Pertes de JPMorgan : « Rien n’a été fait en terme de régulation »
C’est une très mauvaise nouvelle. Cela montre à quel point rien n’a été fait en terme de régulation depuis la crise. En réalité, c’est pareil, voir pire.
Non, c’est pire parce qu’il y a beaucoup plus de produits toxiques qu’auparavant. Les montages mathématiques de ces produits sont de plus en plus complexes, ce qui les rend de plus en plus dangereux parce que ceux-ci ont un effet de levier – un effet multiplicateur – de plus en plus puissant. Et on invente quotidiennement de nouveaux produits financiers de ce type
Non pas du tout. Pendant un temps Nicolas Sarkozy a fait croire que les choses avaient changé sur ce sujet parce que des textes avaient été adoptés. Mais les textes adoptés localement ne peuvent pas permettre de lutter éfficacement contre une finance complètement mondialisé : c’est un leurre.
La preuve est là que ça ne sert à rien tant que la régulation n’est pas suivie aux Etats-unis. Et cela sans compter que le shadow market et le shadow banking ne cessent de progresser, sans que, visiblement, cela n’alerte personne.
Le shadow banking c’est une finance légale mais basée sur la spéculation, les échanges de gré à gré, via les paradis fiscaux. C’est une finance qui se base sur les risques systémiques, l’impunité… Ses acteurs sont les mêmes que celui du marché mais en raison de leur fonctionnement opaque ce système bancaire, ce marché, est qualifié de shadow, fantôme. On sait aujourd’hui que cette finance la représente au moins autant que la finance « normale », si ce n’est plus.
La pression du lobby financier est très forte. Et aux Etats-Unis et en Angleterre il est très difficile d’aller à l’encontre de ceux qui font fonctionner le système. Il faut se rendre compte du poids considérable que représente la finance en terme de PIB ne serait-ce que pour ces deux Etats. Enlevez la finance à l’Angleterre et il ne restera presque plus rien. Le problème c’est que si vous encadrez dans un pays, cette finance la se déplacera, contournera… elle ira ailleurs.
Les solutions sont connues. Il faut supprimer les produits toxiques, ces couvertures assurancielles comme les CDS et leurs dérivés. A la base ces produits sont sensés garantir le risque encouru par rapport à un crédit, or on se rend compte que ceux-ci servent avant tout à spéculer sur celui-ci. C’est ce qui s’est passé en Grèce. Par rapport à cela, la solution ne peut être que mondiale.
Mais c’est la seule solution. Tant que les Etats-Unis, au moins eux, ne ratifieront pas certaines règles – comme la « règle Volcker », rejetée par JPMorgan d’ailleurs – rien ne se produira. Le fait qu’il y ait une incapacité à faire adopter ces règles communes à l’ensemble du système montre que nous sommes là au cœur du problème et que de fait, c’est extrêmement complexe d’avancer.
Dans l’absolu une faillite est toujours possible. Après il y a la règle du to big to fail qui fait dire que l’Etat américain agira. Mais il y a aussi l’aléa moral : sachant cela les banques se comportent comme si elles pouvaient prendre tous les risques. C’est ce qui s’est produit ici a priori. En cas de perte, le joueur est renfloué ! La tentation dès lors est grande de prendre de plus en plus de risques par simple appât du gain…
Non, même si c’est tout de même un peu plus clair que dans le monde anglo-saxon. Et encore… parfois le monde anglo-saxon prend de bonnes initiatives. Ensuite nous sommes moins exposés parce que nous ne sommes pas un pays financier comme l’Angleterre ou les Etats-Unis. Mais nous aussi nous avons nos scandales financiers et nos produits toxiques : il ne faut pas oublier l’affaire de la banque Dexia. Combien de collectivités territoriales et d’institutions comme des hôpitaux sont aujourd’hui asphyxiés par les crédits proposés par l’ancienne banque ? En attendant, les grands patrons de la banque, tous Français, ont été recasés alors qu’ils ont mis une banque en état de faillite.