ANALYSES

Mais que se passerait-il si les Chinois décidaient de ne plus recycler les produits usagés que la plupart des pays occidentaux leur expédient ?

Presse
17 décembre 2017
Interview de Sylvie Matelly - Atlantico
D’ici la fin de l’année, la Chine va bannir l’import de 24 types de déchets destinés au recyclage en les qualifiant de « détritus étrangers ». Cette décision va obliger les produits exportateurs à s’adapter.

D’ici la fin de l’année la Chine va bannir l’import de 24 types de déchets destinés au recyclage en les qualifiant de « détritus étrangers ». Quelles pourraient être les conséquences pour les pays exportateurs de déchets à court et moyen termes?

Sylvie Matelly : Les pays exportateurs vont devoir trouver des solutions. A court terme il est probable que ce soit de nouveaux marchés. On parle de la Malaisie et d’autres pays seraient prêts à accueillir ces déchets. A moyen ou long terme qu’on le veuille ou non il faudra que les pays qui produisent autant de déchets mettent en place des mesures qui permettent de les recycler au mieux et cela aura un coût. Des investissements seront nécessaires. Cela viendra soit d’une volonté politique dans un contexte de lutte contre le réchauffement climatique et de volonté de préservation de l’environnement et même avec l’absence de volonté politique, le fait que la Chine ferme son marché, cela va automatiquement faire monter le prix de la tonne de déchet et lorsque cela sera rentable de se lancer dans le recyclage, on investira.

Je ne pense pas que cette interdiction créera de nouvelles décharges ou qu’il y aura de nouvelles atteintes à la préservation de l’environnement ou alors à très court terme. Ce qui est certain c’est que l’addition de la gestion des déchets va augmenter et que l’on va être obligé d’avoir de véritables réflexions sur les emballages, les plastiques et la gestion de nos déchets en général avant même de produire.

Est-ce que la Chine avec cette décision ne se prive pas tout de même d’une économie qui pourrait être intéressante ?

La Chine ne fait rien sans avoir de stratégie. Ils ont calculé que ces déchets difficilement recyclables ne leur rapportent rien. D’un point de vue social avec la progression et le développement économique du pays couplé à l’émergence d’une classe moyenne, il y a aussi l’apparition d’une volonté des Chinois d’arrêter d’être la poubelle du monde.

Cette décision de la Chine exprime aussi la volonté de choisir ses déchets. De choisir des déchets qui sont recyclables, des déchets à forte valeur ajoutée qu’elle n’aura pas à stocker pendant des années sans les exploiter. L’avantage de la première solution lorsqu’on ne les exploitait pas, qu’on les laissait trainer c’est que cela ne coûtait rien mais c’est évidemment une catastrophe écologique à long terme.

On réfléchit également à une piste malaisienne mais au final est-ce le bon chemin à prendre pour les pays exportateurs de déchets ?


A très court terme une filière de gestion des déchets ne s’improvise pas, d’où la piste malaisienne. Pour traiter les déchets chez nous, ce qui serait une démarche plus vertueuse, cela supposerait la création d’usines et le développement d’une industrie derrière. Il y a des enjeux d’emplois derrière la gestion des déchets. Reste à voir si le consommateur accepte de voir s’ouvrir des usines de retraitement des déchets à côté de chez lui. Exporter des déchets est beaucoup plus facile car il n’y a pas de remise en question à faire, on se contente de délocaliser le problème. Mais je doute, quel que soit la solution à court terme qu’elle puisse avoir l’ampleur de ce qu’était la solution chinoise.
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