21.11.2024
« Les sanctions américaines radicalisent tous les camps » au Venezuela
Presse
10 août 2019
Les sanctions américaines parachèvent un embargo financier déjà largement engagé par Barack Obama en 2015 puis poursuivi par Donald Trump à partir de 2016. Après les dernières décisions annoncées par Donald Trump le 5 août, le Venezuela se trouve entièrement exclu du système financier mondial et doit faire face à trois difficultés économiques majeures : le blocage aux États-Unis de tous les actifs du gouvernement vénézuélien, qu’ils soient commerciaux et financiers ; le risque de sanctions sur le marché américain pour toute entreprise faisant du commerce avec le Venezuela, particulièrement handicapant puisque ce pays importe pratiquement tout ce qu’il consomme ; et l’impossibilité de se financer auprès des banques américaines, qui pose le problème du remboursement de la dette.
Il y a donc un cousinage très fort avec l’embargo cubain. Le conseiller national à la sécurité de la Maison-Blanche John Bolton l’a très bien résumé lorsqu’il a annoncé que le Venezuela rejoignait l’Iran, la Corée du Nord et Cuba (pays sur les lesquels les États-Unis exercent une très forte pression commerciale et financière, NDLR).
Nicolas Maduro peut-il se maintenir à la tête de l’exécutif ?
Difficile à dire. Les sanctions américaines radicalisent tous les camps. Elles cimentent le pouvoir en place. La solidarité de l’armée vénézuélienne à l’égard du régime est renforcée. Les forces armées exigent par ailleurs que des mesures soient prises contre Juan Guaido qui est désigné en interne comme le responsable du renforcement des sanctions américaines.
Dans un second temps, l’opposition se polarise. Henri Falcon, candidat de l’opposition lors de l’élection présidentielle de 2018, s’oppose aux mesures américaines. On a d’une part ceux qui souhaitent renverser le pouvoir et qui soutiennent Juan Guaido et d’une autre part, ceux qui veulent que les négociations avec le régime en place continuent comme Henri Falcon.
Enfin, ce durcissement de la politique américaine renforce le soutien apporté par les alliés du président, la Russie et la Chine en tête. Les deux pays ont annoncé vouloir continuer leur coopération avec le Venezuela. La Chine a fait savoir qu’elle souhaitait renforcer l’intégration du Venezuela dans les nouvelles routes de la soie de Xi Jinping. Elle va aussi prendre en charge la remise en état des raffineries vénézuéliennes qui sont à l’arrêt faute de maintenance et qui rendaient le Venezuela dépendant des États-Unis.
Juan Guaido a-t-il encore une influence suffisante pour diriger une éventuelle transition au Venezuela ?
Juan Guaido bénéficie encore d’une grande influence sur le plan international où il incarne l’opposition. La réunion ostentatoire d’une soixantaine d’États à Lima, au Pérou, pour lui témoigner leur soutien en est un bon exemple.
Mais sur le plan national, il dispose d’un soutien très faible. Il avait promis une chute rapide du gouvernement de Nicolas Maduro or, sept mois plus tard, elle n’est toujours pas venue. Maintenant, on assiste à une fatigue de la vie politique au Venezuela. La subsistance économique est devenue la priorité quotidienne des Vénézuéliens.
Propos recueillis par Hugo Simon pour La Croix.