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1948, la première guerre israélo-arabe
par Walid Khalidi - Beyrouth / Paris, Sindbad / Actes Sud, 2013, 159 p.
L’historien palestinien Walid Khalidi dresse un tableau détaillé de la première guerre opposant cinq pays arabes (Égypte, Transjordanie, Irak, Syrie et Liban) au jeune État d’Israël, au lendemain de l’indépendance de ce dernier, le 14 mai 1948. L’auteur décrit les opérations militaires et le jeu diplomatique entre Israël, les États arabes et la communauté internationale avec une précision historique infaillible. Il alimente son ouvrage de sources primaires inédites, telles que les archives privées de Jamil Mardam Bey (ministre syrien de la Défense pendant la guerre), de nombreuses cartes exposant les opérations militaires, et d’extraits de mémoires et journaux des grands chefs de guerre arabes. Le journal de guerre de David Ben Gourion offre également un témoignage précieux : le Premier ministre israélien, chef militaire remarquable, y consignait ses stratégies, exprimant sa volonté de contrôler l’ensemble de la Palestine et de détruire les capitales arabes. Les détails se retrouvent aussi bien dans le récit des négociations – notamment les échanges secrets entre belligérants, peu souvent évoqués – que dans les descriptions purement stratégiques et techniques (nombre d’armes et combattants en présence, avancées des armées au jour près, etc.).
Au-delà de l’aspect technique de l’ouvrage, le but de l’auteur est de défaire les mythes construits autour de la première guerre israélo-arabe tant par les historiens israéliens que par les historiens arabes. Selon les premiers, Israël, faible État naissant, parvient à défaire des armées nombreuses, équipées d’armements sophistiqués et soutenues par la Grande-Bretagne. Or, W. Khalidi rappelle qu’avant la guerre, la société juive est très solide et bénéficie déjà de nombreux soutiens. En outre, les pays arabes sont divisés par de fortes rivalités, ce qui rend difficile une action conjointe. Ainsi, quelques jours avant le déclenchement de la guerre, les armées arabes ne sont toujours pas coordonnées et peinent à trouver un commandant en chef. D’autre part, si la Grande-Bretagne est alors alliée à l’Égypte, à la Transjordanie et à l’Irak, elle n’hésite pas à leur imposer un embargo sur les armes. De nombreux fonctionnaires britanniques soutiennent toujours la cause sioniste et le gouvernement ne souhaite pas froisser l’allié américain, grand soutien d’Israël. Sur le plan des forces armées, Israël apparaît largement supérieur aux cinq armées lui faisant face. En effet, les forces arabes sont constituées d’au maximum 18 000 hommes, contre 62 000 du côté de la Haganah, armée très organisée et possédant des armements non comparables à ceux des États arabes.
Selon la version arabe, les armées victorieuses firent reculer dès la première étape de la guerre les forces sionistes, « qui consistaient en bandes terroristes » (p. 13). Israël est alors sur le point d’être vaincue, mais les pressions internationales et le cessez-le-feu obligent les Arabes à reculer et empêchent leur victoire. Cela contribua au mythe d’Israël encerclée, menacée de toutes parts et toujours sur le point de disparaître – alimentant ainsi l’argument israélien de préserver à tout prix sa sécurité, y compris de façon préventive. W. Khalidi démontre que, dès le début de la guerre, les armées arabes se trouvent en difficulté, quand D. Ben Gourion ne se sent nullement en position de faiblesse, suivant son plan ambitieux et n’ayant que faire du droit international : « l’affaire sera tranchée par la force car la question politique d’Eretz Israël est maintenant une question militaire » (p. 76). L’État hébreu conserve l’avantage jusqu’à la fin de la guerre, y compris pendant les deux cessez-le-feu non respectés et lors des négociations d’armistice, durant lesquelles Israël lance deux offensives.
W. Khalidi livre ainsi une analyse pertinente de la guerre. Il est toutefois quelque peu regrettable qu’il se place uniquement du point de vue du commandement des opérations, ne faisant presque aucune allusion aux sociétés civiles palestinienne et israélienne, et à leur vécu de la guerre.
Au-delà de l’aspect technique de l’ouvrage, le but de l’auteur est de défaire les mythes construits autour de la première guerre israélo-arabe tant par les historiens israéliens que par les historiens arabes. Selon les premiers, Israël, faible État naissant, parvient à défaire des armées nombreuses, équipées d’armements sophistiqués et soutenues par la Grande-Bretagne. Or, W. Khalidi rappelle qu’avant la guerre, la société juive est très solide et bénéficie déjà de nombreux soutiens. En outre, les pays arabes sont divisés par de fortes rivalités, ce qui rend difficile une action conjointe. Ainsi, quelques jours avant le déclenchement de la guerre, les armées arabes ne sont toujours pas coordonnées et peinent à trouver un commandant en chef. D’autre part, si la Grande-Bretagne est alors alliée à l’Égypte, à la Transjordanie et à l’Irak, elle n’hésite pas à leur imposer un embargo sur les armes. De nombreux fonctionnaires britanniques soutiennent toujours la cause sioniste et le gouvernement ne souhaite pas froisser l’allié américain, grand soutien d’Israël. Sur le plan des forces armées, Israël apparaît largement supérieur aux cinq armées lui faisant face. En effet, les forces arabes sont constituées d’au maximum 18 000 hommes, contre 62 000 du côté de la Haganah, armée très organisée et possédant des armements non comparables à ceux des États arabes.
Selon la version arabe, les armées victorieuses firent reculer dès la première étape de la guerre les forces sionistes, « qui consistaient en bandes terroristes » (p. 13). Israël est alors sur le point d’être vaincue, mais les pressions internationales et le cessez-le-feu obligent les Arabes à reculer et empêchent leur victoire. Cela contribua au mythe d’Israël encerclée, menacée de toutes parts et toujours sur le point de disparaître – alimentant ainsi l’argument israélien de préserver à tout prix sa sécurité, y compris de façon préventive. W. Khalidi démontre que, dès le début de la guerre, les armées arabes se trouvent en difficulté, quand D. Ben Gourion ne se sent nullement en position de faiblesse, suivant son plan ambitieux et n’ayant que faire du droit international : « l’affaire sera tranchée par la force car la question politique d’Eretz Israël est maintenant une question militaire » (p. 76). L’État hébreu conserve l’avantage jusqu’à la fin de la guerre, y compris pendant les deux cessez-le-feu non respectés et lors des négociations d’armistice, durant lesquelles Israël lance deux offensives.
W. Khalidi livre ainsi une analyse pertinente de la guerre. Il est toutefois quelque peu regrettable qu’il se place uniquement du point de vue du commandement des opérations, ne faisant presque aucune allusion aux sociétés civiles palestinienne et israélienne, et à leur vécu de la guerre.