17.12.2024
« L’OPEP conserve une influence importante sur le marché »
Presse
18 novembre 2018
Entre le début octobre et le 14 novembre, le prix du brent de la mer du Nord a chuté de près de 20 dollars par baril pour tomber à un peu plus de 66 dollars le baril. Cette baisse est due à différents facteurs. Alors que les marchés pétroliers s’inquiétaient face au risque d’insuffisance de l’offre, celle-ci a continué à augmenter grâce à l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et à des pays non OPEP, pour atteindre actuellement le seuil record de 100 millions de barils par jour. Ceci a conduit les opérateurs du marché (traders) à modifier leurs positions et à jouer le pétrole à la baisse.
L’Arabie Saoudite a clairement indiqué qu’elle ferait en sorte d’éviter toute pénurie de pétrole. En outre, les stocks de pétrole brut aux Etats-Unis, premier marché pétrolier mondial, ont fortement augmenté depuis plusieurs semaines. Les Etats-Unis ont accordé des exemptions à huit pays afin que ceux-ci puissent continuer à importer du brut iranien sous certaines conditions pendant plusieurs mois. Et enfin, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et l’OPEP ont revu à la baisse leurs projections de hausse de la demande pétrolière mondiale en 2018 et 2019.
Cette nouvelle tendance à la baisse est-elle appelée à s’inscrire dans la durée ?
L’éventuelle poursuite de cette tendance baissière dépendra de l’impact des sanctions américaines sur la production et les exportations pétrolières de l’Iran à partir de ce mois, puisqu’elles sont entrées en vigueur en novembre, de la baisse de la production du Venezuela, de la décision que prendra l’OPEP lors de la prochaine réunion de sa Conférence ministérielle au début décembre sur son niveau de production en 2019, du comportement de l’Arabie Saoudite, qui a déjà annoncé une réduction de 500 000 b/j, et de l’évolution de la demande, elle-même étant en fonction de la croissance économique mondiale et des tensions commerciales suscitées par l’administration Trump.
L’OPEP garde-t-elle encore le pouvoir d’agir sur l’équilibre du marché et des cours pétroliers mondiaux ?
Oui. Dans ce que j’évoquais ci-dessus, le point clé sera la décision de l’OPEP et des dix pays non OPEP qui coopèrent avec l’Organisation depuis la fin 2016. Le redressement des prix à court terme ne pourra pas être assuré sans une réduction significative de la production de ces deux groupes de pays exportateurs. Ces 25 pays (dont 15 Etats membres de l’OPEP) représentent environ la moitié de l’offre pétrolière mondiale, ce qui constitue une part de marché très importante. N’oublions pas que la coopération entre ces 25 pays, dont l’Arabie Saoudite et la Russie, a largement contribué à l’augmentation spectaculaire des prix du pétrole entre 2016 et 2018 après l’effondrement des cours entre l’été 2014 et le début de l’année 2016. Avec environ un tiers de la production mondiale de pétrole, l’OPEP conservera une influence importante sur le marché si elle utilise bien les atouts qu’elle a dans son jeu. Le principal obstacle reste la hausse continue de la production des Etats-Unis, qui dépasse maintenant 11 millions de b/j pour le seul pétrole brut (sans compter les liquides produits avec le gaz naturel).
A quelle fourchette de prix du baril de brut doit-on s’attendre en 2019 ?
Personne ne peut prédire les prix du pétrole. Il suffit de regarder leur évolution depuis quatre ans pour s’en convaincre, puisque l’on a eu dans cette période deux phases de baisse et une phase de hausse avec une amplitude allant de 27-28 dollars/b à 115 dollars/b pour le brent, soit de un à quatre… Selon les scénarios sur le comportement de l’OPEP, l’impact des sanctions contre l’Iran et l’évolution de la demande, une fourchette de 60-80 dollars/b est la plus vraisemblable pour 2019, mais (presque) tout est possible à court terme. Beaucoup de choses cependant se joueront dans les prochaines semaines du côté de Vienne, pour l’OPEP, de Washington et de Téhéran.