21.11.2024
Faut-il reconnaître Juan Guaido à la tête du Venezuela ?
Presse
1 février 2019
Nicolas Maduro est reconnu par l’ONU. C’est le président élu, même si sa réélection en 2018 a été fortement contestée. Non pas parce qu’il n’a pas obtenu assez de suffrages, mais parce que l’opposition n’y a pas participé. N’oublions pas que des millions de Vénézuéliens ont voté pour Nicolas Maduro. Vu la situation catastrophique du pays, ce n’est peut-être plus la majorité, mais ces gens ne vont pas s’évaporer. Il serait illusoire de penser qu’un coup d’Etat ou une intervention étrangère ramènerait la démocratie.
L’armée a-t-elle la clé du pays entre les mains?
Nicolas Maduro aurait de la peine à se maintenir au pouvoir sans le soutien des militaires, c’est certain. Mais l’armée n’a pas toujours eu ce rôle au Venezuela. C’est le seul pays latino-américain, avec le Costa Rica et la Colombie, qui n’a pas connu de dictature militaire pendant la guerre froide. Depuis le coup d’Etat manqué contre Hugo Chavez en 2002, le Venezuela se militarise de plus en plus et la démocratie recule. C’est malheureux, mais c’est une réaction aux tentatives de déstabilisation.
Les pressions internationales sont-elles devenues indispensables ou représentent-elles une ingérence dangereuse?
Affirmer aujourd’hui, comme le font les Etats-Unis, que toutes les options sont sur la table accroît les tensions et les risques de dérapage. Ces menaces radicalisent les soutiens de Nicolas Maduro. Des préparatifs militaires sont sans doute déjà en cours au Venezuela. Les gens s’arment. On ne peut pas justifier une ingérence au nom de la situation économique d’un pays. Sinon, on interviendrait sur la moitié de la planète. De même, le fait que les Etats-Unis saisissent les avoirs vénézuéliens apparaît aux yeux de très nombreux pays comme une démonstration de puissance. Dans le passé, les opérations de déstabilisation de pays latino-américains étaient plus discrètes.
Comment sortir de l’impasse?
Le président Maduro doit reconnaître l’autorité du parlement et vice versa. Mais, depuis l’époque d’Hugo Chavez, l’opposition vénézuélienne s’est toujours caractérisée par son refus enragé des règles démocratiques. Aujourd’hui encore, je ne vois pas comment qualifier autrement le fait de se proclamer unilatéralement président. Comme l’armée reste derrière Nicolas Maduro, Juan Guaido en appelle à la communauté internationale. Mais celle-ci est tout aussi divisée que la population vénézuélienne. Si les Etats-Unis ont reconnu Juan Guaido, l’Europe n’a heureusement pas franchi le pas, la Russie et la Chine soutiennent toujours Nicolas Maduro. C’est dans ces situations que la diplomatie est utile. L’ONU mais aussi le Mexique et l’Uruguay appellent à une conférence internationale. C’est la voie du bon sens, plutôt que de choisir son camp et de jeter de l’huile sur le feu.