17.12.2024
Guerre des étoiles, le retour : les Etats-Unis réfléchissent sérieusement à la création d’un corps d’armée pour les conflits de l’espace
Presse
4 janvier 2018
Le congrès américain est passé près de la création d’une nouvelle branche de l’armée américaine dévolue à la défense des satellites dans l’espace. Quel serait l’intérêt de créer un corps spécialement dévolu à la défense des intérêts américains dans l’espace séparé de l’Air Force ?
Il existe déjà, depuis le début des années 80, un commandement des forces spatiales (Space Command) dont le périmètre, qui incluait les missiles stratégiques, a souvent varié au cours des années, mais est toujours resté l’une des composantes majeures de l’Air Force. Ce commandement est actuellement chargé de trois missions : la mise en place des réseaux de satellites, le contrôle du segment spatial (ce qui inclut sa protection) et la fourniture de services issus du segment spatial au profit des forces.
Ce commandement était donc essentiellement un commandement de soutien destiné à servir l’ensemble des armées américaines et pas seulement l’Air Force. Sa taille était importante, puisqu’il comptait près de 40.000 hommes, l’équivalent de l’ensemble de l’Armée de l’Air française.
La restructuration en cours va plus loin que celle du seul commandement Espace de l’Air Force. En fait, c’est l’ensemble du commandement du commandement stratégique américain (USSTRATCOM) qui est redessiné. Ou, plus exactement, qui sera probablement redessiné, car de nombreuses discussions et polémiques semblent être encore en cours.
La création d’un corps interarmées répond à deux objectifs. Le premier est d’affirmer le fait que le segment spatial est l’affaire des trois (quatre en comptant le Marine Corps) armées et pas seulement celui de la seule Air Force. Le second, celui qui crée le plus de polémiques, est celui de replacer les priorités. L’Armée de l’Air américaine est déjà en charge, en plus des missions traditionnelles, des missiles stratégiques. Les autres armées, mais aussi l’administration civile du Pentagone, lui reprochent de s’être accaparé le commandement de l’espace et d’en avoir fait une priorité subalterne, en acceptant d’être dépendante pour ses lancements à la fois de la Russie et d’un lanceur national dépassé et trop cher. On lui reproche aussi d’avoir négligé autant des pistes commerciales que des progrès technologiques.
Dans ces conditions, la création d’un corps indépendant permettrait, selon ses promoteurs, de remettre certaines priorités en place. Toutefois, les résistances demeurent fortes et, pour le moment, la création d’un commandement interarmées (JFSC, Joint Forces Space Component), le 1er décembre 2017, n’est qu’une étape intérimaire, le commandement Air demeurant en place et gardant l’essentiel de ses missions. L’officier général chef de la composante interarmées est d’ailleurs aussi –double casquette- celui de l’AFSC.
Quelles menaces pourraient planer sur les satellites américains ? Concrètement que se passerait-il du point de vue opérationnel si les satellites américains étaient victimes d’une attaque quelconque ?
Pour les forces américaines, comme pour toutes les grandes armées du monde, les satellites sont devenus indispensables. Ils fournissent une navigation précise (GPS ou équivalents), cartographie, météorologie, renseignement dans tout le spectre, communications, détection de départs de missiles, désignation de cibles mobiles etc.. On a donc rapidement pensé à construire des armes anti satellites, malgré toutes les déclarations sur l’interdiction de la militarisation de l’espace. Les Etats Unis et l’U.R.S.S. ont procédé à quelques expérimentations plus ou moins réussies dans les années 60 et suivantes, avant d’abandonner officiellement cette option. Le débat a été brutalement relancé en 2007, quand la Chine a détruit un de ses propres satellites et annoncé qu’elle envisageait de porter une éventuelle guerre dans l’espace.
Les satellites ont plusieurs types de vulnérabilité. Ils peuvent être simplement détruits. Il y a cinquante ans, la précision des armes envisageables avait conduit à penser qu’il serait nécessaire d’utiliser des charges nucléaires pour une interception. On sait aujourd’hui détruire un satellite simplement en le heurtant par un coup direct. Mais on peut penser à d’autres modes d’action. Les satellites de communication peuvent être brouillés. Ceux chargés de la détection peuvent être « aveuglés » par des faisceaux laser. Ce mode d’action semble d’ailleurs avoir déjà été utilisé par Pékin contre des satellites US en 2006 et 2007. Aveuglés, brouillés ou détruits, des satellites n’apporteraient plus l’aide habituelle à des forces qui comptent sur eux pour la plupart de leurs missions. Très peu d’entre elles seraient capables de garder le même niveau d’efficacité en revenant à des moyens qu’elles ont perdus l’habitude d’utiliser. Mais il faut aussi comprendre que les pays capables de s’attaquer aux satellites d’un adversaire sont, eux aussi, presque totalement dépendants de leur propre segment.