21.11.2024
États-Unis : est-ce la fin des ambitions réformatrices de Joe Biden ?
Presse
23 décembre 2021
La défection de Joe Manchin est vue à juste titre par la Maison-Blanche comme une trahison, les engagements n’ont pas été tenus. C’est un coup dur pour Joe Biden et sa majorité, mais on ne peut pas dire qu’il a échoué. Les démocrates et la Maison-Blanche disent que les négociations vont reprendre pour parvenir certainement à un plan moins ambitieux, mais qu’ils souhaitent quand même faire passer d’ici à un an. Les négociations sur ce plan Build Back Better (« Reconstruire en mieux ») vont porter notamment sur la partie sociale : la baisse du prix des médicaments, les aides à la garde d’enfants… Le plan devra probablement être tronçonné en plusieurs parties, en se focalisant sur certaines mesures au fil des mois.
Le problème, c’est que le temps presse. Dans un an ont lieu des élections de mi-mandat au cours desquelles les démocrates peuvent perdre leur très courte majorité au Sénat. Joe Biden a deux adversaires de taille : le temps court des élections, alors qu’il ambitionne des réformes qui demandent du temps long, et le poids de l’argent en politique.
Ce deuxième point explique en grande partie les positions de Joe Manchin. Il a touché beaucoup d’argent des lobbys industriels très influents dans sa circonscription, comme celui du charbon, mais aussi de donateurs pro-républicains qui sont opposés aux mesures sociales du Build Back Better. Le rôle immense joué par l’argent en politique aux États-Unis est un adversaire pour le président réformiste qu’est Joe Biden. Un président qui est arrivé au pouvoir en disant qu’il voulait lutter au maximum contre la polarisation politique entre les républicains et les démocrates. Aujourd’hui, nous voyons que cela peut dérailler.
Même s’il avait une majorité plus importante au Sénat quand il a été élu, on peut comparer la situation de Joe Biden à celle de Barack Obama. Pour l’Obamacare, les négociations avec les républicains ont été extrêmement difficiles, des concessions ont dû être faites. Et au-delà, l’Obamacare a mis des années avant de devenir populaire. Cela a pris dix ans pour que cette réforme s’ancre réellement dans les pratiques et dans les habitudes des Américains. Des réformes énormes comme celle-là demandent du temps long. Or le temps politique se raccourcit de plus en plus. »
Propos recueillis par Alain Guillemoles et Léa Ramsamy pour La Croix.