ANALYSES

Les Boeing 787 Dreamliner cloués au sol : la course à la technologie se fait-elle au détriment de la sécurité ?

Presse
18 janvier 2013
Jean-Vincent Brisset - Atlantico
Les Boeing 787 Dreamliner sont cloués au sol partout dans le monde suite à une série de problèmes techniques. Quelles sont les difficultés éprouvées ?

Très souvent les avions sont des extrapolations de modèles plus anciens auxquels on ajoute davantage d’améliorations que de réelles innovations. Ce n’est pas le cas pour le Boeing 787 Dreamliner qui est un avion presque totalement nouveau comme l’ont été en leurs temps la Caravelle française et le Boeing 707. Construit différemment des appareils plus classiques, son fonctionnement est également innovant. Il est donc normal de rencontrer, comme sur tous les avions, des problèmes de jeunesse, mais, dans ce cas, ce sont des problèmes tout aussi nouveaux. Le développement de l’avion avait d’ailleurs connu des retards et des incidents, dus à une mauvaise maîtrise de certaines innovations, en particulier au niveau des structures.


Le 787 se caractérise entre autres par la place très importante qu’occupe l’électricité pour tous les accessoires de l’avion. Par exemple, au lieu d’utiliser de l’air sous pression provenant des réacteurs pour le dégivrage et la pressurisation, ceux-ci sont assurés par des générations électriques. De même, les pompes hydrauliques qui fournissent la pression pour le train d’atterrissage et les commandes de vol sont actionnées par des moteurs électriques au lieu d’être entraînées par les réacteurs.


De même, l’utilisation de matériaux de types composites pour la structure même de l’avion constitue une innovation majeure, puisque ceux-ci représentent 50% de la structure. Son aérodynamisme, qui, semble assez classique est en fait assez original, en particulier au niveau des ailes.


Cette course à l’innovation s’est-elle faite au détriment de la sécurité ?

Généralement, les innovations réalisées dans l’aviation ont pour objectif d’améliorer les performances afin de réduire les coûts d’exploitation en étant plus légers, plus résistants, moins consommateurs de carburants…


A un moment donné ou un autre, il a toujours été reproché aux avions de nouvelle génération dans leur jeunesse d’avoir été trop loin dans l’innovation et d’avoir remis en cause la sécurité. Les craintes ont parfois été si fortes que certains modèles ont été rapidement retirés de la circulation, comme la première version du Comet britannique, premier avion de ligne propulsé par des réacteurs. Le McDonnell Douglas DC-10 avait aussi rencontré en son temps des soucis sévères par exemple, et toute la flotte avait été interdite de vol pendant plusieurs mois.


Dans le cas du Boeing 787 Dreamliner, le problème serait à priori lié à l’électricité, ou plus exactement aux batteries… Un problème très gênant dans la mesure où le constructeur américain avait beaucoup misé sur les gains réalisés grâce à cette priorité donné à l’électricité. C’était, avec l’utilisation des composites, la principale innovation et l’argument de vente prioritaire : une plus faible consommation de carburant. Le fait d’arrêter tous les avions actuellement en service permettra sans doute de comprendre ce qui s’est passé et de remédier à ces incidents.


D’autres problèmes sont apparus avant les derniers incidents comme des fuites de pétrole, une vitre cassée dans le cockpit ou des faiblesses structurales, mais ils les causes et les remèdes ont été trouvés assez rapidement.


Après cette course à l’innovation, quelles peuvent être les conséquences commerciales ?

Les contrats ne seront pas remis en cause, du moins dans un premier temps, puisque le problème semble avoir été rapidement été identifié.


Si les batteries sont totalement remises en cause et qu’il faut en mettre au point de nouvelles, réaliser de nouveaux essais et relancer un processus entier… cela peut bloquer l’avion pendant un certain temps.


Son avenir commercial ne serait cependant pas compromis pour le moment, les engagements pris tant par le constructeur que par les clients étant difficiles à remettre en cause. Il ne faudrait cependant pas que ces arrêts de vol durent trop. Boeing, qui avait déjà réduit fortement ses marges pour lancer la commercialisation de l’avion devra cependant subir des pénalités couteuses.

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