04.11.2024
Libertariens, riches et têtus : les frères Koch sont un danger pour Obama et la démocratie
Édito
14 mai 2015
Ils sont libertariens, c’est-à-dire partisans d’un libéralisme économique absolu, réclamant l’intervention minimum de l’État en tous domaines.
Leur père a fait fortune dans le pétrole en Union soviétique du temps de Staline, ce qui ne l’a pas empêché de nourrir une logique anticommuniste virulente. Il a fondé en 1958 la John Birch Society, luttant contre la prise du pouvoir des communistes aux États-Unis, perspective pourtant assez lointaine.
En 1980, ils ont soutenu Ed Clark, candidat du parti libertarien, qui proposait la suppression du FBI, de la CIA, de l’impôt sur le revenu et des pensions publiques.
Cela n’a pas réussi, mais les frères Koch semblent aujourd’hui mieux organisés. Fini le soutien aux candidats folkloriques, désormais ils veulent porter le parti républicain au pouvoir aux États-Unis.
Une influence tentaculaire
Ils sont aujourd’hui vent debout contre l’Obamacare et prônent la suppression de l’agence fédérale de protection de l’environnement. C’est leur conviction mais également leur intérêt. Leurs industries sont très polluantes, la suppression de l’impôt leur conviendra très bien.
Les frères Koch se sont en effet intéressés de près au débat d’idées. Ils ont subventionné ou créé un système de fondations, de think tank, au point que certains parlent de « kochtopus », par référence aux tentacules de la pieuvre.
Ils sont largement à l’origine de la montée en puissance du Tea Party, qui a fait une entrée en force à la Chambre des représentants, en 2010, sur des bases très réactionnaires.
Ils ont créé un nombre de structures à but non lucratif, mais idéologiquement très intéressées, des think tank ou associations qui travaillent sur des thématiques, qui servent les intérêts des frères Koch et de leur industrie. L’idée est de limiter au maximum l’action de l’État et de laisser le marché régir l’économie.
Revendications et dérégulations économiques
La Cato Institute, créée en 1977, dont ils ont pris le contrôle récemment, emploie cent personnes qui plaident pour la réduction des impôts des services sociaux et des politiques environnementales. Selon cet institut, « les théories du réchauffement climatique donnent plus de contrôle sur l’économie au gouvernement. »
Le Mercatus center, doté d’un budget de 30 millions de dollars, prône la dérégulation économique.
Des associations de citoyens ont été subventionnées (de façon défiscalisée) : Citizens for a sound economy, qui qualifie les pluies acides et autres preuves environnementales de mythes, American for prosperity, qui dispose de 600 permanents et qui a œuvré pour la victoire des candidats du Tea Party aux élections de 2010, dénonçant le communisme d’Obama.
L’Heritage foundation : au sein de cette structure a été créé Heritage action, destiné à lutter contre l’Obamacare, avec un budget de 5,5 millions de dollars.
300 millions de dollars pour choisir le meilleur candidat
Ils ont annoncé vouloir dépenser personnellement 300 millions de dollars pour sélectionner le meilleur candidat républicain, et promettent, avec leurs alliés, d’investir 800 millions d’euros pour la campagne républicaine en vue des élections de 2016.
Les frères Koch ont leurs idées et c’est leur droit.
Le problème est l’influence qu’ils peuvent exercer, grâce à leur fortune, sur l’opinion publique américaine. Et c’est là que se pose un problème de fond : quelles sont les limites de la démocratie ? Quel est le poids de l’argent dans le débat public ?
L’avenir de la démocratie se joue ici
À un moment où l’opinion, grâce aux réseaux sociaux, se renforce, n’assiste-t-on pas à un renversement de la tendance par la manipulation des informations, du fait de la fortune de quelques-uns ? Il y a un double-mouvement. L’émancipation des individus et des peuples, grâce à l’éducation et aux nouvelles technologies de l’information et de la communication, et le rôle croissant des grandes fortunes sur la vie politique : milliardaires américains, récents ou anciens, oligarques russes ou ukrainiens.
La globalisation a aussi permis la constitution rapide de fortunes faramineuses. Certains, conscients que le poids de l’opinion est plus important qu’auparavant, veulent du coup l’orienter et s’en donner les moyens.
L’avenir de la démocratie se joue ici, entre la mobilisation des citoyens et l’influence des milliardaires oligarques, dont l’objectif n’est pas forcément l’intérêt général (ni l’intérêt national d’ailleurs).