21.11.2024
Joe Biden, un an après : deux doigts de réussites et une bonne dose de déceptions
Presse
20 janvier 2022
Il convient d’abord de rappeler que l’opinion favorable à l’égard du président est traditionnellement, aux Etats-Unis, assez forte, beaucoup plus qu’en France par exemple, et que 42% est un chiffre faible et donc inquiétant pour le locataire actuel de la Maison Blanche. Donald Trump fut confronté au même déficit de popularité pendant quatre ans, ce qui semble indiquer que la polarisation de la vie politique américaine est devenue telle que le président en exercice ne parvient pas à rassembler des soutiens au-delà de son camp. C’est fâcheux quand on sait que Joe Biden avait fait de la réconciliation le grand thème de sa campagne, fustigeant les divisions incarnées par Trump. Un an après son arrivée à la Maison Blanche, on constate que ces divisions restent très fortes, et si le président ne peut être considéré comme le seul responsable, il s’est également montré incapable de les réduire. Joe Biden a donc échoué dans cette quête à la réconciliation, et son bilan est décevant sur ce point, jusqu’à donner l’impression que l’administration reste obsédée par la précédente et la volonté de déconstruire l’héritage de Donald Trump, plutôt que de se focaliser sur les nombreux défis actuels. Ajoutez à cela un bilan économique en demi-teinte, une diplomatie maladroite et un leadership souvent critiqué, plus l’activisme de Donald Trump et son influence chez les conservateurs et vous avez tous les ingrédients d’une présidence en manque de légitimité. Les élections mi mandat, en novembre prochain, confirmeront si rien ne change d’ici là les profondes divisions partisanes, mais aussi l’échec de la réconciliation promise par Biden.
Qu’en est-il de son bilan en termes de politique extérieure ? Le désastre Afghan est-il sa plus grande erreur ?
La politique étrangère de Joe Biden, qui a la particularité d’être un fin spécialiste de ces questions, le plus expérimenté à ce poste depuis George Bush père, donne l’impression d’une multiplication d’hésitations et de maladresses. Le dossier afghan est ici intéressant, pas parce qu’il s’agirait d’un désastre pour lequel blâmer Biden (ses deux prédécesseurs avaient pris l’engagement d’un retrait avant lui), mais plutôt dans la méthode. Des alliés peu consultés, l’absence de perspectives, et la fin confirmée d’un exceptionnalisme américain qui avait placé, depuis la fin de la Guerre froide, ce pays en position de force dans la résolution des conflits. La question la plus importante reste cependant celle-ci: le monde est-il plus sécurisé aujourd’hui qu’il y a un an? La réponse est malheureusement non, et si les Etats-Unis n’en sont pas les seuls responsables, l’administration Biden porte une lourde responsabilité. Tensions avec la Chine, création de l’Aukus au mépris des règles les plus élémentaires de la diplomatie et du respect des alliés, une gestion de la question ukrainienne qui nous ramène quarante ans en arrière… le bilan n’est pas bon, et les tensions internationales sont très fortes. Biden était attendu dans son rôle de diplomate et de pacificateur, il doit encore prouver que son administration est à la hauteur.
Le président Joe Biden est-il toujours pris aux sérieux aux États-Unis et dans le monde ?
Les États-Unis sont et resteront pris au sérieux dans le monde, quel qu’en soit le dirigeant. Mais le monde a-t-il confiance dans les Etats-Unis? Sans doute
Moins aujourd’hui qu’il y a une vingtaine d’années. Là encore, Biden n’est pas à blâmer, mais il n’est jusqu’à présent pas parvenu à restaurer la nécessaire confiance en un leadership américain fort. Les récentes rencontres entre Wang Yi, ministre chinois des affaires étrangères et des responsables des pays du Golfe indique que même dans cette région du monde, où le leadership américain était hier encore une évidence, Washington doit désormais accepter la compétition et donc un déclin relatif mais réel. En Asie, le positionnement américain questionne plus qu’il ne rassure. En Afrique, Washington n’existe quasiment plus sur la scène diplomatique, et en Amérique latine les crispations se maintiennent. En Europe enfin, les espoirs accompagnant l’arrivée au pouvoir de Biden, après une présidence Trump qualifiée de méprisante pour les Européens, laissent place à la désillusion. Ici comme ailleurs, Joe Biden est pris au sérieux, comme l’était Donald Trump, en raison de la puissance du pays qu’il dirige. Mais cela ne veut pas nécessairement dire que le monde lui fait confiance.
Par ailleurs, quelles sont les réussites que l’on peut attribuer au président Joe Biden ? Quels sont les bons points du début de mandat de Joe Biden ?
Les intentions du président américain restent bonnes sur plusieurs sujets dont l’importance est évidente. D’abord le retour de Washington dans les instances internationales, qui contraste avec la vacance du multilatéralisme des années Trump. Mais surtout l’engagement des États-Unis dans la lutte contre le réchauffement climatique, qui contraste là aussi avec l’administration Trump. Cela confirme l’idée selon laquelle c’est la maladresse plus que les intentions qui doit être tenue responsable du bilan en demi-teinte de la première année de l’administration Biden.
Propos recueillis par Atlantico.