12.11.2024
Mexique, première sortie internationale du président Andrés Manuel López Obrador
Presse
13 mai 2022
Logique, il l’est, dans la mesure où AMLO a publiquement signalé, et ce de façon répétée, son attachement à l’unité des Amériques. Exceptionnel puisqu’il n’a depuis le 1er décembre 2018, date de sa prise de fonction, voyagé à trois reprises que dans les seuls États-Unis d’Amérique du Nord. AMLO est un président qui a rompu avec les rituels diplomatiques de ses prédécesseurs. Fidèle à son éthique il considère que visiter ses homologues coûte cher. Et que cet argent mérite une meilleure affectation, profitable aux plus humbles.
Dès son arrivée au pouvoir il a donc mis en vente l’avion présidentiel et la flotte aérienne ministérielle. La décision est restée virtuelle, l’avion ne trouvant pas preneur. Mais AMLO a pu ainsi valider publiquement son refus de gaspiller l’argent des impôts en tourisme politique. Son antécesseur, Enrique Peña Nieto, qui se déplaçait avec une suite de plusieurs dizaines de personnes, avait été épinglé par la presse. AMLO ne s’est jamais interdit pour autant d’afficher des idéaux américanistes, sur fond de rappels historiques renvoyant au nationalisme mexicain, forgé au fer et au feu des invasions étrangères, espagnoles, étatsuniennes et françaises.
Il l’a dit et répété à ceux qui ont assisté, le 18 septembre 2021, à Mexico au VIème sommet de la Communauté des États latino-américains et de la Caraïbe (CELAC). Il l’a exprimé à chacun de ceux qui ont frappé à sa porte. Les présidents argentin, Alberto Fernández ; boliviens, Evo Morales et Luis Alberto Arce : colombien Ivan Duque ; cubain, Miguel Díaz Canel ; chilien, Sebastian Piñera ; équatoriens, Lenín Moreno et Guillermo Lasso ; guatémaltèque, Alejandro Gianmmattei Falla ; hondurien, Juan Orlando Hernández Alvarado ; paraguayen, Mario Abdo Benítez ; péruvien, Martín Vizcarra ; salvadoriens, Salvador Sánchez Cerén et Nayib Bukele ; uruguayen, Luis Lacalle ; vénézuélien, Nicolas Maduro. Tout comme à Inacio Lula da Silva, ex-président brésilien et candidat aux élections du 1eroctobre 2022.
Visiter cinq pays latino-américains, bien que tardivement, est dans l’ordre des choses. Pourtant et AMLO l’a reconnu, il lui fallait rééquilibrer son agenda extérieur. Après trois voyages aux États-Unis, « j’ai très envie », avait-il dit le 10 janvier 2022, « d’aller voir nos frères les plus voisins. Le sud me manque ». C’est donc aujourd’hui chose faite avant un nouveau départ pour Los Angeles où se tient les 6 au 10 juin prochains 9e sommet des Amériques. Ces alternances aériennes et diplomatiques interpellent. Certains observateurs ne retiennent que la partie sud de ces déplacements. Ils placent donc AMLO dans une case bolivarienne et latino-américaine militante. D’autres critiquent la contradiction qui existerait entre un discours volontiers anti-impérialiste et une politique extérieure aimable à l’égard de Washington et de ses présidents.
Les faits imposent une double vérité. AMLO est tout à la fois nationaliste en propos, parfois en actes, et conciliant avec les États-Unis dans le concret, et souvent en paroles. À Cuba il a défendu la légitimité de la présence de La Havane au Sommet des Amériques, exclue par Joe Biden. Au Guatemala, au Salvador, au Honduras et à Belize il a offert une aide financière, coordonnée avec les États-Unis afin de réduire les flots de migrants en marche vers le Rio Grande. AMLO a par ailleurs balisé un étranger proche qui a depuis toujours beaucoup compté pour les autorités mexicaines, qu’elles aient été dans le passé, impériales, républicaines, ou plus récemment, Parti d’Action Nationale (PAN), Parti de la Révolution Institutionnelle (PRI) et aujourd’hui Mouvement de Rénovation Nationale (MORENA).
Cette sortie internationale bien qu’exceptionnelle, a donc des résonances intérieures fortes. AMLO a visité du 5 au 8 mai 2022 un étranger limitrophe, interférant dans la relation du Mexique avec les États-Unis. Washington, qui cherche, à réduire les flux migratoires centraméricains et mexicains, exerce de façon pérenne des pressions sur le Mexique, incité à faire la police à ses frontières nord et sud.
Le voyage d’AMLO a de façon significative été préparé en concertation avec la Maison-Blanche et le Secrétariat d’État des États-Unis. Les deux gouvernements, au terme de plusieurs réunions préparatoires, ont annoncé le 1er décembre 2021 un plan conjoint d’aide à l’Amérique centrale, appelé, Sembrando oportunidades (Semer des opportunités). AMLO a visité ses voisins, en compagnie de ses ministres gardiens des frontières, relations extérieures, défense, et marine militaire. Le Mexique a signalé qu’il accepterait d’accueillir les Cubains et Nicaraguayens expulsés des États-Unis. Mais AMLO, a rappelé à Washington la nécessité de compenser par une ligne financière significative, les contreparties policières attendues du Mexique et des Centraméricains.
AMLO a d’autre part réaffirmé sa conception américaniste de l’intégration. Le Mexique est un pays cherchant à instrumentaliser positivement ses faiblesses, en jouant le rôle d’un pays charnière, entre États-Unis et Amériques latine. Cette approche concorde avec son attachement au renforcement de l’Alliance du Pacifique, organisation libre-échangiste pourtant créée par les présidents mondialistes, du Mexique, de Colombie, du Pérou et du Chili en 2011. AMLO a dés l’élection de Gabriel Boric au Chili dépêché à Santiago, son Secrétaire d’État, Marcelo Ebrard le 5 janvier 2022, pour lui signaler l’importance de cette Alliance. Toutes choses permettant de contextualiser son attente pressante de voir Cuba rejoindre la conférence des Amériques, dès juin 2022, à Los Angeles.