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Aujourd’hui, ou peut-être jamais. Pour une paix américaine au Proche-Orient
Élie Barnavi Bruxelles, André Versaille éditeur, 2009
Après s’être intéressé à l’Union européenne dans L’Europe frigide[1], l’historien Élie Barnavi revient sur le conflit israélo-palestinien. Ce n’est toutefois pas un livre d’Histoire à proprement parler qu’il présente mais un « appel pressant et un cri d’alarme » à Barack Obama, dont l’élection à la présidence des États-Unis a soulevé un « fol espoir » dans la paix au Proche-Orient. En tant qu’ancien ambassadeur d’Israël en France, Élie Barnavi est un expert de ces territoires. Intellectuel engagé mais sans attache partisane ni mandat d’aucune sorte, l’auteur entend présenter une vision qui ne sera pas teintée des revendications défendues par les conseillers américains du président ou par les représentants des pays concernés.
Un rappel historique démontre à quel point les conflits au Proche-Orient sont imbriqués et qu’il n’existe pas de solution simple. Ainsi, comment résoudre le conflit entre des Israéliens qui ont vu dans leur implantation un « retour » et des Palestiniens qui l’ont vécue comme une conquête coloniale ? Comment définir la frontière entre Israël et la Syrie sur le plateau du Golan alors que des colons y demeurent et qu’Israël demande le respect de la frontière définie en 1923 tandis que la Syrie souhaite revenir au tracé antérieur à la guerre des Six jours, l’enjeu étant la maîtrise de la source du Jourdain ? Comment négocier avec l’Iran qui fut l’allié d’Israël, n’a pas de conflit territorial avec ce pays, et prône aujourd’hui sa disparition pour des motifs idéologiques, dans un contexte où la recherche d’une arme nucléaire fait peser une menace sur la stabilité de l’ensemble de la zone ?
Afin de rechercher une solution, Élie Barnavi analyse les tentatives de règlement du conflit israélo-palestinien, telles que les accords d’Oslo, qui ont selon lui échoué car ils manquaient de clarté et surtout de contrôle international, ou les « paramètres » proposés par le président Bill Clinton, qui constituent toujours une référence pour la négociation entre Palestiniens et Israéliens. S’il revendique son identité israélienne, Élie Barnavi n’en essaie pas moins d’identifier les freins tant palestiniens qu’israéliens à la résolution du conflit. Notamment, il n’hésite pas à critiquer l’organisation politique israélienne qui empêche de voir émerger une majorité de gouvernement à même de négocier. L’historien dénonce le caractère intenable de la situation actuelle car « enfermer un million et demi de personnes dans une prison à ciel ouvert est à la fois moralement condamnable et politiquement discutable » (p. 113). Il s’oppose également clairement à la politique israélienne de colonisation et au « mythe absurde de la croissance naturelle » : alors qu’Israël bénéficiait au sortir de la Seconde Guerre mondiale d’un large soutien, l’occupation ternit l’image du pays et sape sa légitimité internationale. Au-delà d’une présentation « neutre », Élie Barnavi prend ainsi position et propose au président Obama ses propres solutions au conflit israélo-palestinien. L’ouvrage s’achève en effet par l’énonciation de principes d’action qui selon l’auteur permettront au président américain d’obtenir une paix au Proche-Orient. S’agissant des relations israélo-palestiniennes, Élie Barnavi se prononce ainsi par exemple pour la création d’un État palestinien souverain et pour la partition de Jérusalem entre les deux États. La création d’un État palestinien est même « un intérêt national suprême israélien », car la souveraineté israélienne sur l’ensemble du territoire bi-national aurait pour effet de rendre les juifs minoritaire dans leur propre pays, ce qui conduirait à une situation d’apartheid ou de guerre civile.
Seuls les États-Unis, estime l’auteur, sont à même d’imposer une paix au Proche-Orient. « Pris un à un, les États européens ne peuvent, ensemble ne veulent. Aussi l’Europe est-elle réduite au double et frustrant rôle de figurant et de tiroir-caisse » (p. 152). Et le président Obama, qui dès son élection s’est attelé à la recherche de la paix, avec son réalisme teinté d’idéalisme qui est la marque des hommes d’État d’envergure, est aux yeux d’Élie Barnavi l’homme providentiel qui pourra permettre au Proche-Orient de sortir d’un siècle de relations conflictuelles.