12.12.2024
« Les cinq continents auront les yeux rivés sur Rio »
Presse
5 août 2016
Oui, parce que près d’un milliard de personnes vont regarder la télé lors de la cérémonie d’ouverture. Et tout au long des deux semaines, le monde entier sur les cinq continents, aura les yeux rivés sur les Jeux. C’est une compétition qui a l’immense avantage, contrairement à la Coupe du Monde de football, de faire participer toutes les nations qui possèdent donc toutes une délégation, fussent-elles minimes. Le football est sans doute le sport universel mais les JO permettent de concerner tous les spectateurs par la multiplicité des spectacles. Ainsi, on peut être intéressé par une discipline même si on n’est pas représenté.
Le Brésil était-il un bon choix ?
On peut se poser la question étant donné la crise économique qui frappe aujourd’hui le pays. Crise qui a débouché sur une crise sociale, qui elle-même, a entraîné une crise politique. Mais en 2009, le contexte était tout autre : le Brésil était un pays sur la pente ascendante. D’ailleurs, la candidature de Rio portée par Lula avait devancé celle de la ville de Chicago, défendue par un certain Barack Obama au zénith de sa popularité.
Les Jeux sont-ils une bonne opportunité pour redorer le blason du Brésil, terni ces derniers temps ?
Oui, ces difficultés sont passagères. Le Brésil est un grand pays qui va rapidement repartir de l’avant. Grâce à cette exposition médiatique maximale, il va faire oublier les déboires qu’il a connus ces derniers temps.
Tout comme Athènes (2004), les travaux démesurés ne vont-ils pas contribuer à nuire à sa santé économique ?
À mon sens non, car il s’agit d’ouvrages qui vont demeurer. Les JO ont été l’occasion d’effectuer une grande rénovation urbaine à Rio. Ainsi, la ville a doublé le nombre de ses chambres d’hôtels et modernisé ses transports en commun. Elle s’est par ailleurs réappropriée le front de mer et a piétonnisé certaines zones. Des changements qui vont améliorer durablement la qualité de vie de la cité.
Quels sont les enjeux politiques sous-jacents à la compétition sportive ?
Pour le Brésil, il s’agit de démontrer sa capacité d’hôte sportif mais aussi du monde. Quant à la Russie de Vladimir Poutine, l’olympiade est synonyme de revers. Mais en obtenant le droit de participer de la part du CIO, la Russie a évité l’humiliation suprême, celle d’être le troisième pays exclu totalement des JO après l’Afrique du Sud de l’apartheid et l’Afghanistan en 2000 à la suite de la prise du pouvoir par les talibans qui interdisaient la pratique du sport aux femmes.
Pour la France, l’enjeu est tout autre. Il s’agira de faire du lobbying en faveur de la candidature de la ville de Paris en vue de l’organisation de l’édition 2024. C’est d’ailleurs le dessein du président François Hollande en se rendant sur place. Il est à noter aussi que la défense de ce dossier est assurée par le tandem composé d’Anne Hidalgo (ndlr : maire de Paris) et de Valérie Précresse (ndlr : présidente de la région Île de France) pourtant de bord politique opposé. Signe de l’importance que revêt cette candidature.
La sécurité sera également l’un des enjeux centraux de l’organisation…
En effet, mais cela n’est pas nouveau : c’était déjà le cas à Londres (2012) et ce sera encore le cas à Tokyo (2020). Depuis 2001, il n’y a pas d’événement sportif d’envergure qui ne soit pas placé sous le signe de la sécurité et du terrorisme. D’ailleurs depuis cette date, la sécurité est le principal poste budgétaire de ces organisations. Même si le Brésil entretient un rapport différent de l’Occident avec le Moyen-Orient, il n’en reste pas moins que le dispositif sera conséquent à la mesure de la menace. Les terroristes ont bien compris que tous les regards convergeaient vers Rio, et qu’un acte commis sur une telle scène aurait un retentissement d’autant plus important.
*Auteur de « JO Politiques », aux éditions Eyrolles, 2016
Recueilli par Benoît Rouzaud