’État agresseur et/ou agressé. Le livre compte donc trois parties qui correspondent aux trois phases du conflit et aux trois grands axes ou (catégories) de la théorie de la guerre juste : le droit de la guerre (jus ad bellum), le droit dans la guerre (jus in bello) et le droit d’après-guerre (jus post-bellum).
Dès l’introduction, les auteurs reviennent sur les différentes manières d’aborder les notions de guerre, de guerre juste, de conflits et de paix. Ils se montrent très critiques à l’encontre des doctrines de la guerre juste quelle que soit l’école de pensée traitée.
Selon eux, les principaux concepts classiques de la guerre juste tels que par exemple la juste cause (pouvant être invoquée par chacun des belligérants), l’ultime recours (dont on ne peut savoir s’il est vraiment ultime) ou encore la proportionnalité (que l’on ne peut pas tout le temps mesurer) sont à revoir car difficilement applicables et souvent inappropriés : ils témoignent de la difficulté à conceptualiser et définir des critères objectifs et applicables à tous les types de guerre.
Par la suite, les auteurs présentent la réalité des relations internationales et l’état du droit international. Ils soulignent les incohérences et les manquements de la Charte des Nations unies et du système de sécurité collective mis en place depuis 1945 par l’ONU et dont l’histoire nous révèle qu’ils n’ont pu préserver l’avènement de guerres. Selon eux, la Charte comprend de multiples paradoxes et offre plusieurs lectures qui peuvent être contradictoires.
Tout au long de l’ouvrage, les principaux critères de la guerre juste sont présentés et leurs arguments souvent contestés. Un rappel à l’histoire est constamment fait et on ne peut que regretter le manque de références aux guerres passées (à l’exception de la Seconde Guerre mondiale et de la seconde guerre du Golfe qui sont souvent citées).
L’une des idées originales de ce livre reste donc la tentative d’articulation entre les trois catégories de la guerre juste. Car, si pour de nombreux auteurs, les imbrications entre le jus in bello et le jus ad bellum ne font plus guère de doute, très peu de théoriciens de la guerre font encore référence au jus post-bellum et à ses interpénétrations avec les deux autres catégories précédemment citées. Or il s’agit d’une composante de la justice de la guerre à part entière.
Les auteurs, qui n’ont pas omis de mentionner les grandes évolutions qu’ont connues les doctrines de la guerre juste, ont donc réussi le pari de résumer au sein d’un ouvrage court, et de manière concise, la pensée de nombreux auteurs.
Cet ouvrage, qui repose sur une bibliographie conséquente, sera donc très utile à ceux qui souhaitent une introduction aux concepts de la guerre juste.