ANALYSES

Alep : victime du jeu des (im)puissances

Presse
29 septembre 2016
La 71e Assemblée générale des Nations unies s’est conclue sans aucune perspective de paix ou solution de règlement du conflit en Syrie. Si la question a naturellement été évoquée par de nombreux chefs d’Etats et de gouvernement, ces déclarations ont instillé un sentiment d’impuissance de la communauté internationale. Bien que Daech soit un ennemi stratégique commun aux deux coalitions diplomatico-militaires, les Occidentaux n’ont pas hésité à mettre en accusation les agissements des alliés russes et syriens (liés au régime). Les dernières vagues de bombardement ont été qualifiées de « crimes de guerre » par la France. La trêve conclue laborieusement par les Russes et les Américains est caduque depuis le 19 septembre. L’impasse diplomatique laisse le champ libre à la force militaire. Or les coalitions présentes commettent des « bavures » et provoquent des victimes « collatérales ».

Aujourd’hui, la ville d’Alep– la plus importante du pays, après Damas– est l’épicentre du conflit. Les aviations russes et syriennes mènent depuis une campagne de bombardements intenses sur les quartiers à l’Est d’Alep tenus par les insurgés. Les bombardements intenses de l’armée russe– soutien inconditionnel au régime d’al-Assad– et de l’armée syrienne loyaliste tentent de briser la rébellion située à l’Est d’Alep. Les bombardements– guidés par les Gardiens de la révolution iraniens et les soldats du Hezbollah libanais– qui ont visé des sites civils, en particulier des hôpitaux, ont été qualifiés de « crime de guerre » par le secrétaire général de l’ONU. Devant le Conseil de sécurité de l’ONU, Ban Ki-Moon n’a pas hésité à déclarer qu’en Syrie, « le carnage continue et personne n’est épargné » ; « c’est pire que dans un abattoir ». Des déclarations sans effet. Les victimes civiles sont toujours plus nombreuses. Des civils privés de refuge et de vivres, assiégés et affamés. Une tragédie humanitaire qui dure depuis de longs mois …

L’aviation russe est accusée d’avoir eu recours à des « bombes perforantes » ou « bunker buster », destinées à atteindre les infrastructures souterraines. Il s’agit là d’un nouveau signe de l’investissement toujours plus important des Russes en Syrie. Déjà présentes dans le port méditerranéen de Tartous, les forces russes ne cessent de se renforcer avec l’envoi de conseillers et de soldats (dont le nombre reste difficile à chiffrer), mais aussi d’hélicoptères militaires, de quelques chars, de pièces d’artillerie, de véhicules blindés de transport de troupes, etc. Un cap a été franchi avec le déploiement d’avions de combat dans la région de Lattaquié, fief de Bachar al-Assad. S’il convient de ne pas exagérer l’engagement militaire russe, il contraste malgré tout avec les atermoiements occidentaux en général, et américains en particulier, y compris pour soutenir plus fortement les groupes d’opposition rebelle.

Aujourd’hui, plus que jamais, la clef du conflit se trouve dans les mains de Moscou. Vladimir Poutine est guidé par un opportunisme et un cynisme certains qui l’amènent à lancer ce qui semble être une « guerre totale ». Conscient de l’équilibre des forces favorable, le drame syrien perdurera tant que les intérêts stratégiques russes ne seront pas satisfaits. En attendant, c’est peuple syrien d’Alep qui paye le prix lourd du jeu des puissances…
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