ANALYSES

Le pape François est-il trop conciliant vis-à-vis de Vladimir Poutine ?

Presse
11 juin 2015
Interview de Nicolas Kazarian - La Croix
« En recevant Vladimir Poutine, le pape François fait preuve de l’immense liberté diplomatique que les centaines d’années d’histoire de sa propre tradition religieuse lui permettent d’avoir, notamment à l’égard des chancelleries américaines ou européennes.

Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le Saint-Siège réaffirme son non-alignement sur la politique occidentale à l’occasion de la visite du dirigeant russe. Lors de leur première rencontre, en 2013, il s’était opposé à une intervention militaire en Syrie que réclamaient plusieurs pays dont la France.

« LA DIPLOMATIE PAPALE PRÉFÈRE AGIR EN SILENCE »

Cette grande liberté s’accompagne d’un pragmatisme en matière diplomatique. Le pape François estime qu’il est essentiel de tisser des liens particuliers avec la Russie sur la question de l’Ukraine comme celle des chrétiens d’Orient.

Aux yeux du Vatican, les États occidentaux se voilent la face en pensant qu’il est possible de régler le conflit ukrainien et la montée en puissance du fondamentalisme musulman dans le monde arabe à travers Daech, sans l’acteur central qu’est Moscou.
En nommant les responsables de la crise en Ukraine comme le poussent à le faire les États-Unis, le pape François perdrait sa liberté de paroles. Depuis la chute du communisme, il n’est pas non plus dans la tradition du Vatican de prendre parti au cours d’un conflit.

La diplomatie papale préfère agir en silence. Son action directe passe par sa capacité à mettre en contact des belligérants tout en lançant aux catholiques des appels à la paix et au dialogue.

« LE SAINT-SIÈGE AFFICHE UNE TRÈS FORTE VOLONTÉ DE SE RAPPROCHER DE L’ÉGLISE ORTHODOXE »

En Ukraine, le pape François a notamment mis en garde les évêques gréco-catholiques, ces catholiques de rites byzantins unis à Rome, contre une trop forte implication dans la politique du pays.Le conflit alimenté par des sentiments nationalistes ravive l’opposition confessionnelle au moment où le Saint-Siège affiche une très forte volonté de se rapprocher de l’Église orthodoxe.
La recherche de l’unité des chrétiens est un élément extrêmement important de son agenda. Or, la promotion de la paix en Ukraine aidera au dialogue sur la question épineuse des gréco-catholiques qui reste une blessure historique dans la conscience de l’orthodoxie. »
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