17.12.2024
Hausse des prix mais fondamentaux qui poussent à la baisse : ces grands paradoxes du marché du pétrole
Presse
9 avril 2019
Le prix du Brent produit en mer du Nord a dépassé le seuil des $71 par baril le 8 avril à Londres et la hausse depuis la fin 2018 est de près de 35%. C’est le résultat de la hausse de la demande pétrolière mondiale, de la réduction de la production de l’OPEP et de dix pays non-OPEP dont la Russie, des sanctions américaines contre l’Iran, de l’effondrement du Venezuela, des espoirs sur les marchés quant à un accord commercial entre les Etats-Unis et la Chine et, tout récemment, du regain des tensions militaires en Libye. Ce sont des facteurs de court terme et ceux-ci pèsent d’un poids considérable sur les marchés pétroliers.
Pour le moyen terme à présent, nous avons effectivement la perspective d’une forte hausse de la production pétrolière des Etats-Unis qui, selon l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), pourrait augmenter de 4 millions de barils par jour (Mb/j) entre 2018 et 2024. De plus, d’autres pays verront leur production croître dans cette période: le Brésil, l’Irak, la Norvège, les Emirats Arabes Unis sans oublier le cas du Guyana, en Amérique du Sud, qui deviendra un producteur et exportateur de pétrole au début 2020.
Cela ne veut cependant pas dire que les prix du pétrole vont forcément baisser à moyen terme car il ne faut pas oublier la demande. Selon l’AIE, elle pourrait être supérieure de 7 Mb/j en 2024 à son niveau de 2018. Nous vivons dans un monde qui continue à consommer chaque année plus de pétrole du fait du poids des pays émergents et en développement et ce n’est pas fini. Il est donc trop tôt pour annoncer une baisse durable des cours de l’or noir.
Ne peut on pas également voir un paradoxe découler d’une volonté des pouvoirs publics de réduire la dépendance des ménages et des entreprises des produits pétroliers, et ainsi de pousser les prix vers le bas, rendant l’incitation paradoxale ?
Cette volonté existe en effet, notamment en lien avec la lutte contre le changement climatique. C’est un élément à prendre en compte dans une analyse portant sur le long terme et le très long terme. Mais, à court et à moyen terme, la consommation pétrolière mondiale va continuer à augmenter en Asie, au Moyen-Orient et en Amérique Latine. Or, le poids des pays émergents et en développement dans l’économie mondiale est tel aujourd’hui qu’ils suffisent à tirer à la hausse la consommation pétrolière mondiale. Certes, en France et en Europe, la consommation pétrolière n’augmente plus et elle peut même baisser mais il ne faut pas penser que nous soyons actuellement le centre du monde économique, pétrolier et énergétique. Ce serait une grave erreur.
Peut-on estimer, au regard de ces transformations concernant aussi bien l’offre que la demande, que les équilibres pétroliers vont se trouver effectivement bouleversé durant les prochaines années ?
Il y a plusieurs évolutions très importantes sur les marchés pétroliers mondiaux et la hausse de la production pétrolière des Etats-Unis depuis 2008, grâce au pétrole non conventionnel, est sans aucun doute un aspect majeur. Sans cela, les prix du brut seraient aujourd’hui beaucoup plus élevés. Et, si la consommation pétrolière n’était pas encore orientée à la hausse, ces prix seraient beaucoup plus bas. N’oublions pas non plus les stratégies de l’OPEP et de ses alliés non-OPEP et les troubles géopolitiques (Iran, Venezuela, Libye, etc.). Tous ces facteurs sont dominants dans le court et le moyen terme.
Dans le long et le très long terme, le facteur climatique prendra de plus en plus d’importance. La consommation pétrolière mondiale ne continuera pas à augmenter jusqu’à la fin des temps. La grande question est de savoir quand nous atteindrons une phase de plateau de cette consommation: 2030, 2035, 2040 ou au-delà ? Les paris sont ouverts. Mais, ce qui est sûr, c’est que l’on n’a pas encore fini de parler des fluctuations des prix du brut à la baisse et à la hausse pendant de nombreuses années.