04.11.2024
De Nasri à Ménez, le foot vs les JO : cette comparaison n’a pas de sens
Édito
24 août 2012
L’immense majorité des Français a célébré le caractère festif des jeux, la bonne ambiance qui s’en dégageait, le côté chaleureux des champions français qui alliaient bonnes performances (septième place mondiale) tout en restant accessibles et sympathiques. À cet égard, le "Club France", où les médaillés du jour se mêlaient au public et aux VIP, a été une incontestable réussite.
Les Jeux olympiques succédant au championnat d’Europe de football, où le comportement de certains joueurs internationaux français a été mis en cause, il n’en fallait pas plus pour que de nombreux commentaires opposent les sportifs authentiques ayant l’amour du maillot et un comportement éthique aux incorrigibles mauvais garçons du football. Les gentlemans olympiques contre les voyous du gazon.
Il est certain que l’enthousiasme suscité par les Jeux olympiques contraste avec les critiques qui se sont abattues sur nos footballeurs après l’Euro. C’est une réalité à laquelle le monde du football doit faire face. Il ne s’agit pas de la nier et d’ailleurs les responsables fédéraux, le nouveau sélectionneur et les dirigeants de clubs en sont conscients.
Admettre ce constat n’empêche pas de réfléchir. Et de voir que les choses ne sont pas aussi manichéennes que certaines présentations peuvent vouloir le faire penser.
Condamner le football, le ravaler au rang de sport de voyous à cause du comportement de certains joueurs de l’équipe de France de football durant l’Euro est un raisonnement à l’emporte-pièce où l’intelligence des situations cède aux idées reçues ou aux arrière-pensées.
Peut-on confondre les traits de deux millions de licenciés au comportement de certains professionnels ? Doit-on oublier tout le lien social que le football apporte au quotidien ? Doit-on d’ailleurs confondre les 23 joueurs sélectionnés aux 4 internationaux qui ont fait l’objet d’incriminations ? Et quand on regarde la nature réelle des faits reprochés aux quatre joueurs en cause, il semble qu’il n’y a guère de quoi fouetter un chat.
Le football paye sa visibilité, la jalousie qu’il suscite du fait des sommes de plus en plus importantes que son succès médiatique lui apporte, ainsi que l’héritage de la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud. Il n’est plus aujourd’hui question de demander aux joueurs de football d’être exemplaires, il faut qu’ils soient irréprochables.
Michel Platini a rappelé à juste titre que, s’il avait dû être suspendu à chaque fois qu’il s’était engueulé avec un journaliste, il n’aurait pas compté beaucoup de sélections.
Insulter un journaliste n’est pas correct mais Zinedine Zidane et Fabien Barthez ont commis des actes plus graves au cours de matches sans jamais perdre le soutien populaire dont ils jouissent encore aujourd’hui. On était en fait moins sévères avec les footballeurs lorsqu’ils remportaient des victoires.
On leur reproche de gagner de l’argent ou d’être arrogants. Ils gagnent l’argent que sponsors, publics et médias investissent dans le sport. Mais on ne critique pas les joueurs de basket de l’équipe américaine ou Usain Bolt, qui ne sont ni des smicards ni des modèles de modestie. Mais à des champions exceptionnels, on pardonne. D’ailleurs, il n’y a qu’à voir l’engouement que suscite la venue au PSG de Zlatan Ibrahimovic pour le confirmer.
Après l’amère défaite contre l’Espagne, des joueurs de basket de l’équipe de France ont eu des mauvais gestes à l’égard de l’adversaire sans que cela suscite une tempête de critiques. Après leur triomphe en finale, les handballeurs français ont chahuté des journalistes, qui n’avaient pas été tendres avec eux auparavant, sans qu’on réclame qu’ils soient déférés au tribunal de la morale. Il est plus facile de chanter "La Marseillaise" en recevant une médaille d’or qu’avant de jouer un match.
Il ne s’agit pas d’exonérer de toute responsabilité les footballeurs. Ils sont célèbres, ils sont riches, ils ont donc des obligations face au public, le monde du football en est d’ailleurs conscient. Cela ne justifie pas de faire des amalgames entre des comportements individuels répréhensibles et la masse des pratiquants et de masquer tout ce qu’il y a de positif dans ce sport.
Il ne faut pas opposer Jeux olympiques et football. Ce sont deux moments différents, incomparables et qui sont non pas antagonistes mais complémentaires. Les sportifs olympiques ne doivent pas se faire d’illusion.
Ceux qui les encensent aujourd’hui en clouant au pilori le football seront les premiers à les proposer au bûcher lorsque les résultats seront moins bons. Ils sont les premiers à réclamer un comportement irréprochable aux sportifs et à s’accommoder des turpitudes des élites intellectuelles politiques ou médiatiques.