04.11.2024
Couple franco-allemand : Hollande et Merkel doivent travailler main dans la main
Édito
2 mai 2013
Alors que la soif de vengeance avait prévalu à la fin de la Première guerre mondiale, le souci de réconciliation l’avait emporté à l’issue de la seconde. Cette réconciliation avait permis à l’Allemagne d’être réintégrée dans la famille occidentale et à la France de sortir d’un relatif isolement.
Le moteur qui permettait à l’Europe d’avancer
La création d’un marché commun avait été mutuellement bénéfique. La coopération entre la France et l’Allemagne était le moteur qui permettait à l’Europe d’avancer.
De Gaulle-Adenauer, Giscard-Schmid, Mitterrand-Kohl puis Chirac-Schröder formaient des duos qui savaient faire taire leurs divergences pour s’accorder sur l’essentiel.
Il y avait par ailleurs un équilibre dans le déséquilibre entre la France et l’Allemagne. La France était autonome stratégiquement, forte de son arsenal nucléaire, ne craignant ni les États-Unis ni l’Union soviétique, l’Allemagne plus énergique économiquement était dépendante des États-Unis pour sa sécurité et craignait l’Union soviétique.
Contrairement à une légende tenace, Mitterrand ne s’est pas opposé à la réunification allemande. Il était trop pragmatique pour le faire et avait trop la perception de la force du sentiment national pour espérer pouvoir l’empêcher. Il a simplement tenu à la conditionner par la reconnaissance de la frontière avec la Pologne et une plus forte intégration européenne.
Le couple Merkel-Sarkozy a surtout initialement moins bien fonctionné. Angela Merkel trouvait Sarkozy trop agité, celui-ci trouvait la chancelière allemande trop prudente.
Un décrochage avec la France
Mais au-delà des sentiments personnels, ce qui s’est produit, c’est un décrochage entre la France et l’Allemagne. Celle-ci a anticipé sur les réformes, la réunification en a fait le pays européen le plus nombreux et a créé un décrochage avec la France.
Reconnue officiellement par le Traité de Nice de 2002 dans les institutions européennes, l’Allemagne compte plus que la France sur le plan économique et se porte mieux sur le plan stratégique. Elle a acquis son autonomie.
À l’issue de la crise, Angela Merkel s’est servie de Nicolas Sarkozy pour donner une coloration franco-allemande aux décisions qui étaient prises à Berlin. Après la réunification, on s’est interrogé sur le fait de savoir si on allait avoir une Allemagne européenne ou une Europe allemande. Les Allemands sont conscients que toute expression trop forte de nationalisme ou de volonté de leadership pourrait évoquer des souvenirs douloureux en Europe.
Les Grecs qui reprochent aux Allemands de ne pas être conscients des difficultés dramatiques auxquels l’austérité les a conduits, ont tôt fait de faire resurgir des souvenirs de la Seconde guerre mondiale. Les Allemands estiment qu’ils mènent une politique sage et prudente et qu’ils n’ont pas à payer pour les autres.
Lorsque François Hollande a été élu, il voulait s’appuyer sur l’Europe du sud pour faire comprendre en Allemagne que la rigueur n’était pas incompatible avec des mesures de relance. Lorsque Mario Monti était au pouvoir, il a réussi à faire passer son message, les incertitudes en Italie l’ont privé de précieux alliés.
De son côté Angela Merkel ne voulait pas changer de ligne politique avant les élections dans son pays, qui auront lieu en septembre.
Un changement avec Enrico Letta ?
Ces aléas du calendrier ont conduit à une mini-crise dans un document préparatoire du Parti socialiste. Angela Merkel a été qualifiée de "chancelière de l’austérité" et préconisait une grande confrontation avec la droite allemande, donc avec Angela Merkel. Si ce qu’écrit le Parti socialiste n’engage pas le gouvernement français, un lien était fait.
La droite française n’a pas manqué de fustiger le gouvernement. Jean-Marc Ayrault a consacré un tweet en allemand pour dire la nécessité de travailler ensemble et différents ministres français ont rappelé l’importance de la coopération entre la France et l’Allemagne.
D’ailleurs, pour 75% des Allemands le partenaire le plus important est la France, en sens inverse 80% des Français font de l’Allemagne le partenaire privilégié.
L’arrivée au pouvoir d’Enrico Letta en Italie vient un peu renforcer Hollande qui pourra faire valoir à Angela Merkel qu’il y a des pressions dans son pays et qu’il faut relâcher un peu les mesures les plus sévères d’austérité.
La France et l’Allemagne sont moins proches et leur union, si forte dans une Europe à douze, n’a plus le même pouvoir dans une Europe à vingt-sept. Elles ont néanmoins toujours besoin l’une de l’autre, leur intérêt national les conduit à travailler ensemble au-delà des divergences ponctuelles.