21.11.2024
Brésil : Retombées internationales des présidentielles du 31 octobre
Tribune
3 novembre 2010
L’enjeu des présidentielles au-delà des personnalités en présence, Dilma Rousseff (PT) et José Serra (PSDB), opposait deux projets d’insertion internationale sensiblement différents. L’un, celui qui a finalement perdu, celui du PSDB et de José Serra, se situait dans la logique qu’avait suivie avant 2002 le président PSDB, Fernando Henrique Cardoso. Le Brésil du PSDB est un pays occidental. Il doit privilégier ses rapports avec les pays membres de l’OCDE. Le président Cardoso avait en particulier recherché un rapport préférentiel avec le Royaume-Uni de Tony Blair. Dans cet ensemble occidental le Brésil doit soutenir les secteurs exportateurs à même de jouer gagnant sur les marchés internationaux, privilégier une insertion compétitive. L’Amérique du sud dans un tel contexte est relativement secondaire. Le Marché commun du Sud (Mercosur/Mercosul) et son tarif douanier commun est, comme l’a déclaré José Serra, plus un handicap qu’un atout. Le partenariat avec la Chine, la recherche de marchés complémentaires en Asie, dans le monde arabe, en Iran, ont été de la même manière critiqués par FHC et J. Serra. La critique économique s’est doublée d’une critique idéologique. Le Brésil aurait plus à perdre qu’à gagner à s’occuper de dossiers diplomatiques compliqués, traités par les « 5 Grands », Proche-Orient, Iran, voire Haïti. Les rares prises de position du PSDB sur les questions internationales, pendant la campagne électorale, ont durci la critique à l’égard de la diplomatie active et universelle pratiquée par Planalato (=la présidence), et Itamaraty (=les affaires étrangères), ces derniers temps. Elles présentaient les initiatives prises par le Brésil sur le dossier iranien par exemple comme celles d’un pays ayant fait le choix d’une alliance privilégiée avec un régime stigmatisé par les membres permanents du Conseil de sécurité. L’intervention du pape, Benoît XVI, dans la campagne électorale, pour condamner à la veille du deuxième tour ceux qui défendent l’avortement, ont complété l’option occidentalo-chrétienne du PSDB.
La victoire de Dilma Rousseff, candidate du PT, est donc aussi celle d’une continuité diplomatique. Elle est en effet celle d’un projet pays mis en œuvre depuis le 1er janvier 2003, qui vise à conforter de façon concrète l’émergence internationale du Brésil. Un Brésil qui a fait le choix d’un monde rompant avec les modes de fonctionnement hérités de la deuxième guerre mondiale, et qui parie de façon concrète sur la multilatéralité. La victoire électorale de la candidate du PT, le 31 octobre 2010, donne une dimension inédite à cette ambition, en l’inscrivant dans la durée. Le conseiller international du président sortant, Marco Aurelio Garcia, l’a clairement exprimé dés le 1er novembre au petit matin. « Ces dernières années », a-t-il déclaré, « le Brésil a acquis un poids extérieur. Avec Dilma le Brésil aura une politique latino-américaine très active. Et il ne cessera pas non plus de faire entendre sa voix sur d’autres thèmes et conflits de nature mondiale ».
(1) Pour plus de précisions voir, « Relations internationales du Brésil, les chemins de la puissance », ouvr. Collect, coord., Denis Rolland et Antonio Carlos Lessa, Paris, L’Harmattan, 2010