18.12.2024
Elections en Israël : quel bilan ?
Interview
23 janvier 2013
La première constatation est que le taux de participation a été exceptionnellement fort pendant cette élection, c’est d’ailleurs un record électoral depuis près de vingt ans. Cela s’est traduit, compte tenu du système électoral fondé sur la proportionnelle, par la nécessité d’obtenir plus de voix – pour obtenir un siège de député – qu’il n’en fallait pendant les dernières élections. C’est une des explications du mauvais score relatif recueilli hier par le parti de Netanyahou. La seconde constatation est que les jeux ne sont pas encore faits. Les bulletins de votes des militaires ne sont pas encore totalement dépouillés (ils finiront de l’être demain). Si on fait le point aujourd’hui, le bloc comportant le Likoud d’un côté et les partis de droite, que l’on peut qualifier de nationaux-religieux, remportent 61/62 sièges, soit une très courte majorité pour gouverner. Netanyahou sera à coup sûr le prochain premier ministre. Le troisième enseignement c’est la plutôt bonne performance des travaillistes et l’irruption sur la scène politique d’un parti centriste éminemment laïc, celui de Yaïr Lapid. Avec 19 sièges, il crée la surprise, davantage d’ailleurs que ce que laissaient présager les sondages. La question est de savoir maintenant si son parti réussira à perdurer.
Comment peut-on expliquer la percée de Yaïr Lapid ?
Il y a plusieurs explications possibles. La première, c’est que c’est quelqu’un de connu. C’est un journaliste célèbre en Israël, et lui-même fils de d’un journaliste reconnu qui avait essayé de se lancer en politique dans les années 90. Par ailleurs, il y a un besoin énorme dans le pays d’un renouvellement des courants politiques. La vieille classe politique israélienne est sanctionnée par la nouvelle génération qui considère qu’elle a échoué à innover en matière économique et sociale. La troisième explication est que le parti de Yaïr Lapid répond aux aspirations de la partie laïque de la population. Celle-ci souhaite mettre fin à la situation d’exception dont bénéficie le monde ultra-orthodoxe en Israël. C’est toute la question de cette fameuse loi mettant fin à l’autorisation qu’ont les ultrareligieux d’être exemptés du service militaire. C’est un vrai point de clivage en Israël.
La formation d’un gouvernement de coalition modifiera-t-elle la politique extérieure d’Israël ?
Pour l’instant ce que l’on peut dire c’est que la coalition sera certainement la plus large possible. C’est la seule possibilité pour Netanyahou d’avoir une véritable marge de manœuvre. La deuxième chose, c’est que les sondages ont montré pendant la campagne électorale que la situation économique et sociale était de très loin la question la plus importante pour les électeurs. Ainsi, en ce qui concerne l’Iran, seuls 10% des électeurs jugeaient que c’était un des sujets sur lesquels ils allaient déterminer leur vote. L’opinion israélienne n’est pas bien sûre indifférente aux questions de sécurité, mais en tout état de cause le prochain gouvernement n’aura pas beaucoup d’intérêt à modifier sa ligne en politique étrangère. Il est davantage attendu sur les questions économiques et sociales. Et si rien n’est fait dans ces domaines alors, incontestablement, le gouvernement actuel perdra les prochaines élections. Il faut se souvenir que ces élections sont anticipées, provoquées par le premier ministre lui-même pour deux raisons : la première réside dans la nécessité de trancher la question du service militaire obligatoire des ultra-orthodoxes ; la seconde concerne la question du budget. Netanyahou ne pouvait pas faire passer sa proposition de budget 2013 avec la composition politique de la Knesset précédente. Il a donc choisi de la dissoudre pour se doter d’une majorité susceptible de le suivre dans sa politique économique et sociale, c’est là qu’il a échoué hier.