« Ils ne présentent pas de potentialité terroriste »
Pour Jean-Yves Camus, chercheur associé à l’IRIS, spécialiste de l’extrême-droite, la mouvance « identitaire » recherche à la fois la médiatisation, le travail idéologique et les résultats électoraux.
Il s’agit d’un groupe politique proche de l’extrême-droite qui peut compter sur environ un millier de sympathisants au maximum en France (NDLR : et 2000 revendiqués) contre quelque 40 000 adhérents encartés au Front national. Cela ne veut pas dire que son influence soit faible. Les « identitaires » savent se servir très intelligemment des symboles et des médias pour faire passer leur message. Ce groupuscule est très proche d’une autre structure, le Bloc identitaire, qui lui est un parti légalement enregistré.
Certains identitaires, comme le président du Bloc, Fabrice Robert, ont pu passer brièvement par le Front national. Mais tant le Front, qui interdit la double appartenance à un parti, que la mouvance identitaire, qui veut conserver son indépendance, tiennent à se démarquer l’un de l’autre.
Ils s’opposent sur au moins trois terrains. Les identitaires défendent avant tout une Europe des identités locales et ne veulent pas d’un Etat centralisateur. Cela se reflète dans leur organisation très régionalisée. Autre particularité : contrairement à l’extrême droite plus « classique », le discours des identitaires ne dérape pas vers l’antisémitisme. L’histoire de la Seconde Guerre mondiale n’est pas un sujet pour eux.
Là aussi, il existe une différence de fond. Le Front national, notamment depuis qu’il a à sa tête Marine Le Pen, croit encore dans l’assimilation des étrangers et des arabo-musulmans s’ils renoncent à leurs particularismes, font leur la culture française et les valeurs républicaines. Les identitaires, eux prônent la « reconquête », les étrangers devant être assignés à leur territoire d’origine. Toutes ces différences expliquent pourquoi Me Gilbert Collard vient de refuser de défendre les militants identitaires poursuivis à la suite de l’occupation de la mosquée de Poitiers.
Ce mouvement tient des propos qui mettent à mal « le vivre ensemble ». Et il sait très bien les médiatiser. Mais je ne pense pas que les identitaires présentent une potentialité terroriste, contrairement à l’islamisme radical. Ce n’est pas non plus une « usine à Breivik français » (NDLR : terroriste norvégien d’extrême droite, auteur de la tuerie du 22 juillet 2011).