20.12.2024
L’Europe victime collatérale de l’invasion de l’Ukraine par la Russie ?
Presse
19 juillet 2022
La réunion de négociation du 29 mars 2022 à Istanbul avait pu paraître poser les bases d’un éventuel règlement, même si les « progrès » qu’ont cru déceler les négociateurs russes, Medinsky et l’« oligarque » facilitateur Abramovitch, ont été démentis aussitôt après la réunion par le porte-parole du Kremlin… Selon la Russie, et comme déjà annoncé antérieurement par les autorités russes, le règle- ment devrait traiter les questions suivantes : neutralisation de l’Ukraine, statut pour les républiques autoproclamées de Donestk et Lougansk, reconnaissance de l’annexion de la Crimée et surtout « dénazification » du pays.
Pour la première fois, le négociateur ukrainien David Arakhamia, s’appuyant sur des déclarations antérieures du Président Zelensky, avait repris ces thèmes tout en soulevant les questions dont les réponses conditionnaient selon lui tout règlement.
Qui garantira l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine une fois celle-ci « neutralisée » ? L’expérience malheureuse du mémorandum de Budapest de 1994 par lequel la Russie, les États-Unis et le Royaume-Uni garantissaient l’intégrité territoriale de l’Ukraine en échange de sa renonciation aux armes nucléaires stationnées par l’Union soviétique sur le territoire ukrainien, incite Zelensky à demander des garanties autrement plus solides aux membres permanents du Conseil de sécurité, à la Turquie, à Israël, à la Pologne… avec un mécanisme proche de l’engagement automatique de l’article 5 de l’Otan. Mais l’Ukraine avait accepté de parler de la neutralisation du pays.
Autre ouverture de Kiev : la définition du statut de Donetsk, de Lougansk et de la Crimée pourrait être repoussée de quinze ans ; on voit mal en effet après les souffrances infligées au peuple ukrainien et de longues semaines de guerre, le gouvernement ukrainien accepter aujourd’hui les concessions demandées par la Russie (notamment sur le Donbass et la Crimée). D’ailleurs, le Président Zelensky lui-même a indiqué qu’après les sacrifices de son peuple, seul un référendum populaire pouvait entériner les résultats éventuels de la négociation et les compromis qu’il pouvait impliquer, ce qui frappe d’une relative précarité la marge de manœuvre du négociateur ukrainien. De toute façon, le flou demeure sur les frontières revendiquées par les républiques autoproclamées de Donetsk et Lougansk ainsi que par la Russie (toute la province du Donbass, la côte de la mer d’Azov et le Sud de l’Ukraine jusqu’à Kherson ?). De même, les véritables ambitions territoriales de la Russie ne sont-elles pas claires dès lors que l’insuffisance de ses résultats militaires exclut toute possibilité de conquérir l’Ouest du pays. Moscou souhaite-t-il prendre des gages substantiels avant de négocier ou s’apprête-t-il à conquérir toute la rive gauche du Dniepr, voire plus, pour dicter ses conditions au risque assumé de s’installer durablement dans un nouveau conflit ?
Enfin reste la question épineuse de la « dénazification » exigée par la Russie. Cette demande qui est au centre du récit russe, justificatif de l’invasion de l’Ukraine, pourra-t-elle être traitée au niveau symbolique ? Moscou se contentera-t-il du démantèlement du régiment Azov déjà entamé avec la prise de Marioupol et peut-être de l’interdiction de certains partis ? Mais il est clair que Kiev, pas plus que les Occidentaux, n’accepteront de donner aux Russes un droit permanent de surveillance sur le fonctionnement des institutions ukrainiennes.
Quoi qu’il en soit, cette première amorce de négociation a été rapidement bloquée. Tant les négociateurs russes que ceux ukrainiens ont été discrètement désavoués, et de nouvelles propositions ukrainiennes, moins ouvertes notamment sur la Crimée, auraient été transmises, aux autorités russes qui se sont plaintes de ces changements de pied. Le chancelier autrichien Karl Nehammer est sorti le 11 avril de ses entretiens avec Poutine avec l’impression qu’il n’y avait aucune « perspective encourageante », et Vladimir Poutine a déclaré lors d’une conférence de presse commune avec le Président biélorusse Loukachenko, le 12 avril, que les Ukrainiens n’étaient pas des interlocuteurs fiables et que la Russie atteindrait ses « buts » . Les négociations ont de facto été suspendues, ouvrant la voie à l’opération majeure toujours attendue dans le Donbass.
Du côté russe, le chef adjoint de l’état-major avait en effet annoncé dès le 25 mars la réorientation du dispositif militaire russe, désormais concentré sur le Donbass (où se trouve la majeure partie de l’armée régulière ukrainienne), en pré- vision de nouvelles batailles. Du côté ukrainien, le Président a demandé de ne pas se laisser endormir par l’allègement de la pression sur Kiev et de continuer le combat. Il a renouvelé ses appels à intensifier l’aide militaire internationale pour faire face à l’offensive russe. En dehors de cessez-le-feu partiels pour permettre par exemple l’aménagement de corridors humanitaires afin d’évacuer les civils, comme à Marioupol le 1er avril, il n’y aura pas de cessez-le-feu généralisé avant de longues semaines pendant lesquelles la Russie cherchera à prendre le maximum de gages avec le cortège de violences et de souffrances que cela implique. De plus, à mesure que les destructions et les morts ukrainiens s’accumulent, que les exactions russes, doublant des résultats militaires mitigés, accroissent l’opprobre dont Moscou fait l’objet, les compromis deviennent plus difficiles et la sortie du conflit s’éloigne d’autant.
Même si les bases d’un accord sont en gros posées, c’est donc plutôt à l’intensification des activités militaires que chacun se prépare.
Mais les Russes seront forcés de se rendre à l’évidence : portée sur les fronts baptismaux par la guerre patriotique, par la mobilisation populaire à l’ouest comme à l’est russophone, par un Président charismatique et par le tribut sanglant payé à l’envahisseur, une véritable Nation ukrainienne est née et celle-ci sera hostile à la Russie. Ce conflit est destiné à durer.
L’invasion de l’Ukraine pèsera lourdement sur l’avenir de la Russie
La Russie sortira de cette guerre profondément et sans doute durablement affaiblie. Certes, Moscou a pu enregistrer un relatif soutien de la part des pays extérieurs au bloc atlantique, un simple coup d’œil sur la carte des pays qui n’appliquent pas les sanctions suffit à s’en persuader. Mais la Russie, sans parler d’éventuelles convulsions politiques, est entrée après l’invasion de l’Ukraine dans une période de précarité économique suscitée par les sanctions très lourdes et par la réduction planifiée des achats occidentaux d’hydrocarbures russes. La récession (-11,2 % prévus en 2022 par la Banque mondiale), l’explosion de l’inflation (22 %, toujours selon la Banque mondiale), la chute du rouble et de la Bourse, la hausse du taux d’intérêt directeur (redescendu cependant à 17 % à la mi-avril) qui pénalise l’investissement, la fuite des cerveaux en réaction à une société de plus en plus autoritaire et répressive (on parle de 200 000 émigrés depuis l’invasion), les difficultés croissantes d’approvisionnement en équipements et technologies occidentales, risquent de marquer les prochaines années.
La capacité d’adaptation des Russes est grande mais, une fois passé le sursaut unanimiste enregistré en faveur de Poutine (environ 80 % de popularité selon les derniers sondages), comment réagiront-ils, après une baisse ininterrompue du pou- voir d’achat depuis dix ans, en constatant qu’il n’y aura pas de « bout du tunnel » ni d’effet rebond de la crise de la Covid ? Malgré les nombreuses mesures de soutien à l’économie, la Banque mondiale prévoit une croissance inférieure à 1 % en 2023 et n’envisage pas le retour à la croissance d’avant la crise qu’au bout de dix ans.
Surtout, la Russie risque de se couper de ses sources intellectuelles et spirituelles qui sont européennes. Ce rideau de fer d’un nouveau genre (pour la première fois les sanctions s’étendent au monde culturel) l’éloigne du reste de l’Europe et la met dans les mains d’une Chine réticente. Il faudra en tout cas du temps pour réorienter, au prix de nombreuses difficultés, une économie russe eurocentrée : l’Union européenne était encore en 2020 le premier partenaire économique de la Russie devant la Chine.
Une Russie, plus pauvre, moralement décrédibilisée, intellectuellement et physiquement désertée par une partie de ses élites, coupée du reste de l’Europe et jugée menaçante, grèvera l’évolution de tout le continent européen. Sans doute parce que le traitement de la question ukrainienne, au-delà de préoccupations de sécurité, de prospérité ou d’influence, obéit en Russie, au moins au sein des cercles dirigeants, à des considérations « impériales » en partie affectives et irrationnelles. La Russie a pris le risque de rétrograder dans l’ordre mondial de la puissance économique, de l’influence politique et du rayonnement culturel. Son isolement du reste de l’Europe risque d’être durable.
L’Union européenne perd de son autonomie politique et économique
On savait que l’Union européenne de son côté avait du mal à devenir un acteur de la définition de son propre destin. Le choc salutaire provoqué par la « défection » de l’allié américain incarné par l’ex-Président américain Trump, a été rapidement surmonté avec l’arrivée du Président Biden qui a resserré les rangs occidentaux, à la satisfaction de tous.
L’incapacité de ses parrains européens français et allemands à mettre en œuvre l’accord de Minsk 2 sur le Donbass témoignait déjà de la faiblesse des Européens dans la gestion d’un dossier où ils avaient pourtant la main. Un signal d’alerte avait été enregistré lorsque, après le Sommet Biden-Poutine du 16 juin 2021 à Genève, les dirigeants allemands et français, arguant qu’on ne pouvait laisser Russes et Américains discuter du sort de l’Europe, par-dessus la tête des intéressés, avaient proposé au Conseil européen de fin juin de prendre une initiative vis-à-vis de la Russie. Or, la plupart des États-membres se sont estimés satisfaits de confier leur sécurité et leur politique étrangère aux États-Unis.
L’invasion de l’Ukraine n’a pas suscité de changement dans cette approche partagée par une majorité d’États-membres. En dehors de l’alourdissement des sanctions économiques et politiques contre l’agresseur, sur lesquelles les Européens ont toujours manifesté leur unanimité, la définition d’une diplomatie active dans la crise ukrainienne (sauf sur les sanctions et les livraisons d’armes à l’Ukraine via le Fonds européen pour la paix) ou d’une politique de défense commune n’ont pas vraiment avancé. Au contraire, le parapluie de l’Otan a été jugé plus que jamais nécessaire après l’agression russe contre l’Ukraine, et la responsabilité de négociations éventuelles avec Moscou a été déléguée implicitement et pour plus tard à Washington.
Les tentatives du Président français, par exemple, de maintenir un canal de négociation avec Poutine ont été jugées incongrues voire traîtresses (déclarations du Premier ministre polonais Morawiecki…). Il ne faut pas s’étonner que les intermédiaires, facilitateurs ou médiateurs ne soient plus les Européens, d’ailleurs désormais considérés comme « inamicaux » à Moscou ; turcs, israéliens, biélorusses voire chinois s’empressent de proposer leurs bons offices… Force est de reconnaître que les Russes n’ont rien fait de sérieux pour répondre aux tentatives du Président français : bien que saluées du bout des lèvres à Moscou, celles-ci n’ont pas eu de suites si ce n’est peut-être indirectement les corridors humanitaires de Marioupol décidés à Istanbul et qui rentrent de toute façon dans la stratégie russe (vider les villes pour les prendre plus facilement).
La faiblesse du communiqué du Sommet européen de Versailles du 11 mars manifeste un consensus a minima. L’approbation de la « Boussole stratégique » et la référence à une politique européenne d’investissements dans le domaine militaire, n’ont pas dissuadé l’Allemagne d’acheter avec un nouveau budget de défense « regonflé », des chasseurs américains F-35 mettant en danger le projet franco- allemand Scaf, ni Airbus d’équiper son « Euro (!) » drone de moteurs américains au lieu de choisir le français Safran.
Conduits à réorienter leurs flux énergétiques pour des approvisionnements plus coûteux que le gaz naturel russe (gaz naturel liquéfié américain…), à sacrifier progressivement à mesure que la guerre se prolonge leurs investissements considérables en Russie (la France et l’Allemagne, les deux premiers investisseurs en Russie, sont les principales perdantes avec chacune environ 20 milliards d’investissements en stock progressivement revendus à bas prix), à réduire leurs échanges commerciaux, à se passer des matières premières russes, les Européens subiront plus que d’autres les conséquences économiques des sanctions contre la Russie.
Déjà, la France avait vu ses échanges diminuer de moitié, de 20 milliards en 2011 à 10 milliards d’euros en 2015 après les premières vagues de sanctions. Elle doit maintenant se défaire à bon marché de ses positions sur le marché russe : les magasins Décathlon, les usines de Renault AvtoVaz, la banque Rossbank- Société Générale sont bradées. L’Allemagne, qui avait vu diminuer ses échanges de près d’un tiers, passant de 58 milliards d’euros à 41 milliards entre 2012 et 2015[1] résiste un peu mieux en évitant l’interruption brutale de ses approvisionnements en gaz et en sauvant la présence des investissements de ses grosses PME moins visibles que les multinationales françaises. La Chine a au passage bénéficié de ce retrait passant à environ un quart des importations russes en 2021 (contre 18 % en 2015).
En fait, les sanctions occidentales contre la Russie pèsent essentiellement sur l’Union européenne, profitent à la Chine et ne coûtent rien aux États-Unis, partenaire économique mineur de la Russie. Ceux-ci substituent au contraire leur gaz de schiste liquéfié aux importations de gaz russe progressivement interrompues par l’Europe. Avec le marché russe, c’est un champ de développement économique majeur que l’Union européenne perd pour les décennies à venir. Sa croissance et sa prospérité devraient s’en ressentir.
L’Union européenne voit aussi son statut international se dégrader
Mais surtout de nombreux pays, et non des moindres, Inde, Indonésie, Brésil… sont tentés de juger l’Union européenne comme totalement subordonnée à un bloc occidental engagé dans une lutte contre la Russie et la Chine. L’Occident est accusé de vouloir diffuser son modèle de civilisation pour étendre son influence. Après les bombardements de la Serbie en 1999, l’invasion de l’Irak en 2003 ou l’intervention en Libye en 2011, les valeurs mêmes que cherche à promouvoir l’Europe, sont considérées avec un certain scepticisme dès lors qu’elles apparaissent invoquées de façon sélective. Déjà bloqué par les « veto » des grandes puissances, le système de l’ONU souffre de ce relatif discrédit. En marge de la confrontation sino-américaine, une sorte de nouveau tiers-monde est en train de se constituer, autrement plus revendicatif et plus puissant.
En dehors du bloc atlantique, la modération des réactions à une agression caractérisée de la Russie contre un pays plus faible représenté à l’ONU, ne peut s’expliquer en effet que par le sentiment qu’il s’agit d’un nouvel avatar de la guerre froide et par les réticences inspirées par l’ordre international issu de la chute de l’URSS et que l’on espère ébranler. La crise ukrainienne aura accéléré la restructu- ration du monde à la fois autour d’une confrontation États-Unis/Chine, où l’Union européenne n’a d’autre choix que d’être dans le camp américain malgré des intérêts parfois divergents, et où la Russie sera dans le camp chinois, et autour de l’émergence de nombreuses puissances assez fortes dans ce nouveau cadre pour faire entendre leurs voix, défendre leurs intérêts et contester au besoin la légitimité d’un ordre international jugée d’inspiration occidentale et en partie caduc.
À part les alliés des États-Unis, l’écrasante majorité des membres de l’ONU n’a pas souhaité dans leur résolution du 2 mars « condamner » l’agression de la Russie, se contentant, au terme d’âpres discussions, de la déplorer « dans les termes les plus énergiques » et d’« exiger » le retrait des forces russes d’Ukraine à une majo- rité certes confortable (141 voix), mais qui reflétait la prudence des termes choisis. Aucun pays africain, aucun pays d’Amérique du Sud (excepté la Colombie, le Paraguay et l’Équateur), aucun pays asiatique (en dehors du Japon) n’a pris de sanctions contre la Russie. La suspension de la Russie du Conseil des droits de l’homme de l’ONU après la découverte d’exactions dans les territoires ukrainiens occupés, n’a rallié le 7 avril qu’une faible majorité d’États-membres (93 contre 24 dont la Chine, 58 abstentions dont l’Inde et le Brésil avec 21 « absents »).
Dans le climat de tension durable qui s’annonce en Europe et animée par le sentiment de la nécessité absolue d’une solidarité stratégique avec les États-Unis face à l’aventurisme russe, l’UE aura de plus en plus de mal à mettre en œuvre son « autonomie stratégique ». En l’absence d’une « architecture de sécurité et de confiance européenne », projet français déjà bien malade et définitivement mis à mal par l’invasion russe, l’Europe risque de manquer le virage de la multipolarité. Non seulement elle jouera un rôle réduit dans la restructuration en cours de la géo- politique mondiale, mais en plus, elle risque de devenir insensiblement un « théâtre secondaire » dans la confrontation sino-américaine.
Pour la première fois en effet dans l’histoire du monde, la Chine est inter- venue sur la scène européenne. Elle a jugé « légitime » la demande russe de mettre fin à l’extension de l’Otan à l’est de l’Europe, elle a discuté directement avec les États-Unis sur le degré de soutien économique qu’elle apporterait à la Russie, elle déterminera en grande partie le degré de résistance économique de la Russie, elle sera peut-être la seule, le moment venu, à pouvoir exercer une influence modéra- trice sur le Kremlin.
L’Europe qui croyait, encore il y a peu, pouvoir intervenir partout dans le monde, au Moyen-Orient, en Afrique, en Asie pour tenter de régler les crises, apai- ser les conflits, lutter contre le terrorisme, promouvoir la démocratie et le respect des droits de l’homme, devient le théâtre d’un affrontement sanglant et de plus en plus sauvage sur lequel se penchent des puissances tierces bien intentionnées, de la Turquie à la Chine en passant par Israël… En attendant que les États-Unis, inquiets d’une escalade qu’ils ne maîtrisent pas (comme l’avait prévu Obama dans son entretien d’avril 2016 à The Atlantic), ne se décident à calmer le jeu comme ils l’avaient fait dans les Balkans, après des années de guerre, avec les Accords de Dayton de 1995.
La France s’était longtemps fait l’avocat d’une Europe tenant pleinement son rôle dans un monde de plus en plus multipolaire. L’agression russe contre l’Ukraine remet brutalement l’Union européenne à une place géopolitique mineure dont elle aura de plus en plus de mal à sortir à mesure que le conflit en Ukraine se prolongera.
Publié sur Geostrategia.