20.11.2024
La tenue de la présidentielle en Algérie pourrait « radicaliser la mobilisation »
Presse
16 septembre 2019
Le pouvoir a annoncé que la présidentielle se tiendrait le 12 décembre. Après l’annulation de l’élection qui devait se tenir le 4 juillet, ce scrutin a-t-il une chance d’avoir lieu ?
Tout dépendra du rapport de force entre le pouvoir et les manifestants. Ces derniers rejettent cette décision du président par intérim pour une raison simple : beaucoup jugent que les conditions d’une réelle transition démocratique ne sont pas réunies. Deux scénarios sont donc envisageables : la répétition de ce qui s’est passé le 4 juillet avec une annulation pure et simple du scrutin ; ou alors une élection que le pouvoir organise coûte que coûte, malgré le refus de la population. Le problème de ce scénario, c’est qu’on pourrait alors assister à une élection avec un taux de participation très faible et à un probable durcissement de la mobilisation, voire à sa radicalisation. L’avenir du pays reste en suspens.
Que reprochent précisément les manifestants au pouvoir ?
Ce n’est pas tellement le fait d’organiser une élection présidentielle qui pose problème, mais plutôt la méthode choisie par le pouvoir et le choix des personnes pour diriger l’instance d’organisation de l’élection. Clairement, choisir un ancien ministre de la Justice d’Abdelaziz Bouteflika, Mohamed Chorfi, comme président de cette instance envoie un mauvais signal. Cela décrédibilise d’office le pouvoir et ses intentions. Cela montre qu’on n’arrive pas à trouver les bonnes personnes pour organiser un tel scrutin ou qu’on ne se donne pas les moyens de trouver les bonnes personnes. Or est-ce que les dirigeants algériens veulent une transition démocratique réelle ou veulent-ils poursuivre avec le même système en changeant simplement quelques personnes, au risque de provoquer une future crise politique encore plus profonde et plus dramatique pour le pays ?
Le président par intérim, Abdelkader Bensalah, sous-estime la crise de confiance qui existe aujourd’hui entre le peuple algérien et le pouvoir. Celle-ci est très profonde et ne disparaîtra que lorsqu’il y aura eu des gestes réels pour faire adhérer la population au processus démocratique.
Que pourrait faire le pouvoir en place pour regagner la confiance des Algériens ?
D’abord instaurer un dialogue réel avec les acteurs de la mobilisation ou avec des représentants des partis politiques de l’opposition. Le président par intérim, le pouvoir en place, pourrait tout à fait mener un dialogue réel avec ces gens pour instaurer un climat de confiance. Au lieu de cela, l' »instance nationale de dialogue » qui a été formée en juillet et qui devait réunir partis politiques, société civile et représentants du mouvement de contestation, est une coquille vide car cette instance n’affiche pas, par son casting, une neutralité vis-à-vis du pouvoir en place. Par ailleurs, au lieu de chercher à convaincre les leaders de la mobilisation de participer à cette instance qui devrait jouer un rôle d’arbitrage, ceux-ci sont arrêtés.
Or, obtenir la participation des représentants de la mobilisation au dialogue national et à l’instance d’organisation des élections serait un gage important pour faire adhérer la population au processus de transition. Cette instance serait alors considérée différemment par les Algériens, qui la verraient comme un véritable garant du bon déroulement démocratique du scrutin.