ANALYSES

La Chine continuera à s’affirmer en 2018

Presse
28 décembre 2017
En cette fin 2017, on ne peut nier qu’un pays a gravi, cette année, un nouvel échelon dans le classement des grandes puissances. Certes, sur le plan militaire, les États-Unis dominent encore largement la Chine : le budget américain de la Défense reste quatre à cinq fois supérieur au budget chinois.

Mais la Chine a aussi inauguré sa première base militaire à l’étranger — à Djibouti, non loin des bases navales française et américaine — et occupe le premier rang des pays contributeurs de troupes de maintien de la paix. De l’avis des experts, les pays où elle œuvre, sont en général exclusivement choisis en fonction de ses intérêts stratégiques.

En outre, Pékin a multiplié les initiatives à l’international : du discours pro mondialisation de Davos, prononcé par le président Xi Jinping en janvier, au sommet One Belt, One Road, qui a accueilli en mai une trentaine de dirigeants étrangers, il ne s’agit plus de s’interroger sur la volonté chinoise de devenir une grande puissance mais de savoir comment et avec quels moyens elle entend profiter de la multipolarité. Le discours-fleuve prononcé par Xi lors du 19e congrès du Parti communiste chinois, le 18 octobre, avait l’avantage de la clarté : « Nous devons nous situer sur le devant de la scène », a déclaré le dirigeant, triomphalement reconduit pour cinq ans dans ses fonctions.

Face à un Occident dérouté par les tergiversations d’un Donald Trump ou par les péripéties du Brexit, la Chine entend prendre toute sa place dans la gouvernance mondiale et dans la défense du commerce mondial, dont elle est l’un des principaux bénéficiaires en tant que deuxième économie mondiale et exportatrice.

Macron en Chine début janvier

À cet égard, le voyage de Donald Trump en Asie en novembre a donné l’impression d’une certaine schizophrénie. D’un côté, Pékin a reçu en grande pompe le chef de la Maison-Blanche, qui apprécie les traitements exceptionnels et n’a cessé de tresser des lauriers à Xi Jinping.

D’un autre, Washington dénonce le manque de réciprocité économique de la Chine (le rapport sur la stratégie nationale a dénoncé une « agression économique » vis-à-vis des États-Unis), et semble se préparer à l’avènement probable du « piège de Thucydide » qui envisage – selon la lecture de Graham Allison, professeur à Harvard (*) -un antagonisme entre la superpuissance établie et la superpuissance montante à la manière de Sparte et d’Athènes qui s’affrontèrent il y a 2 500 ans. Il n’est pas certain que le positionnement de Donald Trump depuis son élection le place en situation de force…

Comment se positionnera la France dans un tel contexte ? Emmanuel Macron se rend en Chine début janvier, et son approche pragmatique et plutôt équilibrée telle qu’il l’a détaillée à la fois dans son programme de campagne et depuis son élection, semble raisonnable : premièrement, développer une relation avec Pékin sur certains grands sujets mondiaux, à commencer par le climat, tout en exigeant une réciprocité économique et le respect des normes internationales ; deuxièmement, obtenir l’aide de la Chine dans certaines crises des régions où elle a surtout avancé ses pions sur le plan géoéconomique ; troisièmement, réaffirmer l’approche européenne, indispensable pour un président français dont les ambitions pour l’UE sont connues, ce qui semble d’ailleurs, à l’égard de Pékin, la seule politique possible.

(*) G. Allison, Destined for War : can America and China escape Thucidydes’ trap ? (Houghton Mifflin Harcourt, 2017).
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