13.12.2024
La France en Afrique : un déclin relatif ?
Édito
7 mars 2023
Le président Macron vient de terminer une tournée dans les pays africains après avoir prononcé à l’Élysée un discours qui se veut fondateur sur les relations entre la France et l’Afrique. Il a notamment déclaré qu’il voulait mettre fin à la « Françafrique ». Derrière ce vocable se cachent des relations postcoloniales teintes de clientélisme, voire de corruption, entre dirigeants africains et dirigeants français. La France a longtemps été considérée comme le « gendarme de l’Afrique ». Ce temps est révolu. Mais pour autant, la France ne peut pas ne pas avoir de politique à l’égard Afrique, tout simplement du fait de l’importance du continent, de plus en plus affirmée sur la scène mondiale et du fait que de plus en plus de pays sont actifs en Afrique.
Ce qui est constaté, c’est un déclin relatif de l’influence française sur le continent, avec notamment le rejet spectaculaire de la présence militaire de la France au Mali et au Burkina Faso par les nouveaux pouvoirs militaires en place à Bamako et Ouagadougou. Mais, un peu partout, il y a un affaiblissement de l’attractivité de la France. La part de la France dans le commerce africain est tombée de 10 à 5% en un quart de siècle. Il y a une montée en puissance des appétits des autres puissances pour l’Afrique. Le continent, qui était abandonné dans les années 1990, est désormais courtisé de partout : la Chine, le Japon, les États-Unis, la Russie, la Turquie ou encore les Émirats arabes unis… De nombreuses puissances ont développé une politique africaine. Le problème de la France réside certainement dans le fait qu’elle a, aux yeux des pays africains, perdu une partie de sa spécificité. Elle apparaît plus comme une puissance dans la recherche de la cohésion et de la cohérence européenne ou Atlantique, que comme un pays menant une diplomatie originale. Elle se distingue nettement moins des autres pays occidentaux qu’à l’époque de De Gaulle ou de Mitterrand ou Chirac.
Les restrictions de visa, la lutte contre les flux migratoires et les discours de politique intérieure de certains responsables politiques hostiles à l’islam ou à l’immigration sont également vécus de façon négative à travers le continent africain. Des déclarations intempestives souvent faites pour des motifs de politique intérieure ont des conséquences négatives sur l’image de la France en Afrique.
La France est par ailleurs accusée d’être parfois trop donneuse de leçons en matière de démocratie et de droits de l’homme, mais de le faire à géométrie variable. On accepte un pouvoir militaire au Tchad. On le condamne au Mali. Cela n’apparait pas cohérent. Le fait de proclamer la fin de la Françafrique est tout sauf neuf. Nicolas Sarkozy et François Hollande l’avaient déjà fait. Et même George Pompidou, président de 1969 à 1974, l’avait déjà évoqué. La France est prisonnière des liens anciens : elle soutient des dirigeants qui sont au pouvoir pour certains depuis plus de 40 ans et qui sont contestés par la jeunesse, mais il est bien sûr difficile de rompre des liens.
Le fait, après avoir annoncé la fin de la Françafrique, de se rendre au Gabon où la famille Bongo est au pouvoir depuis 1973 ou au Congo-Brazzaville, où Sassou Nguesso dirige le pays depuis plus de 40 ans, passe mal auprès de la jeunesse africaine.
Dans le cas spécifique de la République démocratique du Congo, on reproche à la France de ne pas condamner suffisamment le Rwanda qui pille le pays par le biais du groupe armé M-23, et de se montrer intransigeante sur les atteintes à la souveraineté ukrainienne par la Russie.
Un journaliste africain a demandé au président Emmanuel Macron « Pourquoi le mot « agression du Rwanda » est tabou pour vous ? ». En réalité, du fait de l’instrumentalisation de la mémoire du génocide par Paul Kagamé, la France, comme les pays occidentaux, ont du mal à le contrer publiquement.
L’Afrique est pour la France un enjeu majeur. Il faut relancer de véritables partenariats et éviter de se poser en donneur de leçon.