04.11.2024
Une du « Point » sur « l’islam sans gêne » : le racolage public plutôt que l’information
Édito
31 octobre 2012
Les premiers vont être confortés dans l’idée qu’ils sont rejetés en France, les seconds qu’ils sont menacés dans leur pays. Cela vient après les caricatures de "Charlie Hebdo", et une autre couverture de "L’Express" dans la même veine.
Catastrophique pour la société française
Résultat : le vouloir vivre ensemble régresse et les clichés prolifèrent. La stigmatisation s’accroît chaque jour.
Certes, les apparences sont sauves. "L’Express" et "Le Point" disent poser les vrais problèmes et briser les tabous. "Charlie Hebdo" fait dans la provocation humoristique. Mais même un "deux de tension" s’apercevrait que leurs investigations et blagues vont toujours dans le même sens : contre les musulmans. Taper sur les faibles en se présentant comme courageux.
Le résultat est catastrophique pour la société française. Il accroît les peurs réciproques, crée un cercle vicieux qui conduit de la méconnaissance à l’incompréhension, puis à la haine. Provoquant un sentiment de rejet, ces journaux vont par la suite prospérer en déplorant le fossé existant entre musulmans et non musulmans, qu’ils ont largement conduit à développer.
On pourrait certes dire qu’ils ne sont pas en charge des équilibres sociétaux et que leur ligne éditoriale est libre. En effet. Chacun est libre d’écrire ce qu’il veut et le public tranche. En l’occurrence, il donne raison aux journaux concernés qui augmentent leur tirage à chaque fois qu’ils font des couvertures stigmatisantes sur les musulmans. Ce n’est pas très glorieux intellectuellement, mais c’est très rentable économiquement.
Du devoir d’informer à la volonté d’influencer
Mais qu’ils assument leurs responsabilités. "Charlie Hebdo" passe d’anarcho-libertaire à beauf réac, il est vrai pour le plus grand profit des caricaturistes actionnaires du journal. Pour "L’Express" (créé faut-il le rappeler pour dénoncer la guerre d’Algérie) et pour "Le Point" (dont le directeur, Claude Imbert, reconnaissait déjà il y a quelque temps qu’il était "un peu islamophobe" ; continuant à effeuiller la marguerite, il est passé de "beaucoup" à "à la folie") c’est encore plus grave.
Ils ont le droit bien sûr d’avoir leur ligne éditoriale. C’est le principe de la presse d’opinion. Mais les difficultés de la presse les conduisent à chercher éperdument à accroître leur tirage en jouant sur les plus bas instincts du public. Ils sont passés du devoir d’informer à la volonté d’influencer le public, quitte à déformer les réalités.
Pascal Boniface a contacté l’un de ces journaux pour lui montrer la réussite de la Convention ZEP du lycée Saint-Exupéry à Mantes-la-Jolie, situé en plein cœur du Val Fourré. Cela n’a suscité aucun intérêt. Aucun de ces journaux n’est allé voir le travail de sensibilisation et de pédagogie que Médine fait au Havre depuis des années et qui a suscité l’intérêt de "Time Magazine". Ils préfèrent faire des unes alarmantes en prenant soin de ne jamais franchir le périphérique.
Si la loi sur le racolage public s’appliquait aux journaux, ils seraient déferrés en justice. Cela nous rappelle les propos de Léo Ferré : "C’est dégueulasse du verbe dégueuler".
Bon ok, on n’est pas prêt de parler de nous dans "Le Point" ou dans "L’Express", ni d’être invités dans les émissions de Franz-Olivier Giesbert sur le service public télévisé, payé avec notre redevance. Mais de temps en temps il faut le dire : y en a marre des pseudos-élites qui nous conduisent dans le mur en privilégiant leurs intérêts commerciaux à court terme, contre l’intérêt à long terme de la société française !
Pascal Boniface et Médine viennent de publier "Don’t Panik" préface d’Esther Benbassa aux Éditions Desclée de Brouwer.