L’heure de vérité approche pour Paris 2024
Le Comité national olympique du sport français (CNOSF) présente ce mardi les conclusions de l’étude d’opportunité sur une candidature olympique française aux jeux d’été 2024 et/ou 2028. La décision formelle de candidater, qui sera le fruit de tractations politiques, attendra encore plusieurs semaines. Néanmoins, des indicateurs clairs sur la volonté et la capacité française à mener ce projet à bien seront livrés mardi. Voici le point sur ce dossier qui va occuper l’actualité.
Les obstacles à franchir
Il ne fait aucun doute qu’au niveau purement technique le dossier parisien sera compétitif. La ville dispose déjà d’un rayonnement et des capacités d’accueil nécessaires.
La plupart des infrastructures sportives encore manquantes (piscine olympique, base nautique, stade pour sport indoor, etc.) sera construite ces prochaines années, et pour les compétitions qui auront lieu hors de Paris, la France n’a que l’embarras du choix (stades de l’Euro 2016 pour le football et le rugby, Marseille ou La Rochelle pour la voile).
En termes de pilotage, le Comité français du sport international (CFSI) au sein du CNOSF a, sous la direction de Bernard Lapasset, déjà réussi à mobiliser les ressources nationales. Le mouvement sportif est donc prêt à porter le projet.
Malgré ces atouts indéniables, deux variables sont venues cette année ternir les perspectives olympiques françaises. D’une part, le fait que la population française n’est pas encore pleinement convaincue de l’opportunité de ce projet, comme l’a laissé entendre un sondage Ipsos publié par « L’Équipe » en mars dernier.
En contexte de crise, et face aux dépenses exubérantes des derniers grands événements sportifs à Londres, au Brésil ou en Russie, ce scepticisme peut être compréhensible. D’autant plus qu’il n’est pas propre à la France [1].
D’autre part, ce scepticisme populaire conditionne en partie celui des politiques, qui hésitent à s’investir dans un projet lointain et coûteux, sachant que ce ne sont pas eux qui en récolteront les bénéfices.
La maire de Paris Anne Hidalgo a fait part de son refus d’entreprendre des sacrifices financiers pour les Jeux. Au niveau gouvernemental, où l’on attend les conclusions du CNOSF, aucune déclaration franche n’a encore été entendue.
La difficile conjoncture économique actuelle n’est certes pas propice à l’accueil des Jeux, mais au regard de la conjoncture politique, la France pourrait s’en servir pour fédérer la nation. Encore faut-il que ce projet soit mobilisateur, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Une concurrence avec l’Exposition Universelle ?
Le premier ministre Manuel Valls a récemment déclaré l’appui de l’État à la candidature à l’Exposition universelle 2025, projet moins coûteux, qui a donc une longueur d’avance sur le projet olympique.
Les deux projets sont-ils en concurrence ? Pas forcément, puisque d’autres pays ont déjà combiné les deux événements (JO de Pékin 2008 et Exposition Universelle de Shanghai en 2010, JO Barcelone 1992 et Expo Universelle de Séville 1992)… De plus, ces deux projets peuvent s’inscrire dans la perspective du Grand Paris (l’idée de « Grand Paris » peut d’ailleurs être un concept utilisé dans les candidatures).
Paris ne sera pas tout seul
La véritable concurrence à Paris 2024 sera internationale. Le comité olympique allemand, soutenu par la présence de son ancien président Thomas Bach à la tête du CIO, a annoncé cette semaine la volonté de présenter une candidature d’Hambourg ou Berlin (à valider avec les habitants).
Les États-Unis, dont les derniers jeux d’été remontent à 1996, proposeront également un dossier (Washington, Los Angeles ou Boston sont annoncés), tout comme la Russie (St Petersbourg ?).
Autant dire que la France serait engagée dans une compétition difficile, ce qui exige d’autant plus une forte mobilisation financière, politique et populaire autour de son dossier.
En attendant une réforme du CIO sur l’accueil des JO ?
La décision française devra de toute façon attendre les résultats de la session du CIO prévue à Monaco les 8 et 9 décembre prochains, où l’instance gouvernante du mouvement olympique se penchera sur l’opportunité ou non de modifier le cahier des charges des candidatures.
En plus des critiques soulevées par les dépenses faramineuses de la Russie, de la Chine et du Brésil pour accueillir les jeux, le CIO se retrouve dans une situation difficile pour les JO d’hiver 2022, où il ne reste plus qu’Almaty (Kazakhstan) et Pékin dans la course à la réception, à savoir deux pays dont le bilan en termes de libertés politiques et de droit de l’homme pose question et où le projet olympique engendrera encore de profondes métamorphoses au détriment de la population locale.
Le CIO est donc de plus en plus poussé à alléger le cahier de charges pour permettre à plus de villes de candidater aux jeux et redonner un visage humain à l’olympisme. Les éventuelles décisions auront forcément un impact sur la décision française.
Autant de variables à prendre en compte, donc. Une chose est sûre : une éventuelle candidature devra faire l’objet d’une mobilisation nationale totale et sans faille (à l’inverse d’Annecy 2018), ainsi qu’un discours et une stratégie internationale de lobbying adaptée aux attentes des membres du CIO (à l’inverse de Paris 2012).
Premiers éléments de réponse sur la décision française mardi au CNOSF.