20.11.2024
« Le blé est un atout pour la diplomatie économique »
Presse
29 octobre 2015
L’exportation de blé est un atout pour l’influence de la France dans le monde, en cohérence avec ses valeurs de paix. En vendant du blé, nous contribuons à la stabilité politique de pays en développement, l’Égypte notamment. Nos pouvoirs publics ont longtemps privilégié une agriculture axée sur la qualité, la quantité et le développement durable, en négligeant un peu l’aspect commercial. Nous vendons du blé tous les ans en grande quantité l’étranger. Peu de gens en parlent. Je regrette qu’on préfère évoquer les Rafale et Mistral vendus à l’Égypte. Depuis peu, nos gouvernements successifs prennent conscience que la diplomatie économique française doit être performante commercialement, mais aussi compatible avec nos valeurs politiques et morales. Le blé est la locomotive de cette France commerciale et humanitaire.
Comment la filière blé, montrée en exemple, a-t-elle réussi ?
Nous avons construit cette puissance depuis trente à quarante ans, grâce à une volonté politique. Jusqu’aux années 1950 et 1960, la France importait du blé des colonies nord-africaines. On a commencé à exporter du blé dans les années 1970 et, peu à peu, vers l’Afrique du Nord. Cette filière s’est structurée sans avoir peur de la mondialisation et a anticipé les changements. Elle s’est tournée rapidement vers l’export et a vu que les débouchés d’avenir ne se situeraient pas dans les pays voisins, mais vers des destinations en développement, comme le sud de la Méditerranée. Nous sommes un petit pays, mais capable d’exporter la moitié des 40 millions de tonnes de blé que nous produisons.
Le blé français doit-il améliorer sa qualité pour maintenir ses positions à l’export ?
Notre blé est de très bonne qualité. Ses caractéristiques peuvent être cependant questionnées par rapport à des clients du Proche et Moyen-Orient qui ont des besoins spécifiques, plus en phase avec le blé issu de la mer Noire. Si la France veut conquérir durablement ces marchés, elle devra faire évoluer la qualité de son blé, notamment sa teneur protéique ou la force boulangère. Depuis trois à quatre campagnes, les Marocains achètent du blé ukrainien, car sa qualité s’est améliorée et correspond mieux leurs besoins. Cela a surpris. Cet exemple montre qu’il ne faut pas s’endormir. La filière en prend conscience et est en train de s’organiser.
Pensez-vous que les OGM soient un outil pour répondre demain à la demande mondiale en blé ?
C’est un outil à prendre en considération pour répondre aux enjeux d’alimentation. Mais le génome du blé est plus compliqué à décrypter que ceux du soja et du maïs. Aujourd’hui, les rendements en blé plafonnent et plusieurs programmes de recherches sont en cours. Il ne faut pas diaboliser les recherches sur le génome du blé, comme on a pu le faire par le passé pour d’autres céréales. La France est une grande puissance en recherche agronomique. Elle aurait été bien meilleure dans la bataille idéologique et scientifique sur les OGM, si elle avait maintenu un appareil de recherche sur cette thématique. On a préféré ne pas le développer et cela a donné naissance à un monopole ou presque sur les OGM.