L'édito de Pascal Boniface

La marche en avant de Xi Jinping

Édito
10 janvier 2017
Le point de vue de Pascal Boniface
En 2016, on a beaucoup parlé de Vladimir Poutine, de Barack Obama et de Donald Trump. Mais l’homme de l’année, c’est peut-être Xi Jinping, monté en puissance ces derniers mois.

Le président chinois se trouve à la tête d’un pays qui a connu peu de mésaventures. La croissance économique est, certes, moins forte qu’auparavant. Cependant, elle continue de faire rêver la plupart des autres pays. Finalement, la crise promise à la Chine n’a pas eu lieu. Si les émergents et les BRICS (Brésil-Russie-Inde-Chine-Afrique du Sud) sont en souffrance, ce n’est pas le cas de la Chine qui poursuit son ascension, rattrapant son retard économique sur les États-Unis. Par la construction d’infrastructures et l’élaboration de grands projets pharaoniques, comme le canal au Nicaragua ou la ligne ferroviaire à liaison rapide entre Pékin et Moscou, la Chine met en place un réseau d’infrastructures et renforce sa présence et ses positionnements à des endroits stratégiques, où elle peut avoir accès aux matières premières.

La diplomatie de la Chine n’est pas spectaculaire. Son poids stratégique est inférieur à son poids économique. C’était l’inverse sous Mao Zedong. Elle intervient peu sur les dossiers, mais inscrit méthodiquement ses intérêts à long terme. La montée en puissance pacifique de la Chine n’est cependant pas vécue comme telle par nombre de ses voisins. Elle pourrait être source de discorde, tout comme le sont ses revendications en mer de Chine. En effet, l’ascension de l’Empire du Milieu effraie ses voisins et légitime leur volonté d’une présence américaine dans la région. Ainsi, le souhait chinois de voir disparaître cette dernière entre en contradiction avec une politique qui suscite chez ses voisins le besoin de la conserver.

Donald Trump, nouveau président des États-Unis, pourrait refuser de financer la protection du Japon et de la Corée du Sud. Mais, il ambitionne également d’établir une « barrière économique » avec la Chine. Sa mise en place ne sera toutefois pas aisée. La Chine est aujourd’hui le principal créancier des États-Unis. Or, on se dispute difficilement avec son banquier. Par ailleurs, la Chine a pris un virage écologique conséquent. Elle investit massivement dans les énergies renouvelables et s’apprête à créer plusieurs milliers d’emplois dans ce secteur. Alors qu’elle est aujourd’hui le principal pollueur de la planète, la Chine pourrait, dans ce domaine, prendre un avantage significatif et compétitif, source de croissance.

Depuis le début du siècle, la Chine n’a pris part à aucune intervention militaire extérieure, contrairement à la Russie et aux États-Unis. Elle protège ainsi son économie et sa popularité. Aujourd’hui, les États-Unis assument le coût élevé de leurs opérations militaires, aussi bien en termes financiers qu’en termes d’image ; ils sont désormais réticents à toute intervention militaire extérieure. De son côté, La Russie doit également faire face aux conséquences de son intervention stratégique en Ukraine et en Syrie. Ce n’est pas le cas de la Chine qui a préféré investir plutôt que de se lancer dans des aventures militaires coûteuses. Aujourd’hui, elle en tire les bénéfices.

Par ailleurs, Xi Jinping a renforcé son autorité, aussi bien par rapport aux militaires que dans l’appareil du Parti communiste. Malgré quelques protestations, il apparaît comme légitime aux yeux de sa population puisque le système marche. Il existe, certes, des intellectuels qui contestent et demandent plus de libertés, mais ceux-ci restent relativement isolés. Leur légitimité est d’ailleurs plus forte à l’étranger qu’en Chine même.

Si Xi Jinping ne figure pas parmi les personnalités qui ont fait le plus parler en 2016, il continue cependant d’orchestrer sa marche en avant ainsi que celle de son pays. Aujourd’hui, Il est certainement l’homme le plus puissant. Un homme qui a peu de barrières à l’international, aucune sur le plan national. Il est à la tête d’un pays plus puissant que celui de Vladimir Poutine et n’a pas l’opposition intérieure que suscite Donald Trump.
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