14.11.2024
Le football multipolaire
Presse
6 juillet 2010
Paradoxe, cette domination sans égal ne suscite pas de rejet. L’hégémonie du Brésil est vécue comme sympathique et acceptée dans la bonne humeur A la différence d’autres grandes puissances, celle-ci est hyperpopulaire partout dans le monde (sauf sans doute chez le voisin et rival argentin). C’est à peu près la seule équipe contre laquelle la douleur de la défaite est adoucie, c’est la sélection que l’on veut voir triompher à chaque fois qu’elle n’est pas opposée à sa propre équipe nationale.
Pour autant, on voit que le football est, lui aussi, en voie de multipolarisation. Le Brésil, pour être toujours la référence, ne peut imposer sa loi à tous, à l’image des Etats-Unis sur le plan stratégique II y a d’autres grandes puissances, comme l’Argentine et l’Uruguay pour l’Amérique latine. Il y a également une vieille et une nouvelle Europe, mais pas comme l’entendait Rumsfeld pendant la guerre d’Irak. Il y a les anciens vainqueurs de la compétition. Angleterre, France, Italie, médiocres cette année mais qui peuvent se relever, et l’Allemagne, brillante. La nouvelle Europe, ce sont les Pays-Bas et l’Espagne, qui n’ont pas encore eu le bonheur de gagner la compétition suprême, et sont des prétendants crédibles.
Le monopole de l’Europe et de l’Amérique du Sud sur la Coupe du monde sera-t-il ébranlé un jour ? Si les équipes africaines progressent régulièrement, elles n’ont pas encore un niveau d’organisation, de succès dans les grands rendez-vous, suffisants pour prétendre au titre suprême. Elles ne sont pas encore parvenues au stade des demi-finales (le Ghana a échoué de très peu) et conservent une marge de progression avant de pouvoir y prétendre. Leur tour viendra.
Japon, Corée du Sud, Etats-Unis ont confirmé leur statut de puissances moyennes qui aspirent à poursuivre leur affirmation A terme, le condominium européano-sud-américain sera brisé. Le football est d’un apprentissage long, c’est un processus culturel qui dure sur plusieurs générations
C’est un sport démocratique, dans la mesure où les réseaux sociaux ou l’hérédité n’y ont aucune part. Mais il faut des générations pour obtenir une culture qui soit infusée dans l’ensemble du pays et qui permette de produire non pas un joueur d’exception mais un collectif pouvant gagner l’épreuve. La participation accrue des équipes africaines et asiatiques au Mondial, l’amélioration continue de leurs performances devraient prochainement amener à la victoire d’une de ces équipes. C’est une question d’années. Quatre les séparent de la prochaine Coupe du monde… au Brésil.