ANALYSES

« Pas de solution sans les Touaregs »

Presse
29 janvier 2013
Philippe Hugon - La Nouvelle République
Peut-on parler de marche triomphale de l’armée ?

« Il faut d’abord se souvenir d’une chose, c’est qu’en temps de guerre, nous ne disposons pas de toutes les informations. Ceci dit, il n’est pas tellement surprenant de constater qu’il y a peu ou pas de résistance de la part des islamistes. La chute rapide de Gao était prévisible car le Mujao qui y était installé est plus dans l’économie mafieuse que dans le contrôle de territoire. »


Où les djihadistes peuvent-ils se replier ?

« Le Nord Mali, c’est plus d’une fois et demie la France en superficie, sans compter la zone des pays voisins où les islamistes pourraient se réfugier si les frontières restent aussi poreuses. Du côté de Kidal, également, il y a des possibilités de refuge dans les montagnes. Ces mouvances sont particulièrement aguerries sur ce genre de territoire. »


Pourquoi les terroristes ne font pas front commun ?

« Il n’y a pas de hiérarchie dans tous ces mouvements labellisés Al-Qaida dont les chefs respectifs se font eux-mêmes la guerre. Ils savent se retrouver sur le commerce et les trafics de drogue, d’armes, d’essence et parfois pour des actions militaires. Mais si Ansar el-Dine souhaite instaurer la charia, Mujao reste dans les actions mafieuses et les trafics surtout, quand Aqmi imagine installer un califat de la Mauritanie à la Somalie tandis que, d’un autre côté, les Touaregs sont plus sur une logique d’indépendance ou d’autonomie de territoire. »


Quel rôle peuvent jouer les mouvances touarègues ?

« Les exactions d’une partie de l’armée à leur encontre seraient presque la pire des choses car il n’y aura de reconquête durable sans ces Touaregs. La reconquête des villes est certes quelque chose d’important mais le contrôle du territoire global ne peut pas être du ressort unique de l’armée française. C’est aux pays africains de prendre leurs responsabilités. Un futur de paix ne peut exister que si l’armée et la police maliennes sont reconstituées, que la population retrouve une activité économique, des collectivités locales et un tissu social fort. Cette guerre, personne ne peut croire qu’elle supprime toutes les zones d’insécurité mais il faut que ces islamistes restent marginalisés de la population. Enfin, il faut que l’Algérie joue le jeu et verrouille ses frontières. »

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