12.12.2024
L’Euro 2016, un moment de répit pour François Hollande
Presse
10 juin 2016
Oui et non et de trois manières mais avec un bémol. La première, c’est que d’un point de vue médiatique on va parler d’autre chose que la déchéance de nationalité, de loi sur le travail et de grèves. La lumière des médias et l’intérêt du public seront centrés sur l’Euro et les matchs de l’Equipe de France. Ce qui n’est pas sans risques avec d’éventuels incidents avec des hooligans et d’éventuels attentats. On ne parlera plus de choses qui fâchent pendant un certain temps. Le deuxième bénéfice possible, c’est que cela accélère la fin des mouvements de grèves. Le gouvernement et le Président souhaitent réquisitionner un certain nombre d’éléments pour faire en sorte qu’il n’y ait pas de perturbations pour les supporters et les touristes. Pas plus tard que ce matin, la maire de Paris a décidé de faire ramasser les poubelles qui s’accumulaient dans certains quartiers suite à une grève des éboueurs. L’Euro peut être un prétexte pour reprendre la main sur les mouvements sociaux. Enfin, en cas de victoire des Bleus, il pourrait également en tirer un certain bénéfice. Cela pourrait accréditer sa thèse que « ça va mieux » au niveau de la croissance et du chômage. Mais bon, François Hollande n’a pas son destin en main en la matière.
Et le bémol ?
C’est que la situation peut aussi très bien se retourner contre lui. S’il y a beaucoup de perturbations dans les transports et des incidents mal maîtrisés, cela pourra justement être le symbole de cette déliquescence de l’autorité de l’Etat et de cette « chienlit » pour reprendre le terme de Nicolas Sarkozy ; vieux terme gaullien pour parler de mai 68. Donc, c’est à double tranchant. Si la France se fait éliminer au premier tour dans un groupe qui est pourtant facile, ce sera vu comme le symbole de François Hollande qui n’arrive à rien. En attendant, l’intérêt principal c’est de parler d’autre chose.
François Hollande a-t-il plus à perdre qu’à gagner ?
Je ne dirais pas ça… je dirais que le bénéfice qu’il peut en retirer ne sera pas nécessairement très important ni très durable. En 1998 (avec Chirac), ce n’était pas très durable. En revanche, les difficultés qui pourraient survenir durant cet Euro, seront un facteur aggravant pour son image qui est déjà fortement dégradée. Bref, un gain potentiel plutôt faible et des pertes potentielles plus importantes. Il n’y a pas grand-chose à gagner.
Et si tout se passe bien et la France l’emporte ?
Si le scénario idéal se confirme, on l’aura vite oublié à la rentrée. Après l’Euro les gens vont partir en vacances et à la rentrée de septembre il y aura d’autres enjeux. On parlera des primaires des Républicains, de ce qui se passe aux Etats-Unis, du Brexit, etc. Les préoccupations des Français seront les mêmes.
En dehors de l’Euro, François Hollande pourra encore faire la différence avec la présidentielle de 2017 ?
Le dernier sondage pointait Hollande à 11 % de popularité. C’est extrêmement peu… Mélenchon a parlé de « trou de souris » pour arriver au deuxième tour. Au-delà de l’opinion qu’on peut avoir sur la stratégie de communication du président de la république, depuis 25 ans on n’a jamais vu un président impopulaire redevenir populaire. Il faudrait un ensemble de circonstances assez exceptionnelles pour retourner la tendance. Ce qui compte pour alimenter sa stratégie du « ça va mieux », ce ne sont pas des chiffres mais la perception que les gens en ont. C’est ce décalage abyssal qui contribue à renforcer son impopularité. Personne ne voit que les choses s’améliorent avec une insécurité économique, sociale et physique qui se développe.
Tout dépend de qui sera face à lui s’il se représente ?
Il faut tenir compte de deux éléments clés en la matière. Le premier consiste à savoir qui sera le candidat républicain. Hollande prie pour que ce soit Sarkozy ou quelqu’un d’autre qu’Alain Juppé. Le deuxième facteur clé, ce sera le nombre de candidats à gauche. Pour l’instant, c’est l’inconnue totale. S’il y a Nicolas Hulot, on sait très bien que François Hollande ne sera jamais au deuxième tour. La seule question qui ne se pose même pas, c’est savoir si Marine Le Pen sera au deuxième tour ou pas. La question est de savoir qui sera face à elle. Beaucoup de scénarios sont avancés. François Hollande peut aussi renoncer. A court terme, l’enjeu c’est de savoir si la loi Travail sera définitivement adoptée ou pas fin juillet.