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Géopolitique des médias. Acteurs, rivalités et conflits
par Philippe Boulanger - Paris, Arnaud Colin, collection U, 2014, 310p.
Professeur des universités à Paris 8 (Institut français de géopolitique et Centre de recherche et d’analyse en géopolitique), Philippe Boulanger entreprend une topologie complète des médias et des enjeux géopolitiques qui y sont associés. S’intéressant aussi bien à la géographie des infrastructures physiques d’un réseau de communication comme Internet qu’à l’audience et à la capacité d’influence de grandes chaînes d’information internationales comme CNN ou Al-Jazira, l’auteur s’attache à démontrer que les moyens de communication doivent désormais faire l’objet d’une réflexion stratégique. Qu’ils soient perçus comme des outils d’émancipation par les peuples ou utilisés comme instruments de propagande par les États, les médias – de masse puis numériques – ont fait entrer le monde dans une « ère de l’information » (p. 26) où la puissance politique, économique et culturelle d’un pays s’exprime par sa maîtrise des moyens de communication. Pour un État, sous-estimer cette réalité revient à s’exposer à de multiples risques, comme le montrent les problématiques liées au cyberespace mais aussi la place croissante et désormais prépondérante de la communication dans les opérations militaires.
Après avoir exposé les principaux concepts nécessaires à la compréhension du sujet, P. Boulanger dresse ensuite une cartographie mondiale des infrastructures de production et de diffusion de contenus. Si la domination médiatique américaine semble flagrante, il apparaît surtout qu’elle a été théorisée et appliquée depuis la Seconde Guerre mondiale sous le nom de « global information dominance ». Destinée à répandre l’universalisme américain partout sur la planète, elle est aujourd’hui contestée par l’émergence de nouvelles puissances, qui développent à leur tour une diplomatie d’influence. En effet, pour promouvoir leur vision du monde et assurer la légitimité de leur action, de plus en plus d’États se servent des réseaux de communication comme outils de soft power. La multiplication des pôles médiatiques (Japon, Chine, Inde, Brésil, Égypte, Qatar) qui en résulte va à l’encontre du monde homogène prophétisé par Marshall McLuhan dans les années 1960. Non seulement « le village planétaire est bien un mythe » (p. 159) mais les nouveaux moyens de communication, notamment Internet et les réseaux sociaux, favorisent au contraire la diversité culturelle, en dynamisant par exemple les pratiques linguistiques.
La multiplicité des stratégies d’influence obligent alors les États à mener une véritable « guerre du sens » (p. 250) pour conquérir l’opinion publique mondiale, en particulier lorsqu’ils mènent des opérations militaires. Face à des sociétés civiles de plus en plus réactives, la victoire militaire doit se doubler d’une victoire médiatique pour se transformer en succès politique. À travers de nombreux exemples historiques, de l’Afghanistan aux récentes offensives israéliennes en passant par l’Irak, P. Boulanger affirme une vérité essentielle : dans les guerres modernes, l’enjeu n’est plus le réel, mais la perception du réel par les populations concernées. Le recours à la guerre psychologique, outil hybride entre l’action militaire et les relations publiques, paraît dès lors inévitable.
En abordant, en dernier lieu, le cyberespace et en analysant les perspectives stratégiques offertes par les nouvelles formes de violence que sont les cyberattaques, l’auteur conclut un ouvrage abordant un panel de thèmes très impressionnant, dont l’enchaînement laisse parfois le lecteur sur sa faim. Les multiples ouvrages cités par P. Boulanger ouvrent cependant des pistes au lecteur désirant approfondir un sujet, faisant de cette opuscule un véritable manuel pour qui souhaite étudier et comprendre les enjeux liés aux médias dans le monde actuel et de demain.
Après avoir exposé les principaux concepts nécessaires à la compréhension du sujet, P. Boulanger dresse ensuite une cartographie mondiale des infrastructures de production et de diffusion de contenus. Si la domination médiatique américaine semble flagrante, il apparaît surtout qu’elle a été théorisée et appliquée depuis la Seconde Guerre mondiale sous le nom de « global information dominance ». Destinée à répandre l’universalisme américain partout sur la planète, elle est aujourd’hui contestée par l’émergence de nouvelles puissances, qui développent à leur tour une diplomatie d’influence. En effet, pour promouvoir leur vision du monde et assurer la légitimité de leur action, de plus en plus d’États se servent des réseaux de communication comme outils de soft power. La multiplication des pôles médiatiques (Japon, Chine, Inde, Brésil, Égypte, Qatar) qui en résulte va à l’encontre du monde homogène prophétisé par Marshall McLuhan dans les années 1960. Non seulement « le village planétaire est bien un mythe » (p. 159) mais les nouveaux moyens de communication, notamment Internet et les réseaux sociaux, favorisent au contraire la diversité culturelle, en dynamisant par exemple les pratiques linguistiques.
La multiplicité des stratégies d’influence obligent alors les États à mener une véritable « guerre du sens » (p. 250) pour conquérir l’opinion publique mondiale, en particulier lorsqu’ils mènent des opérations militaires. Face à des sociétés civiles de plus en plus réactives, la victoire militaire doit se doubler d’une victoire médiatique pour se transformer en succès politique. À travers de nombreux exemples historiques, de l’Afghanistan aux récentes offensives israéliennes en passant par l’Irak, P. Boulanger affirme une vérité essentielle : dans les guerres modernes, l’enjeu n’est plus le réel, mais la perception du réel par les populations concernées. Le recours à la guerre psychologique, outil hybride entre l’action militaire et les relations publiques, paraît dès lors inévitable.
En abordant, en dernier lieu, le cyberespace et en analysant les perspectives stratégiques offertes par les nouvelles formes de violence que sont les cyberattaques, l’auteur conclut un ouvrage abordant un panel de thèmes très impressionnant, dont l’enchaînement laisse parfois le lecteur sur sa faim. Les multiples ouvrages cités par P. Boulanger ouvrent cependant des pistes au lecteur désirant approfondir un sujet, faisant de cette opuscule un véritable manuel pour qui souhaite étudier et comprendre les enjeux liés aux médias dans le monde actuel et de demain.